9. Gerald (part 2)

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 "I'd walk so far just to take the injury of finally knowing you."

Hozier, Unknown/Nth

« J'irais si loin juste pour me blesser de vraiment te connaitre. »


Novembre 2000, Florence.

Sans me laisser abattre, je m'assieds sur le tapis persan à ses pieds. Mes yeux l'évitent toujours mais le contact de son épaule contre la mienne me réconforte. Elle s'est elle aussi laissée glisser au sol.

— Tu aimerais qu'elle t'aime autant que toi tu l'aimes, commencé-je. Tu fais n'importe quoi pour qu'elle te remarque. L'indifférence de ton père, tu peux t'y faire, mais celle de ta mère...

Mes doigts dansent sur la soie du tissu. Graziella écoute mes paroles s'écouler dans le silence qui nous entoure. Nous savons tous les deux que ce que je dis ne s'arrêtent pas qu'à sa mère.

— Elle ne te montre de l'attention que pour te rappeler à l'ordre, et tu veux la faire réagir parce que c'est que quand elle te crie dessus que tu as l'impression de compter pour elle. Tu te dis qu'au moins, à défaut de t'aimer, elle ne t'ignore pas.

Elle pose sa tête sur mon épaule. Mes muscles se détendent. C'est là qu'est ma place, près d'elle.

— Ta mère t'aime Gee. En fait, elle est comme toi. Elle ne sait plus comment te le dire.

Après ça, je ne dis plus rien, elle non plus. Une fois qu'elle a accepté ce que je viens de dire, elles entoure mon visage de ses mains, m'autorisant à la regarder. Ses yeux sont rouges et mouillés, son mascara a teinté ses joues roses de gris et ses grands yeux bleus perdent les miens. Sans dire un mot, elle me regarde comme pour s'excuser. En silence, la même larme coule sur nos joues. Ses longs cils battent sans rythme pendant que je blâme mes paupières pour toutes les secondes que je perds à devoir les fermer. Ses doigts glissent de mes joues jusqu'à l'os de ma mâchoire, une lueur nostalgique apparaît dans son regard. Elle aimait m'embrasser là, avant...

J'avale un râle. Nancy. Je l'avais oubliée celle-là. Je dois trouver un moyen de quitter cette fille à mon retour.

— Ne pense pas à elle.

Sa plainte me ramène à elle, à son visage inquiet. Une mèche en tire-bouchon tombe devant ses si beaux yeux. L'occasion est trop belle pour ne pas la toucher. La mèche dorée reste coincée entre mes doigts pour que je puisse mieux l'admirer. Le contraste avec la peau diaphane de Graziella n'est pas aussi marqué qu'à l'époque de notre adolescence. Depuis que ses parents sont partis, Gee a perdu le goût des vacances et des sorties au soleil, perdant le ton doré que ses origines méditerranéennes lui prodiguaient.

— À notre retour, se résigne-t-elle, tout rentrera dans l'ordre. Pour l'instant, faisons comme si tu n'allais pas te marier avec une autre.

Je secoue la tête. Elle a dû imaginer que mon égarement était dû à Nancy mais non. Il n'y a qu'elle dans mon esprit, personne d'autre qu'elle, Nancy n'est qu'un bruit à côté de la mélodie que Graziella est pour moi.

— On fait semblant, ajoute-elle, comme d'habitude.

Quand j'ai découvert que mon père trompait ma mère, quand elle a découvert que sa mère était enceinte, quand j'ai appris que mon père était un sacré connard, quand nous sommes devenus chacun notre tour des criminels. Je repense à ce tatouage que je me suis fait en son honneur. GG. Quand nous étions encore G&G la vie était plus simple, nous n'avions qu'à faire semblant. Semblant de ne pas souffrir, semblant de ne pas se haïr, semblant de ne pas s'aimer.

Because of us ( TERMINÉE )Donde viven las historias. Descúbrelo ahora