Chapitre 29 - Marcus

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La nuit est éclairée, il n'y a pas autant de monde que je l'imaginais. Peut-être est-ce dû au froid. En sécurité derrière la vitre du véhicule, j'ose observer tout ce qui défile sous mes yeux. Durant une seconde, je me demande s'il me serait possible de demander au chauffeur d'arrêter la voiture afin que je puisse marcher... rapidement, cette idée me tétanise.

Je ne suis décidément pas près. C'est décevant, je fais tant d'effort pour aller mieux, malheureusement, la perspective de vivre pleinement comme les autres me sera à jamais impossible. Je m'en fiche, je peux vivre avec, tant que Lyse est auprès de moi. Quoi que, cela voudrait dire qu'elle sera condamnée à l'isolement, et je ne suis pas certain qu'elle puisse être heureuse de cette manière.

Les immeubles défilent, mes pensées partent dans tous les sens, et mon ventre se noue à l'idée de la revoir. J'imagine sa colère, sa déception, mais je dois lui expliquer que je fais tout ça pour elle... je refuse qu'elle m'en veuille. La voiture ralentit, se gare, mon cœur se resserre douloureusement, l'appréhension est insoutenable. Et contradictoirement, l'excitation est à son a apogée.

Rapidement, je me faufile dans l'immeuble, le froid est vraiment insoutenable. Je monte les marches, car attendre l'ascenseur m'est impossible, et puis, je gagne un peu de temps pour réfléchir encore un peu... trouver les mots juste lorsque je serais en face de Lyse, et surtout, ne pas me laisser aller au bonheur de la revoir pour oublier tout le reste.

Ma cure n'est pas terminée, tout comme notre vengeance.

Je suis devant sa porte, le souffle court, les idées en vrilles, le cœur tellement heureux, mais l'esprit en garde... et je frappe... Attends... Rien... Je frappe encore. Lyse n'ouvre pas. Peut-être qu'elle ne le peut pas ? Peut-être qu'elle est malade ? Souffrante ? Envahie par un passé capable de faire saigner de douleur... paniqué par mes propres songes, je tente d'entrer, pousse sur la porte, et lorsqu'elle s'ouvre enfin, je manque de tomber.

Lyse est sous le choc, et moi aussi. Elle ne porte qu'une fine nuisette, j'avoue ne pas pouvoir en ôter les yeux, et durant une seconde, je m'imagine ce qu'elle porte en dessous. Elle est si belle. Je souris, ressent cette chaleur m'envahir alors que mes pensées s'éparpillent, retournent dans une chambre d'hôtel où il n'y avait rien pour nous séparer.

Je dois me reprendre, ma présence ici est momentanée, et lorsque mon regard croise le sien, le froid revient. Je déteste le froid. Je me suis perdu durant une seconde, espérant que la dure réalité n'existe pas, mais la colère de Lyse me rappelle combien je suis dans le pétrin... le déni ne m'aidera pas cette fois.

Elle m'en veut.

Elle est fâchée.

Elle me déteste...

- Lyse, tu ... tu m'as manqué, soufflé-je, ému.

Rien.

Lyse ne répond pas.

Elle ne réagit pas d'ailleurs, les secondes défilent, et nous nous dévisageons. Je me sens si petit face à sa froideur, je me sens coupable, honteux. Lentement, et sans me quitter des yeux, Lyse tourne les talons pour disparaître dans sa chambre. La douleur dans ma poitrine s'étend dans mon ventre, mes bras, mes jambes qui ne semblent plus pouvoir porter mon poids. Elle me déteste... Je ne peux pas la laisser faire.

Je pénètre l'appartement, ferme la porte et enlève ma veste tout en cherchant une cohérence dans mes pensées tordues.  Désemparé, je la poursuis dans sa chambre sans prendre la peine de frapper. Lyse est simplement assise sur son lit, elle a noué sa robe de chambre, fixe ses doigts pour calmer la peine que je lui inspire. Me suis-je un jour autant détesté qu'en ce moment ? Certainement, j'ai de dois culpabiliser pour deux vies, mais la perspective d'être le coupable de son chagrin ne fait qu'accroitre la haine que je me porte.

Rancoeur du passéWhere stories live. Discover now