Chapitre 2

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- On atterrit dans 20minutes, me murmure Jamie à l'oreille alors que je suis assoupie contre son épaule.

Je me redresse sur mon siège, le visage endolori suite au contact de ma joue sur sa veste, et ouvre les yeux péniblement après ces quelques instants de répit. Épuisée, tout comme Jamie, j'ai fini par m'endormir durant le vol après des heures de voyage et de stress. Jamie a le visage rude, les yeux cernés, et il n'a pas arrêté d'agiter ses doigts sur ses genoux depuis notre dernier décollage il y a 2h. J'ai pour ma part le dos en vrac, la mâchoire serrée et un mal de crâne qui ne me lâche pas depuis tôt ce matin. En temps normal, un vol avec escale de ce type est déjà fatiguant notamment à cause du décalage horaire, mais dans les conditions exceptionnelles que nous traversons aujourd'hui, c'est encore plus pénible. Ces heures de vol ou nous étions assis et impuissants, sans aucune possibilité de téléphoner ou communiquer avec la police, ont été interminables. Nous n'avions qu'une hâte : atterrir pour allumer nos téléphones et avoir des nouvelles, positives idéalement, de notre fils.

- Pardon, je me suis endormie, dis-je à Jamie soucieuse.

Dormir alors que mon enfant est aux mains d'un kidnappeur me fait culpabiliser. Voilà des heures que je tenais, sur les nerfs, pour soutenir Jamie aussi, et mon corps m'a laissé tomber sur cette dernière heure de trajet.

- Non ne t'excuses pas. C'est bien que tu aies pu te reposer un peu on aura besoin de toutes nos forces pour aider la police tout à l'heure.

- Comment tu te sens ? Je lui demande en retour.

- Impatient, d'arriver, d'avoir des infos... et énervé, dit-il en serrant les dents.

Je saisis sa main et croise mes doigts dans les siens en geste rassurant.

- Je suis sure qu'il est sain et sauf. C'est forcément l'œuvre d'une personne qui veut de l'argent. Qui d'autre se donnerait autant de mal à kidnapper notre fils ? Je lui dis, en ayant l'image fortuite de Dulcie qui m'apparaît en même temps.

Depuis hier soir je n'arrive pas à me sortir cette idée de la tête. Durant la nuit, la police a poursuivi l'enquête avec la liste des personnes de notre entourage afin vraisemblablement de les contacter ou de vérifier leurs alibis. La première à avoir subi l'interrogatoire était Mme Botten. Ils nous ont dit qu'elle était tellement choquée par l'enlèvement qu'elle n'arrêtait pas de pleurer et de se blâmer pour son absence pendant les faits. Les enquêteurs l'ont gardé en « observation » (cela veut-il dire garde à vue?) pendant 4h afin de la faire éventuellement avouer mais l'issue de cet interrogatoire fut négative. Sincèrement, elle est sans doute la personne la plus saine et la plus fiable que je connaisse. Nous la payons très grâcement donc elle n'avait financièrement parlant aucun mobile pour enlever Adam. Mais comme elle n'a pas d'enfant, la police a tenu à vérifier si elle n'aurait pas fait ça par attachement au bébé et pour s'enfuir avec lui. Sauf que si ça avait été le cas... elle ne serait pas venue au travail le lendemain.

Par ailleurs, le fait de la garder sous surveillance une longue période l'empêchait de retourner auprès d'Adam et de prendre soin de lui. Ils avaient volontairement fait durer l'interrogatoire pour vérifier si elle s'agitait, se stressait. Mais ce ne fut pas le cas. Tout simplement car ce n'était pas elle.

Au moment où nous allions embarquer dans le petit hydravion qui nous faisait quitter l'îlot des Maldives, il n'y avait pas d'autres pistes sérieuses. Les quelques vidéos de surveillance de nos caméras avaient été épluchées sur les 3 jours précédents le kidnapping pour tenter de déceler des indices, mais ils furent bredouille. Le détail du système d'alarme et des caméras coupées quelques instants avant l'enlèvement indiquent cependant que la personne s'y connaît en cambriolages ou bracages - mais comme cette description ne semble correspondre à aucune personne de notre entourage, les inspecteurs pensent que l'auteur des méfaits a pu être aidé dans son action. Nous serions donc à la recherche de deux personnes.

L'avion surplombe Londres alors qu'il est bientôt 9h du matin en Angleterre. Le décollage horaire négatif nous aura au moins permis de rattraper 6h - mais Adam a été enlevé depuis bientôt 36h, sans que l'on ai aucune idée de son ravisseur ni de sa localisation. Est-il toujours sur le territoire britannique ?

- Bienvenue à Heathrow, annonce le pilote d'une voix enjouée.

Le signal lumineux des téléphones n'est pas encore activé que Jamie a déjà basculé son mode avion pour appeler le commissaire Anders, en charge de notre affaire. Je l'écoute attentivement discuter avec lui tout en récupérant notre bagage cabine au dessus de nous. Nous avons voyagé en seconde classe car c'était les seules places disponibles sur ce vol, et avons laissé nos valises aux Maldives avec la plupart de nos affaires. Ils nous les enverront plus tard sur un prochain vol. Nous voulions aller vite, ne pas être encombrés, et n'avons rapporté que papiers, clefs, et quelque effets personnels indispensables. Tout tenait dans un sac à dos.

- Vous avez des nouvelles ?

Je scrute les réactions de Jamie, qui me fait signe qu'il n'y a toujours pas eu de manifestation d'un éventuel ravisseur, en simulant un geste de non avec la main au niveau de sa gorge.

Ce n'est vraiment pas bon signe.

- Ah bon vous croyez ? ... Jamie me regarde et répète : ils pensent que le kidnappeur savait que nous étions en voyage et a volontairement choisi ce moment pour agir, du coup il attend sûrement notre retour pour demander une rançon.

Alors finalement, ce serait une bonne chose?

- Comment ça une caméra ? S'exclame Jamie en poussant les gens dans l'allée, agacé.

Je le suis en essayant de ne pas louper une miette de sa conversation.

- Non, nous n'avions pas installé de caméra dans notre chambre. Encore moins cachée derrière un cadre accroché au mur.

Hein? Mais de quoi parlent-ils ?

- Attendez... on était espionnés par une caméra cachée ? Lance Jamie, sans que je ne puisse entendre la réponse à sa question.

Nous sortons de l'avion dans la foule et la bousculade, ce qui m'empêche de rester derrière Jamie à écouter. Il presse le pas, et je le rejoins au bout de la nacelle quelques instants plus tard après que plusieurs passagers me soient passés devant.

Il a raccroché.

- Mais ? mais ??? Je lui dit, perplexe.

Il est abasourdi, furieux.

- La police a trouvé une caméra caché derrière le cadre accroché face à notre lit dans notre chambre. Ils pensent que le ravisseur pouvait ainsi nous surveiller et savoir quand venir et agir, en toute impunité.

- Comment est-ce possible ?

Et puis soudain tout s'éclaira.

- Kate, dis-je, simultanément avec Jamie.

Kate a refait la décoration de notre chambre. Il n'y a qu'elle qui a pu accéder à la maison, poser cette caméra... et... elle n'a sans doute pas eu de mal à me guetter saisir le code de l'alarme. C'est Kate qui a enlevé Adam.

Jamie 2 :(les aventures d'Inès et Jamie)Where stories live. Discover now