Chapitre 39

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Le lendemain, lorsque je me levai, je vis que seul Luzraël était débout. Trù et Rose dormaient à poings fermés. Génial ! J'allais devoir parler à la personne que je détestais le plus. J'eus soudain hâte...

Mais, impossible de faire mine de me rendormir, j'étais déjà debout. Feindre le somnambulisme ? Nan...ce n'était pas mon style. Je ne savais même pas comment faire. Et puis ils risquait de se moquer de moi ensuite. Non, il valait mieux que je l'affronte dès maintenant. Aller zou !

Je m'approchai de lui.

- Salut, lançai-je, feignant l'amabilité. Bien dormi ?

Il ne prit même pas la peine de me répondre. Je me penchai vers lui.

- Au fait, tu as dit que tu venais de Paris...

- Oui, c'est ça, grogna-t-il.

- Tu as perdu ton accent en chemin ?

Il me toisa.

- Tu ne comprends rien à rien, toi.

- Alors montre-moi la grandeur de ton savoir, ô grand Lulu, me moquai-je.

- Je te demande pardon ?

- Quoi ? demandai-je, sur le ton du parfait innocent.

Il serra les poings, et je vis sur son visage combien il avait envie de me frapper. Mais, étonnamment, il ne le fit pas.

- Répète ce que tu viens de dire, martela-t-il entre ses dents.

- J'ai dit "Quoi ?". Tout simplement.

S'il avait été une locomotive à vapeur, je pense que de ses oreilles serait sortie de la fumée, tant il se concentra pour ne pas s'énerver contre moi. Bon. Il fallait dire que je le cherchais un peu... Mais ce n'était que justice, après tout. N'est-ce pas ?

- Qu'as-tu dit avant le "quoi", Éthéas ?

- Eh bien... Je t'ai dit quelque chose comme "montre-moi ta grandeur, Lucifer", je crois.

- Tu m'as appelé Lulu.

Je fis mine de me mettre en colère.

- Si tu t'en souvenais, il ne fallait pas me demander. Ça m'aurait économisé de la salive, dis-je sèchement.

Le pauvre Lulu parut un court instant désarçonné. Puis il reprit son insupportable air supérieur et arrogant.

- Ne m'appelle plus jamais ainsi. Je ne suis pas un chien.

- Ah bon ? Tu y ressembles, pourtant.

- Tais-toi !

Je haussai les épaules.

- Si tu préfères éviter ce genre de remarques de ma part, Lulu, coupe-toi les cheveux. Là, tu ressembleras peut-être enfin à un homme.

- Tu ne perds rien pour attendre.

Je balayai ses mots d'un revers de main.

- Oui, oui... Toujours des menaces, Lulu. J'attends de voir le moment où tu agiras. Parce que sinon, c'est frustrant. J'aimerais m'amuser un peu, moi !

- Tu...

- Enfin, bref. Tu n'as pas répondu à ma question. Où est passé ton accent ?

Il hausse les épaules.

- En quoi ça te regarde, au juste ?

- En rien. Je me pose une question, c'est tout. Je n'ai pas forcément de raison.

Je voudrais simplement constituer un petit dossier sur toi, histoire de t'embêter un peu...

- Lorsque je suis arrivé ici, je l'ai perdu.

- C'est tout ?

- C'est tout.

- Tu es sûr ?

- Certain, s'agace-t-il. Qu'est-ce que tu veux ? Pourquoi tu me cherches ?

- Pour te trouver.

Je me levai et lui tournai le dos.

C'est officiel.

Je

Le

Hais.

Vraiment. Vraiment. Vraiment.

Je le hais.

JE LE HAIS.

Le Monde Interdit T1 [EN RÉÉCRITURE]Where stories live. Discover now