'' Je l'ai tué ''

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Les représentations s'enchaînaient au fil des semaines, mais le public n'était plus au rendez-vous. Le jeune Dandy était toujours aussi investi, quoique plus distant depuis notre dernière discussion. Il présentait les numéros, attendait la fin de la journée, et partait sans prévenir quiconque. Son comportement réjouissait Jimmy, tandis qu'il me perturbait.
Comme à notre habitude, nous nous préparions à entrer en scène, mais Dandy manquait à l'appel. Nous avons retarder au maximum le début du spectacle, mais il ne se présenta pas, et nous ne pouvions faire attendre nos quelques spectateurs plus longtemps. Le jeune garçon est passionné par son rôle dans la troupe, alors pourquoi être absent aujourd'hui ? Cette question ne m'a pas quitter de la journée, et je n'étais pas la seule à être inquiète. Les siamoises me questionnèrent plusieurs fois, mais je n'en savais pas plus qu'elles. Même Elsa paraissait soucieuse.
Ce n'est qu'au couché du soleil que nous vîmes arriver Dandy, au loin. Il ne portait pas son costume habituel, mais seulement un t-shirt blanc et son pantalon rayé. C'est quand il s'approcha de nous, les cheveux en bataille, le blanc immaculé de son haut teinté de sang et les pieds nus, que nous avons compris qu'il s'était passé quelque chose de grave.

Dandy ne dit pas un mot. Il était sous le choc, et ne nous regardait même pas. Il déglutit bruyamment avant de relever sa tête. Il avait l'air perdu.
Je m'approchais de lui doucement, et lui posa la main sur son épaule :
- Qu'est ce qui s'est passé ?
- Elle ne voulait plus que je revienne, dit-il en fuyant nos regards. Mère ne voulait plus que je revienne, parce que vous êtes des monstres.
Il me regarda dans les yeux, puis lâcha :
- Je l'ai tué.
J'étais désemparée. Que répondre à ça ? Ni '' tu es un meurtrier '' ni '' viens dans mes bras, pauvre petit '' ne semblaient correspondre à la situation. Alors, que dit-on dans ces moments-là ? Même Jimmy ne disait rien.
Elsa brisa le silence.
- Il est l'un des nôtres. Nous ne le laisserons pas seul.
Elsa me fixait. J'étais, moi aussi, arrivée un beau jour au cirque couverte de sang et désemparée. La différence étant que je n'avais tuer personne, mais ça, ils n'en sont pas convaincus.
- Alors, sérieusement ? Lança Jimmy. Et puis quoi encore ? Je vais devoir partager ma tente avec le petit nouveau ? Ne comptez pas sur moi, dit-il avec un regard dédaigneux.
- Laisse-le, Jim. Il est sous le choc, lui dis-je.
En me tournant vers Dandy, j'ajoutais :
- On va te couvrir.

Je pris Dandy par les épaules et l'accompagna jusqu'à ma chambre. Armée d'un seau d'eau et d'une éponge, je commença à le débarbouiller le plus doucement possible. Il ne réagissait toujours pas à mes paroles. J'essuyais le sang sur son torse quand je m'apperçu d'une sorte de cicatrice courbée. Il en possédait plusieurs sur les bras également, et dans le dos. Je lui enlevais donc son haut, en me rendant compte qu'il était criblé de légères entailles, sûrement vieilles de plusieurs années.
- Dandy, qu'est ce que...
- Mon père.
Je lui ai poser milles questions, mais c'est les derniers mots qu'il m'ai dit de la journée. Je le fis dormir dans mon lit, et m'installa au sol. J'ai l'impression de ne rien connaître de toi.
Mais qui es-tu, Dandy Mott ?

Angelorum resonareWhere stories live. Discover now