Chapitre 8

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Nous y sommes.
Le jour J. Ce moment à la fois redouté et attendu.

Hier soir la police a réussi à joindre Philippe qui a pu prouver qu'il était bien à Singapour depuis 3 jours. Nous n'avions donc plus de suspect.

La nuit n'as pas franchement été bonne. L'équipe d'enquête s'est retirée de notre salon pour la nuit, laissant l'espace aménagé en bureaux de fortune totalement vide, peu après 23h. Anders nous a assuré qu'une équipe de nuit au poste prendrait la relève et notamment suivrait en double écoute tous les appels potentiellement réceptionnés sur nos lignes d'ici l'aube. Jamie et mois nous sommes donc retrouvés en chiens de faïence, accompagnés par ses parents bienveillants qui nous avaient préparé à dîner. Ils sont restés présents tout du long mais gardaient leurs distances pour ne pas nous importuner. J'ai beaucoup apprécié le support, discret, qu'ils nous ont apportés durant ces heures pénibles. Jamie et moi n'avons pratiquement rien avalé, sans doute à cause des noeuds à l'estomac que le rendez-vous de demain engendrait. Lessivés, nous nous sommes couchés vers minuit avec la ferme intention de nous reposer pour être au taquet dès demain matin. Mais pour lui comme pour moi, ce fut impossible. J'ai l'impression que mon cerveau refusait de lâcher du leste et que malgré la fatigue musculaire et cérébrale accumulées après deux jours d'horreur, il me refusait le sommeil. Je crois que j'ai somnolé, mais mes pensées sombres ne cessaient de venir me hanter.

Vers 5h30, je me suis levée, sachant que l'équipe policière n'arriverait qu'à 8h pour reprendre le travail. De toute façon, nous étions prêts à ce qui allait désormais se dérouler. Rien n'avait permis d'identifier le kidnappeur et nous nous sommes résolus à donner la rançon réclamée pour récupérer notre fils. Techniquement l'argent n'est pas un problème, même si deux millions est une somme colossale. Jamie a cette somme. Il a réussit en hypothéquant une de ses maisons à obtenir la somme en cash hier soir après des heures de négociation avec la banque. Bien sûr, il était couvert et accompagné par les équipes de fédéraux britanniques. On a tous les deux découvert que ces situations d'urgence suivaient une procédure bien spécifique, qui avait déjà été appliquée dans le passé, notamment pour la famille royale.

Nous n'avons pas non plus été étonnés que la police place une balise GPS dans le sac de sport qui accueille les coupures de billets de cents livres. Jamie pensait même que les billets seraient numérotés et donc identifiables - mais ici en Europe nous n'utilisons pas de détecteurs de faux billets dans les magasins, il est donc plus difficile de tracer l'argent liquide dépensé. Le plan est clair : on se rend au lieu de rendez-vous que le kidnappeur nous communiquera vers 11h30/12h, on lui donne le sac en échange du petit et on le laisse partir. La police tracera le signal ensuite pour l'interpeller. Pas de risque à prendre au moment de l'échange : ils ne souhaitent pas que l'enfant soit mis en danger ou que le ravisseur se sente menacé par la présence de la police et préférerai fuir. Ils nous ont expliqués qu'ils seront présents mais à distance, dans un cercle de 500 mètres environ afin de ne pas être repérés. Ils placeront un micro sur Jamie ou moi afin d'être prévenus s'il y a le moindre incident et intervenir dans la minute.

Enfin ça, c'est si tout se passe comme ils le disent. On ne connaît pas le lieu de rendez-vous : si c'est à découvert je ne vois pas bien comment les policiers pourront encercler la zone. S'il n'est pas seul mais avec des complices ? Si Adam n'est pas avec lui ? S'il a une arme et nous menace ? Toute la nuit j'ai cogité sur la façon dont les choses peuvent se passer, et franchement le fric est le dernier de mes soucis si mon fils est vivant et m'est rendu.

- Ça va ? Me souffle Jamie dans la nuque.

Je suis debout adossée à la fenêtre et guette dehors l'éclairage des lampadaires s'éteindre dans la rue. Vêtue d'un teeshirt ample qui couvre mes fesses, je sens la peau chaude de Jamie qui m'enveloppe dans ses bras.

- Je veux que tout ça se termine. Je ne tiendrai pas plus longtemps.

Il me fait me retourner pour que je le regarde. Dans ses yeux je lis la fatigue, la colère, mais aussi l'espoir. Contrairement à moi Jamie refuse de se laisser abattre.

- Je ne laisserai plus jamais personne te faire du mal ou faire du mal à notre famille. Je t'aime, plus que tout.

- Moi aussi je t'aime. Mais je ne peux pas vivre sans Adam.

- Moi non plus, mais on aura pas a le faire. Quand on l'aura récupéré je l'enfermerai à double tour avec toi dans mon coffre fort, dit-il.

J'esquisse un sourire.

- Je suis désolé de tous les mots que j'ai pu avoir, et de t'avoir blessé par rapport à Dulcie.

- Ce qu'on vit est tellement difficile que je ne peux pas t'en vouloir et surtout nous avons besoin d'être soudés dans cette preuve. Nous battre et nous faire la gueule ne fera qu'aggraver notre mal-être.

- Oui tu as raison.

- Est-ce que tu veux manger quelque chose ? Demande t'il, calme.

- Pas vraiment. Mais je crois que ça me ferait du bien. Alors oui, allons manger.

- Et prendre un café.

- Oui, plusieurs même.

Nous nous regarderons longuement dans les yeux et cet instant semble marquer un tournant dans notre relation. De toutes les aventures que nous avons traversées depuis notre rencontre celle-ci est de loin la plus dure. Mais c'est dans l'épreuve que l'on prend conscience de l'amour que l'on porte à l'autre. Nous nous embrassons, tendrement puis plus fortement, les yeux humides et clos, dans le silence. Unis dans la douleur et la souffrance,  ensemble.

Jamie 2 :(les aventures d'Inès et Jamie)Onde as histórias ganham vida. Descobre agora