𝔻𝔸𝕐𝕃𝕀𝔾ℍ𝕋 | Acte I : 𝓣𝓻𝓮𝓪𝓬𝓱𝓮𝓻𝓸𝓾𝓼

Prologue

"𝓣𝓱𝓮𝓻𝓮 𝓪𝓻𝓮 𝓼𝓸 𝓶𝓪𝓷𝔂 𝓵𝓲𝓷𝓮𝓼 𝓽𝓱𝓪𝓽 𝓘'𝓿𝓮 𝓬𝓻𝓸𝓼𝓼𝓮𝓭 𝓾𝓷𝓯𝓸𝓻𝓰𝓲𝓿𝓮𝓷,
𝓘'𝓵𝓵 𝓽𝓮𝓵𝓵 𝔂𝓸𝓾 𝓽𝓱𝓮 𝓽𝓻𝓾𝓽𝓱, 𝓫𝓾𝓽 𝓷𝓮𝓿𝓮𝓻 𝓰𝓸𝓸𝓭𝓫𝔂𝓮..."

Sous les chaleurs intenables de l'été 847, une jeune fille au cheveux roux courait entre les tables dans un bar du district de Karanese.

Alors que son entraînement au sein de la 101ème brigade d'entraînement allait prendre fin, elle s'était trouvé un travail rémunéré à l'heure pour subvenir aux difficultés financières de son père.

Très tard dans la soirée, dans ce même bar, le soldat désigné comme étant le plus fort de l'humanité passa la porte pour occuper ses insomnies habituelles. Il prit place à une table plus éloignée des autres, respectant son caractère solitaire et indépendant. Le bruit incessant des cinquantenaires qui l'entouraient l'empêchait de plonger dans ses pensées sombres et déprimantes qui le poussaient à rester éveillé.

Elle arriva telle un soleil d'été au milieu d'une nuit d'hiver arborant un tablier bordeaux et une jupe longue et blanche. Elle semblait pouvoir, d'un simple sourire, vous faire oublier toute la douleur de ce monde peuplé de titans. Ses yeux noisettes parsemés de reflets verts ressortaient au milieu de son teint hâlé constellé de tâches de rousseurs. Elle se dirigea vers lui et ses cheveux ébènes pour prendre sa commande.

-Qu'est-ce-que je vous sers ?

Etant d'un naturel impassible, il ne put détacher son regard de la jeune fille. Aucun mot ne franchit ses lèvres tant il restait bouche bée devant la beauté naturellement pure et douce de la personne se tenant face à lui.
Un blanc de quelques minutes s'installa entre les jeunes gens, ignorant les bruits affluant autour d'eux. La jeune femme rougissante devant le regard involontairement insistant de cet homme, ne semblait pas le reconnaître. Sa posture, ses cheveux délicatement attachés et son regard le déstabilisaient comme personne ne l'avait fait auparavant.
Au bout de quelques secondes semblant durer une éternité, il se reprit et lui donna une brève réponse.

-Un thé noir s'il vous plaît.

-Tout de suite ! Enchaîna-t-elle aussitôt en s'éloignant laissant le soldat avec la sensation amère d'avoir imaginer tout cette connexion étrange.

Il ne pouvait s'arrêter de l'observer d'un regard en coin en buvant sa tasse sans tenir la anse. Il évitait pourtant chaque face à face avec son visage candide et innocent, ne souhaitant pas assumer pleinement cet étrange sentiment naissant. Des hommes buvant des litres d'alcools ne cessaient de l'approcher et la regardaient tels des porcs observant leurs repas, ce qui crispaient ses mains autour de la tasse vide.

L'horloge tournait, elle accélérait le rythme et continuait de servir pintes sur pintes lorsqu'à un moment, un homme saoul comme c'est pas permis, qui devait avoir plus de deux fois son âge, lui saisit la taille pour l'attirer contre lui et sa sale odeur de transpiration.

Le pouls de l'homme aux yeux bleus acier s'accélérait, n'attendant qu'un regard de la part de cette inconnue pour aller tabasser le vieillard serrant ses mains sur sa taille fragile.

Seulement à l'instant où cette main glissait trop bas, la rousse lança un regard dans une direction aléatoire et croisa les yeux du célèbre soldat. Prestement, à la vue de cette scène, il se leva pour enfoncer son poing dans la tête de l'agresseur qui s'écroula, ivre mort, sur le sol poisseux. Mais ceci était bien la dernière chose à laquelle il fît attention à ce moment-là.

Elle le regardait sous le choc, ne comprenant pas sa soudaine violence, et lui s'éloignait avec rapidité hors de l'établissement en voyant le patron et les problèmes arriver. Il lui fît un dernier signe de tête, et tourna sans un mot les talons laissant un dernier regard à celle pour qui il s'était levé.

Il passait la porte usée par le temps et l'humidité, et à la seconde où il allait tourner pour rejoindre une autre rue, il sentit une main frêle et délicate lui agripper le poignet pour le stopper dans sa course.

Il aurait pu craindre le pire, comme la brute épaisse qui aurait voulu lui rendre les coups, mais cet poigne tremblante à cause du froid ne semblait certainement pas capable de le gifler ou le frapper.

Il se retourna soudain pour apercevoir ses yeux d'ors illuminés par la lampe à huile accrochée au mur et des mots emplis de gratitude produisirent des frissons dans tout le corps de ce vaillant sauveur.

-Merci beaucoup. Dit-elle le laissant une fois de plus bouche bée devant ses traits fin et ses cheveux rayonnant sous le clair de lune.

Ses pommettes rougies par le froids réchauffait son teint pâle de fatigue et sa respiration saccadée se ralentit peu à peu.

-Qui êtes-vous ? Ajouta-t-elle l'air toujours intimidée par cet homme aux allures austères.

Hésitant à lui donner son prénom, il ne pu résister à l'envie de vouloir potentiellement la retrouver un jour.

-Livaï.

Il répondit doucement pour ne pas briser l'atmosphère de ce moment. Il aurait préféré lui chuchoter au creux de l'oreille pour qu'elle ne l'oublie jamais, pour qu'il lui appartienne.

Il vit ses yeux s'agrandir, elle connaissait évidemment ce prénom sûrement à cause des femmes et hommes l'ayant hurlé dans la foule au départ d'une expédition, ou tout simplement parce qu'elle l'avait lu dans les actualités locales. Cependant, elle restait un mystère pour lui et il se décida à lui poser à son tour cette question lui brûlant les lèvres.

-Et vous ?

-Petra Ral.

Elle lui sourit tendrement, une fois de plus, et lui répondit comme un soldat répond à son commandant étant donné le service militaire qu'elle rendait, elle aussi, au sein de ces murs.
Mais à ce moment, il ne retint que ces trois syllabes pour les conserver à jamais dans sa mémoire.

-Bonne nuit. Finit-elle par lui dire en retournant vers le lieu de leur rencontre, sa robe flottante et ses bras dénudés qui s'évaporaient sous cette soirée de juillet.

Il finit par en faire autant, restant éveillé sur sa chaise de longue heure en repensant à son parfum envoûtant et à sa voix cristalline qui se fondaient dans la nuit noire.