Jamie 2 :(les aventures d'Inès et Jamie)

Chapitre 11

Cette nuit là, la dernière avant le départ de Jamie, ne fut pas celle escomptée. Et pas celle dont j'avais désespérément besoin avant que nous soyons séparés. En grande partie responsable de notre dispute, l'insomnie m'a suivie une bonne partie de la nuit malgré le sommeil plutôt bon d'Adam. Hier soir, après ma goulée mémorable de champagne tiède, Maria et Philip ont rapidement pris congé et sont rentrés chez eux, nous laissant seuls face à nos problèmes de couple et de parents. Tous les deux remontés à bloc sur nos positions et ne souhaitant pas concéder à l'autre une quelconque victoire, nous avons fini après une bonne heure de paroles en l'air agitées dans le salon par aller nous coucher, sur les nerfs.

Au début, j'ai culpabilisé d'avoir bu de l'alcool et j'ai envisagé d'aller vider mes seins du lait contaminé par le champagne, puis me suis résignée en réalisant que je n'aurai pas assez de lait en stock pour la tétée de 23h. Il fallait donc choisir entre nourrir mon fils alors que j'étais alcoolisée, ou le laisser hurler jusqu'à la prochaine tétée vers 3/4h du matin. Sur ce point là, Jamie n'est pas intervenu. Il m'en voulait d'avoir bu mais m'en voulait encore plus pour Dulcie. Du coup, cette nuit c'était l'hôtel des culs tournés. Chacun de nous ruminait dans son coin, sans vouloir faire le premier pas de la réconciliation. J'avais à la fois envie de faire la paix pour m'apaiser et enfin dormir, mais aussi envie de montrer que non, je ne céderais pas tout juste parce que sa fille m'a fait déraper. Je me suis excusée pour mon geste et j'attends de lui de me soutenir sur la nécessité de rectifier son attitude au sein de notre foyer.

Vers 9h, alors que je dormais enfin, Adam blotti contre moi, Jamie s'est levé sans bruit et a préparé les filles. Le week-end, Anna n'est pas là. Je n'ai pas eu à cœur de les rejoindre et ai attendu qu'il remonte dans la chambre 1h plus tard pour aller le voir dans la salle de bain. Tandis qu'il se rase, torse nu et vêtu de son bas de pyjama en coton gris, j'essaye de percevoir son humeur sous sa mine renfrognée. J'aurai vraiment besoin qu'on se réconcilie avant son départ. Je m'appuie dans l'encadrure de la porte, l'observe à sa tâche méticuleuse et croise enfin son regard dans le miroir. Il porte les mêmes cernes que moi, et, semble toujours en colère.

- Tu pars à quelle heure ? Je lance pour rompre le silence.

- Vers 11h. Dit-il froidement.

- Ton avion ?

- Je décolle à 16h. Je vais déposer les filles chez Amélia et ensuite je file à l'aéroport.

Aïe, j'avais oublié cette partie. Je suis chagrinée que la dernière personne qu'il verra avant de s'envoler pour un mois de tournage soit son ex-femme. Et qu'il la voit qui plus est alors que nous sommes fâchés.

- Tu veux que je t'accompagne ?

Je ne sais pas d'où me sort cette idée. D'une parce que je n'ai rien à faire chez son ex, de deux car après mes mésaventures avec Dulcie c'est une très mauvaise suggestion que de me retrouver avec elle en voiture.

- Non, ça ira. Je t'appellerai à mon arrivée à Rome, répond t'il, toujours de marbre.

Mon dieu que je me sens mal en ce moment... j'ai envie de me blottir dans son dos, l'enlacer, lui dire qu'il va terriblement me manquer... Mais mon orgueil me pousse à rester debout et ne pas fléchir sur les sujets importants d'éducation qui nous opposent aujourd'hui.

- Je n'ai pas envie qu'on se quitte comme ça, je dis a voix basse, le menton tremblant.

- Moi non plus, annonce t'il sèchement en essuyant le bas de son visage avec une serviette blanche avant de se tourner face à moi.

Il croise les bas, s'adosse à l'évier, et poursuit :

- Ce qui est fait est fait. J'ai parlé à Dulcie et je pense qu'on va modifier les plannings de venue à la maison pour le moment, tant qu'Adam est tout petit. Tu n'as pas l'énergie et la patience de gérer mes filles, je peux le comprendre. Je préfère donc qu'elles restent chez leur mère plutôt que de vous sentir toutes les trois malheureuses ici.

- Euh... ok.

Je ne sais pas si cette nouvelle me déçoit ou me rassure.

- Quant à nous, et bien, ce n'est pas la première ni la dernière engueulade qu'on aura. Elle est juste tombée à un bien mauvais moment et honnêtement je n'ai pas le temps aujourd'hui de régler ça.

Que dire ?

- Je te propose qu'on en reparle à tête reposée, dans la semaine. Et puis cela nous fera peut-être du bien de remettre un peu de distance vu les circonstances.

Non non non, je ne veux pas de la distance avec toi. Je te veux toi et Adam. Mais j'ai bien conscience que c'est égoïste car t'avoir toi c'est aussi prendre tout ton passif avec, tes filles, ton ex femme et ton boulot d'acteur. Bordel que c'est compliqué de faire sa vie avec quelqu'un qui a déjà fondé une famille avant soi.

- D'accord.

- Maintenant je voudrais profiter de mon fils un peu avant de partir, me lance t'il en passant devant moi pour quitter la salle de bain.

Je profite de notre proximité pour lui frôler la main, il s'arrête et s'immobilise. Je le sens expirer profondément.

- Je t'aime, je murmure avec l'envie de pleurer.

- Moi aussi, répond t'il avant de me donner un léger baiser.

Je le regarde aller prendre Adam dans les bras et le câliner, et cette image des deux hommes de ma vie me réchauffe le cœur.