Chapitre 28​

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Il ne se passa rien. Rien du tout.

Rose m'adressa un sourire lumineux et me pressa l'épaule, sans un mot. Je n'en avais pas besoin. Elle était heureuse que mon idée ait fonctionné.

J'élargis encore un peu plus l'espace entre les miroirs, pour créer une ouverture plus large, afin de nous permettre de rentrer à l'intérieur du dôme plus facilement.

- J'ai toujours rêvé de voir la capitale, Éthéas, si tu savais...

- N'oublie pas que nous avons une mission, lui rappelai-je gentiment.

Elle se renfrogna.

- Je ne risque pas de l'oublier...

Moi non plus, je ne risquai pas.

- Tu veux passer en premier ou en deuxième ? me demanda-t-elle.

- Je vais passer en premier, décidai-je. Étant donné que je ne suis qu'un bouclier, pour toi...

Rose ouvrit la bouche et sembla chercher ses mots. Eh bien ! C'était une première ! Je lui avais enfin cloué le bec !

- Je serai donc la deuxième.

Au moment où je posai mon pied dans l'étroite ouverture, Rose murmura :

- Sois prudent.

Je souris et ris doucement.

- Que veux-tu qu'il m'arrive ?

Je franchis l'ouverture avant qu'elle ne puisse me répondre et arrivai de l'autre côté. Je vis Rose à travers le dôme. Elle était bizarrement déformée.

- C'est bon, tu peux venir ! lançai-je. Je n'ai rien, tu vois ?

Elle inspira, et rentra à l'intérieur du dôme. Arrivée près de moi, elle chancela, et je la retins par le bras.

- Ça ne va pas ? m'enquis-je.

Elle avait le teint verdâtre, plus que d'habitude.

- Je... Si, tout va bien, me contredit-elle.

Je m'agenouillai et récupérai les miroirs, afin de ne pas laisser une trace de notre présence.

- Tu ne sens pas ? demanda Rose, qui semblait bizarrement déconnectée de la réalité.

Je remis les miroirs dans son sac et la secouai.

- Rose ! Nous avons une mission, rappelle-toi !

Je sentais qu'elle était loin, loin, loin... Il fallait que je la ramène, et très vite.

- La mission... Rose !

Je la secouai plus fort, mais il n'y avait vraiment rien à faire. Alors je l'attrapai par le bras et commençai à marcher. Mais une voix derrière moi me fit me retourner presque aussitôt :

- Que fait-on ?

- Il faut trouver la Prophétie, tu te souviens ?

Elle secoua la tête.

- Non, je...

Elle se prit la tête entre les mains, comme prise d'un affreux mal de crâne.

- Qu'est-ce que tu as ?

Panique, panique, panique... Le sang battait à mes tempes. Avais-je perdu Rose ? 

Ce fut là que je compris à quel point elle était importante pour moi. Elle avait une place dans mon cœur. Je l'appréciais autant qu'elle m'agaçait. Mais ma Rose n'était plus là, et j'avais le cœur en panique. Alors je me forçai à inspirer et à expirer plusieurs fois calment. J'allai trouver une solution. Il le fallait.

- J'ai mal, j'ai mal, j'ai mal, j'ai mal..., marmonna-t-elle, sa voix de plus en plus faible.

- Ça va aller, je te le promets. Il faut juste qu'on aille jusqu'au château et voler cette Prophétie au roi, tu te souviens ? Rose !

- Pourquoi...tu veux...voler le roi ?

- C'est le plan ! répliquai-je.

Panique, panique, panique.

PANIQUE ! PANIQUE ! PANIQUE !

- Rose lève-toi, la suppliai-je. Il faut qu'on y aille.

- Pourquoi voler le roi ? Il est...il est...gentil.

Les yeux de Rose devinrent noirs. Je ne savais pas quoi faire, complètement paniqué. Soudain, une voix résonna dans mon esprit :

- Éthéas !

- Rose ? lui répondis-je en pensée.

Je baissai les yeux sur Rose.

- Pas elle ! fit la voix de mon esprit.

- Comment ça ?

- Ne l'écoute pas ! Prends là et dépêche-toi de trouver la Prophétie !

- Que se passe-t-il ?

- Le dôme m'affaiblit, comme il affaiblit tous les autres ! Voilà comment le roi maintient la population !

Je frissonnai.

- Rose ?

Mais la Rose de mon esprit n'était plus là. Je baissai les yeux sur son corps et songeai que Rose se battait contre quelque chose de puissant, et je ne pouvais pas l'aider.

- On va réussir, Rose, lui transmis-je.

Elle ne répondit pas, mais je savais qu'elle m'avait entendu. Elle était sans doute trop faible pour me répondre.

Je m'approchai lentement de son corps. Elle continuait de marmonner combien le roi était gentil, généreux, qu'elle ferait absolument tout pour lui...

Ça me dégoûta. Rose ne voudrait jamais dire ces choses-là !

- Je suis désolé, Rose, marmonnai-je.

Je lui donnai un grand coup à la tête. Et elle s'évanouit sur le sol.


Le Monde Interdit T1 [EN RÉÉCRITURE]Where stories live. Discover now