Chapitre 28

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Freyja lui pose une main tremblante sur les cheveux sales. Des touffes ont été arrachées à certains endroits, laissant des croûtes sanglantes à leur place. Elle met doucement la tête de Faolàn sur ses cuisses, il est encore secoué de spasme.
"Je suis désolé... Désolé...", murmure-t-il sans cesse dans le tissu de sa tunique tandis que la jeune fille lui caresse lentement le dos.

Elle regarde un peu dans le vide, elle est presque en train de pleurer aussi.
Qu'est-ce qu'il lui ont fait?
L'homme qu'elle a en face d'elle, n'est plus l'homme qu'elle déteste. Elle est éprise de pitié pour lui.
"Ça va aller.", murmure-t-elle alors, sachant pertinemment que le lendemain sera le premier jour du calvaire menant à l'exécution.

Faolàn allait mourir : et rien ne pourrait y changer.

L'homme qui avait accompagné la jeune fille et la guérisseuse ouvre la porte de la cage. Après avoir jeté un regard haineux à Freyja, il lui fait signer de quitter les lieux. Doucement,elle repose Faolàn sur la terre.

Dans un élan d'énergie soudain, celui-ci relève la tête et lui agrippe la main, lui jetant un regard implorant.
"Ne pars pas!" Elle secoue la tête sans rien dire. Elle ne peut plus rien faire pour lui. Sa main retombe mollement dans la boue, suivie de sa tête. Freyja sort à coeur lourd.

~***~

Après avoir mangé, Freyja et Praga se retrouve hébergées chez une femme veuve et son enfant, une petite fille d'une dizaine d'années. Praga à décidé qu'elle assisterait à l'exécution de Faolàn et Freyja ne voit pas d'autre choix que de l'accompagner.

Au bout d'une heure, Praga se retire et s'endort, laissant Freyja seule avec la femme. Elles restent silencieuses un instant.
"Tu connais cet homme?", demande alors la veuve et Freyja hoche lentement la tête. La femme la regarde attentivement avant de lui caresser le bras.
"Tu n'as pas l'air d'avoir eu une vie facile, petite."
Une larme égarée roule le long de la joue de la jeune fille tandis qu'elle renifle le moins fort possible.
"

Je... Je ne sais pas pourquoi mais...", Freyja inspire un grand coup, ferme les yeux "Cet homme fait partie du groupe qui a ravagé mon village et bien d'autres encore, comme vous le savez. Mais... Il ne m'a pas tuée. Il ne m'a même pas touchée. Il m'a emmenée dans ce camp de brute et m'a hébergée dans sa tente. Je ne l'excuse pas pour autant: sur un coup de colère, il m'a attachée au poteau ou j'ai subi des assauts de toutes sortes par ces... Ces animaux. Il m'a abandonnée dans la forêt, gravement malade et enceinte, il m'a humiliée et insultée... Et pour tout ça je le déteste, je le hais du fond de mon coeur et pourtant... Il m'a racontée son histoire, alors qu'il me croyait endormie. Il a pleuré contre moi, il s'est excusé, il s'est inquiété."
La veuve lui jette un regard désolé et lui fait signe de continuer.

"Je suis perdue, maintenant, après l'avoir vu dans cet état. Je le croyais un monstre: mais des hommes qui torturent un des leurs a ce point, ne sont-ils pas des monstres aussi? Je ne... Je ne comprends pas ce que je ressens, parce que... Je...je...", la voix de Freyja se brise dans un sanglot "Je ne veux pas qu'il meurt comme ça. Il a mérité d'être puni mais il n'a pas mérité un traitement pareil."

La femme en face d'elle prend une voix dure.
"Ce sont les lois, gamine. Cet homme, si on peut encore l'appeler homme, ne mérite rien d'autre que ce qui lui est infligé."
Freyja déglutit et hoche péniblement la tête.
"Je vais me coucher.", murmure-t-elle "Les derniers événements m'ont un peu secoués."

D'un pas décidé, elle se lève et passe le rideau qui la mène à ses fourrures. Lentement, Freyja s'allonge et tente de fermer les yeux. Elle entend des cris de douleur au loin.
Elle essaie de se persuader que ce n'est que le cri d'un oiseau.
Une simple bête qui se fait chasser.
Mais bientôt, sa tête est remplie de ces cris à la mort, elle n'arrive à se concentrer sur rien d'autre, son ventre se révulse, elle a mal au coeur.

Vénus a froidWhere stories live. Discover now