38. Danser un slow au milieu de sauvages

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Avez-vous déjà vécu un cauchemar éveillé ? Je ne parle pas de malchance ou quoi que ce soit. Non, je fais référence à ce moment où vous avez l'impression que tout le monde vous regarde, que le visage des gens devient subitement monstrueux et qu'ils vous montrent du doigts en se moquant de votre malheur.

Je sais au fond de moi que tout se passe dans ma tête mais cela n'empêche pas à mon ego d'être touché et à ma tension de grimper en flèche.

Au départ, en tournant les talons, je voulais aller me cacher. Puis j'ai aperçu le chieur et la colère que je ressentais envers Jocelyn m'a poussée à aller le voir. Parfois, les émotions peuvent vous amener à faire des choses complètement absurdes...

— Comment on dit « T'es un connard » en allemand ? lui demandé-je aussitôt arrivée face à lui.

— Merci toi aussi. C'est cool ce soir n'est-ce pas ? ironise-t-il face à mon manque de politesse.

— Allez bon sang, abrège !

— D'accord d'accord. C'est... euh... « du bist ein arschloch ».

O.K., retiens bien Madeleine parce que tu vas envoyer du lourd.

Sans un mot de plus, je reviens sur mes pas. Je galère un peu à traverser à nouveau la foule. Je reçois même un coup de coude dans l'omoplate. Mais je garde mon objectif en tête. Jocelyn en ligne de tir, je marche jusqu'à lui. Sa copine qui se tient toujours à ses côtés, est en train de l'embrasser sur la joue.

Tu vas voir un peu si tu vas le coller longtemps !

— Ça va ? T'es partie d'un coup, on n'a pas compris, ose dire mon ancien crush.

Son sourire de chaton ne m'aura pas.

— Dou...

Merde, c'est quoi déjà qu'il m'a dit le chieur. Merde ! Ah ça y est, ça me revient...

— Dou un briste ! m'écrié-je en serrant les poings.

Jocelyn fronce les sourcils. Il a l'air choqué. Pour ma part, je ne m'embête même pas à regarder sa fée. Elle doit être en train de comprendre que son mec est un abruti.

Après un grand soupir, je me barre. Je n'ai pas envie d'être au milieu de leur dispute de couple. J'espère juste qu'ils rompront.

Quelques secondes plus tard, coincée au milieu des sauvages qui peuplent la piste de danse, je m'énerve. Personne ne me laisse passer bon sang ! Et tandis que j'insulte un pote aux sportifs, je sens ma gorge se resserrer. Un trou immense se creuse dans mon estomac et mes larmes roulent soudainement sur mes joues.

Oh non. Pas ça !

J'ai horreur de pleurer devant les gens. J'ai toujours trouvé cela humiliant. Et si devant ma famille, ça peut plus ou moins passer, devant les élèves de mon lycée, c'est la loose.

Quand je parviens enfin à sortir de la vague mouvementée, je fonce direct vers les toilettes. Sauf qu'une fois arrivée à destination, je réalise qu'une file de filles attend devant les chiottes. Je comprends donc que ce n'est pas le meilleur endroit pour pleurer. Frustrée et encore plus chialeuse, je retourne sur mes pas et cogne la tête la première dans quelqu'un. C'est l'effet boomerang, je suis repoussée en arrière mais des bras s'enroulent soudainement autour de mes épaules et me ramènent contre ce buste inconnu.

— C'est rien, ça va aller, souffle une voix que je reconnais aussitôt.

Le chieur.

Je suis tellement brisée que je n'ai même pas la force de le repousser. Le visage enfui contre son tee-shirt, je pleure toutes les larmes de mon corps. Ça fait mal. Si mal. Chaque fois que je voyais Jocelyn, mes journées étaient illuminées et en une simple phrase, il a réussi à me faire tomber dans un monde sans couleur, un monde froid et détestable.

Près de toi 1 - Madeleine Petit (Terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant