Chapitre 47

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La nuit tombe et peu à peu, tout le monde part se coucher. Vila et Faolàn sont allongés côte à côte. Faolàn inspire l'odeur chaude de farine et de tissu de la jeune femme nue allongée contre lui. Il ferme les yeux doucement, sur le point de s'endormir.
"Fao, tu ne m'as vraiment dit qui était la gamine avant."
Faolàn grogne intérieurement et se racle la gorge.
"Fao ?"
"On l'avait faite prisonnière dans un des villages que les Winterschlächter ont dévasté."
"Je veux entendre toute l'histoire."
Il lève les yeux au ciel.
"Vam, le chef, a voulu que je la tue lorsqu'elle est... Tombée malade. Je l'ai abandonnée dans la neige, on l'a sauvé, je me suis retrouvé prisonnier, elle m'a sauvé la vie. Ensuite on s'est retrouvé chez Erohel. On s'est débarrassé de lui et on a fui."
Faolàn parle d'une voix calme, dénuée d'émotions, émettant volontairement tout les détails. Vila se tourne vers lui et lui caresse la joue.

"Est-ce que tu ressens quelque chose pour cette petite ?", susurre-t-elle, la voix dégoulinant de jalousie. Faolàn serre les dents. Son coeur accélère tandis qu'il ferme les yeux un instant.
"Alors?", dit Vila d'un ton plus dur.
"Rien. Absolument rien."
La femme blonde éclate de rire.
"Mon petit guerrier chéri...", ses mains amochées caresse son torse, elles descendent de plus en plus bas. Faolàn sent son corps se tendre tandis que le désir se fait ressentir à nouveau. Vila s'approche de son oreille.
"Je ne te crois pas une seconde.", murmure-t-elle, "Tu te rends compte ? Moi, qui ai passé chaque seconde de ma vie à t'aimer, qui ai souffert horriblement et toi, profitant d'une gamine qui n'est même pas jolie ? Je ne m'attendais pas une trahison pareille, mon coeur."
Doucement, ses paumes entourent le sexe de Faolàn. Un son rauque échappe à ses lèvres tandis que sa tête retombe en arrière.

"Je suis désolé...", dit-il, incapable de formuler des pensées cohérentes tandis que Vila commence à le caresser. Elle pose ses lèvres sur son torse, sa nuque, remonte à son oreille.
"Seulement désolé ?"
Faolàn grogne, pousse son bassin en avant. Vila rit doucement et l'embrasse sur les lèvres, ses mains s'amusant toujours.
"Ça ne me suffit pas, mon amour. Il va en falloir un peu plus pour te faire pardonner. Je veux que tu me prouves que tu n'aimes que moi. Tu acceptes ?"
Faolàn, sur le point de venir, hoche la tête sans réfléchir, aveugler par le désir et les mains de la jeune fille, ses lèvres, sur son corps.
"Dis le."
"J'accepte.", grogne-t-il et après un large sourire, Vila s'empale sur lui pour le récompenser.

Le lendemain, Faolàn se réveille à l'aube, lorsque le soleil commence à éclairer la petite pièce de ses rayons. Vila dort encore à poings fermés. Pour ne pas la réveiller, il se lève doucement, s'habille sans un bruit et sort de la maison sans même claquer la porte. Dehors, la gelée du matin reflète la lumière rosée du ciel et plonge le paysage dans une lumière presque magique. Faolàn descend les marches et avance jusqu'au petit étang au fond du large terrain d'herbe glacée. Quelques hommes travaillent déjà.
"B'jour", l'un d'eux lui fait un signe de main et Faolàn lève sa main de façon incertaine avant de s'assoir, ses pieds touchant presque l'eau gelée.

Il repense à la soirée précédente et un mélange de culpabilité, désir et rage lui prend les tripes. Vila me tient par les couilles, et je ne peux rien faire contre ça. Si au moins elle n'était pas si jolie, sa voix moins mélodieuses, ses mains moins douces! Mais non. Et lui, imbécile de première avait accepté tout ce qu'elle lui avait demandé de faire.
"Tu sais, mon amour, tout d'abord, j'aimerais que tu répudies ouvertement la gamine. Ensuite, si tu veux que ça dure entre nous... Alors il va falloir m'épouser."

Faolàn grogne. Bon sang, comment avait-il pu dire oui ? Il regarde son reflet. Il allait devoir blesser Freyja, l'humilier! Il ferme les yeux. Quel idiot il faisait, incapable de résister à une femme. Une chose était sûre: la douce Vila de son enfance n'était plus. Et il avait dit oui pour l'épouser. Par tout les dieux. A coté de lui, il entend brusquement des bruits de pas qui se fige. Il tourne la tête. Freyja. Elle lui jette un regard ennuyé, s'éloigne et s'installe de l'autre côté de l'étang. Faolàn déglutit.
"Bonjour.", finit-il par lancer. Crétin! Freyja hausse un sourcil mais ne répond pas.
"Bien dormi ?"
Faolàn continue sur sa lancée, sans réfléchir une seconde.
"Moins bien que toi, je suppose.", grommelle-t-elle et Faolàn sent quelque chose comme de l'embarrassement lui monter au visage. Aucune réponse ne lui vient à l'esprit alors qu'il fixe la gamine, un sourire se formant au coin des lèvres. Il a du répondant, le petit oiseau ! Faolàn se lève et va s'assoir à côté d'elle. Il se racle la gorge.
"Freyja... Je suis désolé. Je ne voulais pas te mettre dans une situation pareille."
La jeune fille lève les yeux au ciel.
"Oh ferme-la un peu! Garde tes mots pour la blondasse quoique pour ce que vous faites, les mots ne sont pas vraiment nécessaires."
Il serre les dents.
"Fais attention à ce que tu dis, gamine."
"Pourquoi ?", elle rit durement, "Tu vas m'attacher à un poteau ? Tu vas me frapper ?"
"Tu sais très bien que je ne te ferais plus une chose pareille !", s'exclame Faolàn, les yeux exorbités tandis que son coeur se rappelle douloureusement ses actes.
"Tu l'as déjà fait ! Qu'est-ce qui t'empêches de le refaire ? Tu es une brute, colérique, sans coeur..." Des larmes se forment dans le coin des yeux de Freyja, elle les écarte rageusement tandis que Faolàn se penche en avant et pose ses lèvres sur les siennes.
"Tais-toi.", murmure-t-il, "Tais-toi petit oiseau, arrête de ressasser ce que j'ai pu te faire. Je ne le ferai plus, tu as ma parole, et si je ne la tiens pas, tu peux me trancher la tête à coeur joie."

Ses mains se perdent dans les boucles brunes de Freyja, bercé par son odeur. Ses lèvres ont un léger goût salé à cause des larmes. Des larmes que lui a provoqué... Les mains de la jeune femme le repousse.
"Arrête! Mais à quoi tu joues ? Tu m'embrasses-moi, puis...Vila et dès qu'elle a le dos tourné, tu reviens vers moi ? Je ne suis pas un jouet et mon coeur encore moins."
Pendant quelques secondes, Faolàn ne dit rien, un peu essoufflé. Finalement, il se ressaisit.
"Je sais. Bordel, je sais! Mais je ne sais pas quoi faire, Freyja, je ne sais pas géré les sentiments et les désirs, je sais être violent et froid mais je ne sais pas comment avoir des putains de relations normales!"
"Faolàn, qu'est-ce que je suis pour toi, exactement ? Une gamine, un jouet, un gentil chien-chien qui t'as sauvé la vie ?" La voix de Freyja est dénuée d'émotions et Faolàn se fige.

Je t'aime, idiote ! "Je ne sais pas."
Freyja ferme les yeux et pousse un rire dur.
"Je vois", dit-elle calmement, "Et bien... Je te souhaite tout le bonheur du monde avec Vila."
Ensuite, elle se retourne et s'éloigne. Faolàn ne dit rien, ne lui cour pas après. Il reste assis, à contempler la glace. Quelque chose dans sa poitrine sonne creux tandis que son coeur lui hurle qu'il n'a peut-être pas fait le bon choix.

~***~

Freyja rentre dans l'espace qui forme sa chambre et s'allonge sans un bruit sur les fourrures de son lit et s'enroule dedans. Elle lève les yeux au plafond.
Qu'allait-elle faire maintenant ? Sa vie est en miettes. Une ruine en flamme, bientôt réduite en cendres. La jeune femme déglutit. Elle n'a pas de famille, plus de maison. Elle fuit parce qu'elle a sauvé un meurtrier qui lui, lui a volé sa dignité, sa tranquillité et son coeur. Elle n'a nulle part d'autres où aller. Freyja renifle tandis que des larmes surgissent finalement et roulent le long de ses joues.

Qu'allait-elle faire?
Elle est complètement perdue. Derrière les rideaux, elle entend que Kild et Vila se sont levés à leur tour. Elle entend Faolàn rentrer. Elle enroule les fourrures un peu plus autour d'elle comme pour disparaître. Disparaître? Une idée macabre se présente aux yeux de la jeune femme.

Si la vie ne veut pas d'elle, alors elle n'a qu'à tenter l'alternative.
Mourir ne lui fait plus si peur qu'au début, après tout, ça ne peut pas être pire que vivre l'enfer.

Vénus a froidOù les histoires vivent. Découvrez maintenant