47. Mode déprime activé

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Certains restent dans leur lit pour décuver d'une fiesta trop arrosée. D'autres, uniquement car ils sont encore fatigués ou n'ont pas envie d'affronter le monde extérieur.

Pour ma part, c'est parce qu'aujourd'hui, j'en veux au Bon Dieu d'être si cruel. J'en veux à ma génitrice d'être celle qu'elle est et d'être encore malgré tout dans mon esprit. J'en veux à Mélissa de ne pas être là pendant ce passage si difficile. J'en veux à Gontran de ne pas m'avoir parlé de ses problèmes de santé. Et surtout, je m'en veux à moi-même de l'avoir mis en danger.

— Madeleine ?

La voix de mon frère, qui comme d'habitude s'est invité dans ma chambre, rompt le silence. Dans un soupir, je sors la tête de sous ma couette. Les cheveux en bataille et les yeux me brûlant, je lui envoie un regard noir espérant que ça le fasse déguerpir. Mais il s'avère que c'est un échec.

Émile est du genre suicidaire. Comme Gontran en fait. Putain, je suis vraiment entourée de suicidaires moi !

— Quoi ? rouspété-je.

— Chocolat chaud bien sucré, croissants qui viennent tout juste de la boulangerie, et pot de nutella pas encore entamé. Où dois-je mettre cela, princesse Madeleine ?

Il m'offre son plus beau sourire tandis qu'il attend comme un imbécile en tenant le plateau.

— C'est papa qui t'envoie, c'est ça ?

— Non, soupire-t-il en posant finalement mon petit-déjeuner sur le meuble en bois. C'est moi. Parce que j'en ai ras-le-cul de faire le boulot du samedi tout seul.

C'est vrai qu'il est pratiquement onze heures et que comme d'habitude, je me suis réveillée aux aurores. Faire la grasse matinée avec un coq qui s'entraîne pour The Voice, c'est impossible. Seulement pour une fois, je suis restée dans ma chambre.

— J'ai pas faim.

Émile me regarde en haussant un sourcil.

— Eh oh, sœurette. J'ai dit nutella ! s'exclame-t-il en secouant la tête, presque indigné.

Mon cœur est lourd. Même l'odeur ne me donne pas envie.

— Bon, souffle mon frère en s'asseyant sur mon lit. Tu veux en parler ?

Et voilà que les larmes reviennent.

J'ai passé une bonne partie de la nuit à pleurer, blottie contre le sweat-shirt de Gontran. Sentir son parfum, c'était aussi douloureux que réconfortant. Puis parce que j'ai ressenti le besoin d'être au chaud, j'ai fini par enfiler le vêtement.

Je ne prévois plus de le retirer. Je vais le garder avec moi toute ma vie.

— Non, pas envie.

Émile essaie de retenir son soupir. En vain.

— Tu ne devrais pas te fermer au dialogue Madeleine.

Mon regard devient encore plus noir que précédemment. Il ne comprend vraiment rien à rien.

— Tu crois vraiment que c'est ça le problème ? m'emporté-je. Gontran est à l'hôpital car il a fait une syncope, mais ça aurait très bien pu être un arrêt cardiaque ! Parce que cet idiot ne m'a pas dit qu'il était malade, et moi je l'ai fait courir. Il aurait pu mourir par ma faute. Je suis néfaste pour lui. Je ne dois plus jamais le revoir.

— T'arrête avec tes conneries oui ? Le sport n'est pas interdit pour les personnes cardiaques. Enfin je ne crois pas, souffle Émile soudainement pensif. Puis pourquoi tu ne devrais plus le revoir ? C'est ridicule. D'après ce qu'a dit papa, il a ça de naissance. Pas à cause de toi. Tu mélanges tout.

Près de toi 1 - Madeleine Petit (Terminée)Where stories live. Discover now