Chapitre 16 : 47ème expédition extra-muros

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Le vent soufflait fort ce matin-là, les soldats du bataillon d'exploration avaient préparé avec la boule au ventre leur équipement la veille. Les chevaux étaient prêts, les chariots de ravitaillements chargés et les soldats rangés sur leur monture, entourés d'une foule de civils du district de Trost.

L'objectif des expéditions du corps d'armée était le même depuis quatre ans maintenant. Ils devaient consolider la route créée entre le district de Trost et celui de Shiganshina attaqué par les titans, le tout en vue d'une opération de reconquête. L'équipe d'opération spéciale, ou l'escouade Livaï était placée vers l'avant de la formation aux côtés de celle d'Hanji et de Mike.
Petra, ne montrant plus aucun signe de fatigue depuis plusieurs jours, s'était ardemment remise à l'entraînement ayant conscience du retard qu'elle aurait pu causer à ses camarades. Les portes étaient encore closes, mais les gens autour ne se gênaient pas pour envoyer toutes sortes de commentaires aux braves et courageux jeunes gens dévouants leur vie à l'avancée de l'humanité.

La rousse entendait les adultes d'un certain âge maudire les impôts qu'ils avaient dû payer pour l'organisation de cette sortie vers les territoires assiégés de titans, ou encore des femmes hurlant des noms qu'elle ne connaissait pas dans la foule. Elle avait même entendu certaines femmes un peu plus âgées qu'elle, balancer des demandes assez insolites à leur caporal-chef, qui semblait d'ailleurs faire le sourd.

Mais ce que la jeune femme préférait souvent avant le début des expéditions, c'était de regarder les étoiles dans les yeux de certains enfants, les voyant comme des héros exceptionnels et idolâtrés. Elle les trouvait tellement adorables qu'elle leur souriait franchement en les regardant droit dans les yeux, pour leur faire comprendre qu'elle les avait bien vu et voir leur excitation grandissante face à ce contact visuel. Elle aurait grandement aimé avoir des enfants, mais en tant que soldate cela serait un grand inconvénient, car elle refusait d'abandonner la famille qu'elle aurait fondé pour le bataillon. Mais elle ne se sentait pas prête à quitter son poste pour autant, et puis fallait-il encore rencontrer le bon, celui pour qui elle serait prête à mettre son dévouement entre parenthèses. Elle perdit son sourire à cette idée, surtout lorsque ses yeux se posèrent sur l'homme aux cheveux de jais finement coupés, à la mine terne et fade fixant un point au loin devant lui. Elle se mît presque une claque mentale quand ses songes se mirent à dériver et à associer son supérieur à ses fantasmes de famille heureuse. « À quoi penses-tu Petra, concentre toi un peu ! » Se grondait-elle intérieurement alors que les grilles commençaient doucement à se relever sous ses yeux.

Le stress montait dans sa gorge, mais celui-ci était également mêlé à une certaine hâte. Le bras du major Erwin se leva vers le ciel, visible de tous les hommes qui le précédaient et il hurla le signal de départ de son ton solennel.

-En avant soldats ! Et dévouez votre cœur !

Les chevaux partirent soudain à toute allure se dirigeant progressivement vers la sortie. Les yeux de Petra se levèrent vers le ciel lorsqu'ils passèrent sous l'arche de pierre immense creusée dans le mur et en un clignement, ses pupilles d'ambre se rouvrirent devant le ciel bleu où des oiseaux volaient librement d'un battement d'ailes.

Lorsque tous le groupe eût dépassé le mur, les soldats se mirent en formation et l'escouade Livaï se retrouva loin devant les chariots d'approvisionnement, prêts à anticiper le moindre obstacle pour les prévenir.

Chacun avait un sérieux militaire et suivait aveuglément le caporal-chef restant attentif aux ordres de son supérieur. Ils suivirent leurs routes pendant les vingt premières minutes, durant lesquelles rien ne semblait anormal. Des titans furent aperçus par leur escouade, ils tirèrent instantanément un fumigène d'alerte rouge vers le ciel de manière à alerter le dos de la formation et son centre.
Ils dévièrent plusieurs fois leur trajectoire en évitant les groupes de monstres arrivant sur la droite et continuèrent jusqu'à arriver à leur objectif. En effet, il était prévu de faire la sortie en deux jours, un aller et un retour. Ils reposeraient pendant la nuit dans une des anciennes bases du bataillon qui s'était retrouvée envahie par les titans à la perte du mur Maria. Ces bêtes étaient effectivement inactives la nuit ce qui laissait un temps de répit aux soldats pour se reposer et se ravitailler en gaz et en lames.

Les chevaux tenaient l'allure et le soleil commençait doucement à décliner vers l'ouest. L'horloge tournait et un titan qui n'avait apparement pas été repéré par l'aile gauche fonçait droit sur l'escouade Livaï. En effet, il avait été tiré un fumigène noir dans le ciel, un peu tard apparement, signalant un déviant se dirigeant vers le centre.

-Il a l'air seul. Déclara Gunther, à l'affût de ses moindres faits et gestes.

-Ne bougez pas et surveillez mon cheval, je m'en occupe ! Ordonna le caporal-chef.

Petra avait remarqué qu'il avait dû faire une nuit blanche, car ses yeux étaient marqués par des cernes et ils semblaient tous deux lutter pour rester ouverts. Elle n'était pas rassurée pour lui, mais n'osa pas contredire ses ordres estimant qu'elle avait eu sa dose de sermon pour le reste de l'année.

Il sauta de sa monture, et s'élança avec ses câbles vers cet élément perturbateur. Il lui trancha la nuque en moins de temps qu'il n'en fut pour le dire, et laissa s'écrouler cet immense corps inerte sur le sol envoyant de la poussière dans les visages des quatre soldats.

Ils se mirent tous à éternuer en symbiose, provocant quelques rires complices.

-Pour le coup ça s'était synchro ! S'exclama Erd, aimant blaguer avec ses amis, même lorsque la situation ne s'y prêtait pas.

-Restez concentrés, on est pas encore arrivés je vous signale ! Gronda le caporal laissant les membres de l'escouade complètement muets.

Livaï s'amusait souvent intérieurement de leurs agissements entre eux et de l'autorité qu'il avait. Ils avaient beau devoir rester professionnels, ils formaient à eux quatre, un sacré groupe d'amis. Il pensait souvent à ses camarades de l'époque en les regardant, le laissant sur une note tristement amère, comme à chaque fois qu'un souvenir lui revenait en tête.

Il aimerait ne pas avoir vécu tout ça, car il avait trop souvent regretté de s'être autant attaché à ses compagnons d'armes, qui avaient tous finis par partir. Cela l'empêchait souvent de tisser des liens forts avec eux, lui créant une image de supérieur froid et inaccessible dont l'expression resterait éternellement indéchiffrable.

Ses sourires n'étaient réservés qu'aux moments les plus heureux de sa vie, et ne se laissaient pas souvent voir par autrui. Mais n'importe qui aurait eu le même comportement après avoir vécu sa vie, qui aurait pu blâmer cet enfant maigrichon sorti des bas-fonds ?

La base s'approchait dans le champs de vision des soldats, toujours chevauchant cheveux au vent, en ce moment presque rassurant, où ils avaient comme la sensation d'atteindre leur foyer, où ils trouveraient repos, plats chauds et chaleur humaine. Petra ne baissait jamais sa garde à ce moment précis, depuis qu'elle avait vu un camarade se faire attraper dans le dos sans la moindre chance de survie, elle s'était toujours tenue sur ses gardes, comme un instinct de survie qui lui était venu tout naturellement.
Elle s'empêchait de regarder inlassablement la nuque découverte de son caporal qui avait les mèches flottantes, et le visage toujours tourné vers l'horizon platonique et verdoyante.

Ils attachèrent les chevaux dans l'écurie, aidèrent à décharger les chariots de gaz, donnèrent de la paille aux bêtes qui les avaient porté jusqu'ici et partirent se débarrasser de leur équipement dans le grand local de l'ancienne base. Elle était fréquemment utilisée, car stratégiquement bien placée pour aider à construire la route entre les districts et donc régulièrement nettoyée par les soldats eux-mêmes. Le dîner qui avait était d'un calme mortuaire en raison des corps laissés derrières, prît fin assez tôt.

Le soleil se couchait déjà pour laisser place à l'astre nocturne et Petra, qui ne supportait pas de rester dans ses draps sans avoir prit une douche partit vers les salles d'eaux. Etant donné la superficie du bâtiment, elles étaient mixtes, et elle ne souhaitait franchement pas croiser ses camarades en petite tenue. C'était pour ce genre de raisons, que lorsque tous les autres soldats étaient déjà couchés et endormis, l'eau bouillante coulait encore dans une des cabines.

𝔻𝔸𝕐𝕃𝕀𝔾ℍ𝕋  | Acte I : 𝓣𝓻𝓮𝓪𝓬𝓱𝓮𝓻𝓸𝓾𝓼Where stories live. Discover now