Prologue

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Le 10 janvier 2010 dans le milieu de l'après-midi, mes parents ont une violente dispute et mon père a quitté ma mère. Puisqu'à cette époque-là, je n'avais que sept ans, on ne m'a pas vraiment expliqué les raisons de cette séparation.

C'est mon grand frère, Émile, qui m'a appris quelques mois plus tard, lors d'une de nos journées retrouvailles, que notre mère avait trompé papa et qu'après trois ans à fermer les yeux sur ses agissements, ce dernier avait ressenti le besoin d'arrêter toute cette comédie et avait souhaité divorcer.

Mais parce que dans la famille, tout avait toujours fonctionné par paire, mon frère est parti vivre avec notre père et moi j'ai dû suivre ma mère. De mes sept ans à mes dix ans, je suis restée en contact avec l'autre moitié de ma fratrie. On venait souvent me chercher et je passais les vacances à la ferme que notre père avait récupérée de ses parents...

Malheureusement, le jour de mes onze ans, ma mère m'a annoncé qu'elle avait rencontré un homme sur le net, qu'elle comptait refaire sa vie avec et que l'on quittait donc Tours, que l'on avait intégrée pour ne pas être trop loin de Poitiers, ville voisine du village dans lequel résidaient mon père et mon frère, pour Paris.

Durant plus de trois ans, j'ai peiné à me faire à la capitale. J'avais grandi à la campagne. Je ne connaissais que l'odeur du foin, du purin et désormais seule celle des pots d'échappement et des crachas des usines emplissait mes narines. Pourtant, j'ai fini par m'habituer à ce monde totalement différent. Et parce que Bertrand, le nouveau compagnon de ma mère, avait un travail qui payait (avocat), je n'ai manqué de rien. J'ai même pu suivre des cours de théâtre, mon plus grand rêve depuis que j'avais six ans.

Seulement l'année de mes quatorze ans, j'ai eu un petit frère, Kyle.

Je suis alors soudainement devenue le vieux jouet que l'on range dans le coffre et que l'on ne ressort plus parce qu'on l'a tout bonnement oublié.

Entre nous, je n'ai jamais été vraiment jalouse. J'ai toujours accepté de prêter mes jouets. Je n'ai jamais dit à un de mes parents qu'ils préféraient Émile à moi. Je n'ai jamais souhaité être la chouchoute du professeur ou bien d'autres choses. Mais quand après avoir répété dix fois que la réunion parents-profs était prévue dans deux jours, je me suis retrouvée seule dans le couloir à attendre le fameux rendez-vous, j'ai compris que je ne pourrais plus jamais obtenir ne serait-ce que deux minutes d'attention.

C'est à partir de ce moment-là que je suis rentrée en rébellion. J'en voulais à la Terre entière, en plus de considérer mon beau-père, mon petit frère et ma mère comme mes ennemis numéro un. Alors durant plus de dix mois, j'ai été détestable. Mes notes sont devenues déplorables, mes fréquentations ont été mauvaises et je me suis transformée en ma version démoniaque.

Secrètement, j'espérais pouvoir attirer l'attention, rappeler à ma mère que j'existais et que même si je n'avais plus cinq mois, j'avais encore besoin d'elle, ne serait-ce que pour rencontrer mon professeur qui voulait parler de mon avenir.

Mais au final, la seule chose que j'ai obtenue a été de me faire disputer encore et encore.

Alors lors d'une énième engueulade, j'ai dit que je voulais aller vivre avec mon père et Émile. Je ne le pensais qu'à moitié. Même s'ils m'avaient manqués, nous n'étions plus en contact et bien que cela me coûtait de le reconnaître, je m'étais attachée à ma nouvelle vie. Seulement ma mère m'a prise au mot. Je dirais même que mon annonce l'a délivrée d'un poids.

Le jour-même, elle a contacté son ex-mari.

Une semaine plus tard, on parlait déjà de mon déménagement.

Et à peine un mois après, j'avais dit adieu à Paris, mes amis et ma maison.

Je suis arrivée à la ferme de mon père au début des grandes vacances. Mon frère, qui était mon aîné de quatre ans, avait énormément changé. Il avait fini le lycée et aidait notre paternel quand il ne bossait pas au garage d'un ami.

Même si j'ai mis quelque temps avant de me réhabituer à la campagne, ses odeurs, son absence de métro et de magasins, à la fin de l'été, j'étais plus ou moins redevenue la Madeleine d'avant. À un ou deux détails près comme ma moche-mère et ma moche-sœur...

Puis le jour de ma rentrée au lycée Montentrin est arrivé.

C'était le lycée de référence de ma famille et ce, depuis des générations. Ma grand-mère, mon père et Émile avaient suivi leur éducation là-bas. J'étais tellement angoissée à l'idée de devoir intégrer une classe dans laquelle je ne connaîtrais personne que j'ai dû vomir au moins deux fois avant de monter dans la voiture de mon frère.

Au final, mon cours de théâtre a été le premier point positif que j'ai trouvé à l'établissement. D'ailleurs, j'ai fini par lui en trouver un autre : il était plus petit que ceux que j'avais fréquentés à Paris avec ses mille six-cents lycéens. Il y avait par conséquent moins de monde et les mentalités étaient un peu différentes. Évidemment, il y avait tout de même des élèves à éviter, mais en général, c'était plutôt calme et agréable.

Seulement parce que le roi des emmerdes avait dû trouver ma vie trop calme, j'ai dû affronter un dragon siliconé...

En effet, en un claquement de doigt, Angelina la voleuse s'est ajoutée à la liste de mes indésirables. Si je la surnomme ainsi, c'est parce qu'elle m'a volé mon père, ou du moins le cœur de mon père, en octobre dernier en venant vivre à la ferme. Comme si devoir supporter le fait qu'elle vienne le voir une fois par semaine n'était pas déjà suffisant...

Mais parce que je savais que les remariages (chose qui n'est pas encore arrivée Dieu merci !) et toutes ces choses étaient plus que négatifs pour les enfants, j'ai commencé à rentrer en guerre avec mon ennemie. Ou peut-être devrais plutôt dire « mes ennemies » puisque la Sacha, cette sorcière rousse qui fait tourner en bourrique mon frère, était aussi comprise dans le lot.

Au final, seuls ma meilleure amie Mélissa ainsi que le lycée étaient mes alliés et je gérais. Ma routine me plaisait. Mais ça, c'était avant que je ne le rencontre...

Près de toi 1 - Madeleine Petit (Terminée)Where stories live. Discover now