Eidos · Deen Burbigo

Chapitre 16

Mikaël

Je me rappelais plus ce que ça faisait carrément, je me rappelais juste plus.

Je suis là, comme un con, les mains dans les poches de mon pantalon, ma casquette sur la tête, et ma lèvre du bas entre les dents, à attendre de la voir débarquer. Mila me pardonnera, je me suis changé, on n'est plus assortis, mais je voulais que Romy regrette pas ce qu'il s'est passé à la soirée.

Je veux qu'elle ait putain envie de recommencer surtout.

Et ce matin, quand je me suis pointé pour déposer Mila à l'école, c'était pas elle qui s'occupait de la grille, mais plutôt une vieille meuf qui a refusé de me laisser rentrer. J'espère juste que c'était pas volontaire de la part de Romy.

Je crois que c'est ce qui m'effraie le plus : qu'elle regrette, qu'elle m'évite, que ça l'ait foutue dans la merde plus qu'autre chose. Mais putain, la seule chose que j'attends là, c'est de voir les gosses débarquer, et elle derrière eux. J'espère qu'elle se souvient de chaque mot que j'ai sorti après qu'on se soit embrassés, parce que je reviendrai sur rien : maintenant qu'elle m'a dit que je lui plaisais, je vais pas la lâcher.

- Tu vas pas pouvoir fuir Romy, je murmure en m'appuyant contre la grille, je te laisserai pas faire une connerie comme ça.

Parce que je suis persuadé que ce serait une connerie. Je sais même pas vraiment comment j'ai pu penser à abandonner ce qu'il y a entre elle et moi, ça refait toutes mes putains de journée.

- Papa ! La voix de Mila me fait relever la tête, et mon cœur accélère par la même occasion. On a fait des animaux en papier !

J'aurais souri comme un con tout autre jour en voyant ma fille courir vers moi, fière d'elle, là je crois que ça va être difficile. C'est la collègue de Romy qui suit les gosses jusqu'au portail, et pas de chignon blond à l'horizon.

- Putain Romy, je ferme les yeux en serrant le grillage entre mes doigts.

J'ai attendu ça toute la journée. Toute la nuit aussi. Et hier. Depuis que je l'ai laissée à la soirée en fait.

- Vas-y Mila, la collègue de Romy laisse ma fille sortir la première, sa création à la main.

- J'ai fait une licorne Papa ! Son sourire éblouissant arrive à m'en tirer un petit. Elle brille brille en plus.

Ça fait un sacré mal de chien pour que même Mila heureuse dans mes bras, ça suffise pas à étouffer le truc.

- Trop forte ma princesse, je dépose un bisou sur son nez, avant d'en déposer un deuxième dans ses cheveux. Fais voir, j'approche ma main de sa licorne, wesh, je souris quand mes yeux se posent sur la corne toute pailletée et même torsadée, t'as fait toute seule ?

- Avec Maîtresse ! Son sourire s'élargit. Oh Papa ! Elle sautille dans mes bras. Maîtresse elle t'en as fait un !

Je crois que je viens de m'étouffer avec de l'air.

- Quoi ? Je souffle.

- Maîtresse elle t'a fait un cadeau en papier aussi, elle fouille dans son sac à dos, et ce qu'elle en ressort pourrait me foutre au sol. J'ai mis les paillettes dessus parce que Maîtresse elle devait partir vite vite.

C'est un cœur en papier qu'elle pose dans ma paume. Romy putain. Et quand je tombe sur son écriture à l'arrière, je peux pas m'empêcher de sourire.