Chapitre 23

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Je finis par arriver en haut, tout tremblant. Ma réussite, je la devais à Rose. Elle m'avait empêché de tomber en me racontant toutes sortes de choses.

Je me posai sur une pierre, les jambes flageolantes, et regardai le paysage. C'était aussi beau que près de la cascade. Ici, nous surplombions la forêt et c'était plat, dépourvu d'arbres. Le sol était de sable, mais il était rouge brillant, comme de minuscules rubis. En gros, nous étions dans un désert, compris-je en remarquant qu'il faisait particulièrement chaud.

Je me tournai vers Rose. Elle souffla sur les mèches de cheveux qui tombaient sur son visage et appela Trù.

- Il nous faut décoller.

- Laisse-moi au moins deux minutes pour me remettre ! protestai-je.

- Désolée, Éthéas, mais nous n'en avons absolument pas le temps.

Elle monta sur le dos de Trù et s'accrocha à sa douce fourrure.

- Monte, m'ordonna-t-elle.

Je soupirai.

- A moins que tu ne préfères mourir de chaud ? demanda-t-elle avec un petit sourire en coin, connaissant déjà ma réponse.

- J'arrive, j'arrive !

J'escaladai Trù avec difficulté ; mes jambes tremblaient encore. Rose se tourna vers moi et m'aida à me stabiliser. Elle affichait un sourire satisfait ; pour une fois, je l'avais écoutée. Cette fille savait se faire obéir !

Une fois que je fus bien installé, Rose me dit de s'accrocher à elle. Je nouai mes bras autour d'elle d'un geste hésitant.

- Prêts ? demanda Rose.

Trù émit un drôle de couinement, l'air pressé de décoller. Il était vrai que porter cette fourrure par cette chaleur... Le pauvre !

- Éthéas ?

Je m'aperçus que je n'avais pas répondu.

- Non, je ne suis pas prêt. Mais on y va, soupirai-je.

Je dus prendre sur moi pour ne pas paniquer. Lorsque Trù décolla, un cri quitta ma bouche, malgré moi, et Rose émit un petit rire amusé. Vexé, je me penchai vers elle.

- J'ai le vertige, je te rappelle !

Ce qui la fit taire. Quelques minutes plus tard, alors que nous volions dans les nuages et que je me concentrai pour na pas regarder en bas, elle murmura :

- Excuse-moi.

Je me persuadai d'avoir rêvé. Rose n'allait pas s'excuser de s'être moquée de moi, sûrement pas ! Ou...peut-être que si ? Je me souvins qu'elle m'avait aidé à dépasser ma peur, pendant cette petite séance d'escalade.

- Excuse-moi, répéta-t-elle, plus fort.

Là, je sus que je n'avais pas rêvé.

- Ce n'est pas grave. Je sais que c'est ridicule...

- Mais non ! s'exclama-t-elle. Ce n'est absolument pas ridicule, Éthéas ! Tout le monde a peur de quelque chose, et c'est normal ! Toi, c'est le vide, et moi c'est...

Elle se tut.

- C'est quoi ? l'encourageai-je doucement à poursuivre.

- Je...je ne suis pas prête à te le dire.

Je retins à grand peine un grognement de frustration. Heureusement, cette conversation m'empêchait de penser au vide autour de moi, ce qui n'était pas plus mal. Malheureusement...la conversation venait de prendre fin.

Je me cramponnai à Rose comme à une bouée de sauvetage, si fort que je craignis pendant un court instant de lui laisser des marques. Mais elle ne dit rien. Alors je fermai les yeux pour tenter de me concentrer sur autre chose.

Quelques heures plus tard, j'entendis une voix lointaine crier.

- Éthéas !

J'ouvris les yeux.

- Regarde ! me dit Rose.

Que voulait-elle donc me montrer ? Elle tendit un doigt vers le sol et je sursautai sur le dos de Trù.

- J'ai le vertige, Rose ! Je ne vais pas regarder vers le bas, tu es folle !

Je ne voyais pas son visage mais je l'imaginai très bien lever les yeux au ciel.

- Je le sais parfaitement, idiot ! Tu es accroché à moi comme un koala depuis tout à l'heure ! Tu penses vraiment que je te demanderais de regarder en bas si je ne savais pas ce que je faisais ?

Je déglutis.

- Non, peut-être pas...

- Bon. Alors regarde !

Après avoir peser le pour et le contre, je me penchai légèrement sur le côté pour voir en bas.

Et ce que je vis me stupéfia.

Le Monde Interdit T1 [EN RÉÉCRITURE]Where stories live. Discover now