Angelorum resonare

26 juin 1964

Oliver se dirigea rapidement vers moi et me prit par le bras :

- Dépêche-toi, on y va. Ma voiture est garée devant, nous n'avons pas beaucoup de temps, dit-il en m'entrainant avec lui.
- Mais lâchez-moi, vous êtes malade ! Je ne vous connais même pas, je ne vais pas partir avec vous, dis-je en croisant les bras. Et puis d'abord, je ne pars pas sans Kit.

Celui-ci nous observait de loin et me lançait des regards supplicateurs. Oliver leva les yeux au ciel.

- Je n'ai pas le choix, c'est maintenant ou jamais Manon.

Kit s'approcha et ajouta :

- Je pourrais aussi vous dénoncer, sinon.

Oliver le regarda avec mépris puis se tourna vers moi :

- Non, nous nous ferions remarquer. Nous reviendrons te chercher, Kit, dit Oliver en se tournant à nouveau vers le garçon. Si je ne reviens pas, tu auras tout le loisir de me dénoncer.

Kit semblait accepter l'idée.

- Je ne peux pas partir, murmurais-je.
- Manon ! On a pas le temps de bavarder, me pressa le psychiatre.
- Mon médaillon... C'est Jude qui l'a.

Oliver me lâcha le bras et réfléchi. Il savait tout comme moi que je ne pouvais pas laisser le médaillon ici. Il passa sa main dans ses cheveux, rajusta ses lunettes et quitta la pièce en me lançant un regard noir.

- Merde, dit Kit. Il a l'air vachement en colère. Tu crois qu'il reviendra ?
- Il va revenir, j'en suis sûre, répondis-je à Kit.
- Et c'est quoi cette histoire de médaillon ?

Je me mis à fixer le jeune homme. Une idée me vint à l'esprit.

- Mais c'est totalement fou, cria Kit.
- Eh, chut, chut ! Attire pas les gardiens, s'il-te-plaît.

Kit était en totale panique. Il s'asseyait dans le fauteuil de la grande salle tout en se tenant la tête avec les mains.

- Et tout ça pour un médaillon ?
- Si tu veux sortir d'ici, tu dois m'écouter, dis-je. Je vais tenir au courant le docteur Thredson de notre plan la prochaine fois que je le vois. Dès qu'on a le médaillon, on se sauve, ok ?
- Quel plan ?

Un homme assez âgé venait d'écouter notre discussion.

- Un plan pour invoquer le chupacabra. Docteur Arden, elle est totalement folle, dit Kit. Faut pas faire attention.

Je n'avais jamais vu Kit aussi sérieux et convaincant. Le médecin s'écarta aussitôt et sorti de la pièce sans se retourner.
Kit se tourna vers moi :

- Et tu me promets d'attendre que je revienne ?
- Oui, c'est promis, lui dis-je en lui prenant la main.

Cette nuit-là, j'eus du mal à dormir. Je fis de nombreux cauchemars, dont un nouveau. Je me réveillais en sursaut et totalement en sueur. J'avais l'impression que la température était montée à 40°C dans la pièce. Pourtant, tout était normal. Mais cette chaleur m'etouffait. Dans mon songe, j'avais vu un bébé. Un bébé arraché à sa mère et enlevé. J'avais aussi vu un homme de dos, et une explosion. L'homme avait une cape rouge et noire et observait l'explosion sans s'en écarter.
Je m'assis sur mon lit et commençais à penser.
Nous étions le 26 juin 1964. Mes pensées s'orientèrent vers la troupe du cirque. Ils me manquaient terriblement. Je me demandais comment étaient devenues leurs vies à tous. Dandy et Jimmy ont-ils réussi à s'entendre ? Ma Petite avait-elle survécue à la peine de perdre les siamoises ? Jimmy m'avait-il oublier ?
Des centaines de questions, sûrement à tout jamais sans réponse.