Chapitre 27

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Le comportement du personnel est étrange, aujourd'hui, et Joseph n'est pas encore là pour m'informer de ce qui se passe. Je pourrais ravaler ma fierté et demander à quelqu'un d'autre, mais je ne suis pas désespérée à ce point. Quand la banque ouvre et que les clients arrivent, les chahuts persistent et mon intérêt grandi.

Mine de rien, j'écoute les brides de conversation que je peux saisir, les échos me laissent perplexe, ce que je perçois ne présage rien de bon, mais je refuse de donner plus de pouvoir à ma psychose personnelle. Non, je ne dois pas imaginer des choses et les assimiler avant d'être certaine que ...

« On ne peut plus faire confiance à personne... »

« Ces pauvres enfants... »

« Ne sont-ils pas censés les protéger et leurs offrir une vie meilleure... »

Mon rythme cardiaque accélère sans attendre, mes gestes deviennent maladroits, mon corps réagit face à ce que ma tête essaye de lui faire croire. Je n'aime vraiment pas ça. Je devrais poser des questions à la pause, vérifier que la tension dans l'air n'est rien d'autre qu'une sorte de paranoïa personnelle. Je peux très bien voir ma petite sœur quand je vais mal, il est tout à fait possible que mon inconscient me fasse entendre des choses... Oh seigneur, ça n'a ni queue ni tête.

J'ai beau me dire que je me fais des idées, l'effroi des clients est bien présent, mon téléphone personnel vibre dans ma poche et je sursaute, c'est étrange, Alex ne m'appelle jamais au travail, ou alors sur la ligne fixe... Mon cœur rate un battement lorsque je vois l'identifiant : « Marcus-hôpital »

- Allô ? me hâté-je de répondre.

- Bonjour, c'est Julie, réceptionniste du centre hô...

- Oui, je sais ! la coupé-je trop excitée pour écouter la fin de sa présentation, un souffle à l'autre bout du téléphone m'annonce qu'elle ne le prend pas mal, elle pouffe de rire face à mon impolitesse.

- Je me permets de vous appeler parce que monsieur...

- Il veut me voir ? couiné-je, me fichant bien du regard réprobateur de mes collègues.

- Effectivement, répond Julie avec le sourire dans sa voix.

- Merci... Merci infiniment, je serais là comme à mon habitude, sauf qu'aujourd'hui, je pourrais le voir, récité-je inutilement.

Ma bonne humeur n'a jamais été aussi grande et plus aucun chuchotement ne me dérange, je souris, contente de pouvoir revoir enfin Marcus. J'imagine tout ce que je vais lui dire... Est-ce qu'il a changé ? Est-ce qu'il a la même odeur ? Comment réagira-t-il en me voyant... ça fait si longtemps... Rien ne pourra perturber ma joie, pas même les regards perplexes des clients.

À la pause, je prends ma place habituelle, papote avec un collègue du service des crédits, et quand la chef passe, j'ai droit à un grand sourire de satisfaction de sa part. Oui, ma vieille, je sais sourire... Quand joseph vient à ma table, hésitant, je me promets d'être plus gentille avec lui et lui propose de s'asseoir... Il est presque bouche bée, car oui, c'est la première fois que je l'invite à prendre place.

- Il y a quelque chose de différent chez toi, constate-il en déballant son sandwich.

- C'est à croire que personne ne m'a jamais vu heureuse, ici ! me plains-je faussement.

Joseph reste silencieux, mal à l'aise. C'est à croire que personne ne m'a jamais vu de bonne humeur, ici... Sans commentaire.

- C'est magnifique à voir, en tout cas, me complimente-t-il en rougissant un peu.

Rancoeur du passéWhere stories live. Discover now