Chapitre 47

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Romy

Même Jarvis est perplexe. Toujours à la recherche d'un nouveau moyen de provoquer Mikaël, il m'observe, couché sur le tout nouveau pull que mon copain vient de s'acheter. Pull blanc, chat gris presque noir, Jarvis sait toujours ce qu'il fait, et dans quel but.

- Il est gentil tu sais, je souris doucement au chat de mon petit-frère. Il fait des efforts, tu pourrais en faire aussi.

Je sais pas si je m'attendais à ce qu'il ait une quelconque réaction à mon commentaire, mais si c'était le cas, je suppose que c'est raté, il continue juste à promener son regard entre mon visage et la pile de carnets que j'ai dans les mains. Parce qu'il sait aussi bien que moi que ce que j'apprête à faire dépasse très largement mes limites habituelles.

- J'ai jamais dit que ce serait facile, je baisse les yeux sur la couverture en carton du journal au sommet de la pile, mais j'ai envie d'essayer.

Ça fait une petite semaine depuis mon week-end à Lille avec Mika, et même si je ne regrette en aucun cas ce qu'il s'est passé entre nous, ou ce que j'ai pu lui dire, y quand même une chose que j'aurais aimé faire différemment : lui montrer avec des actes que ce que je lui ai dit ce n'était pas du vent.

Parce que qui est retombée dans ses habitudes ancestrales depuis notre retour à Paris ? Moi, absolument moi. J'ai été levée avant lui chaque jour de la semaine, occupée dans mes idées d'activités pour mes élèves le soir, et accaparée par Mila à la moindre minute de libre. Je regrette si fort, parce que même s'il s'est cru discret ce matin, j'ai absolument pas raté ses reniflements dans la salle de bain, qu'il a essayé de cacher en laissant l'eau couler en fond.

Et à ce moment-là, j'ai juste eu envie de me gifler.

- Il mérite Jarvis, je me lève, mes carnets serrés contre moi, avant de laisser mon chat derrière moi pour prendre le chemin de la bibliothèque, où Mika va s'installer pour travailler ou écrire.

Les difficultés commencent déjà au moment où je me poste devant la porte entrouverte, et que je m'imagine débouler de l'autre côté, sous ses yeux, sans qu'il n'ait aucune idée de pourquoi.

Moi je sais pourquoi : je peux pas continuer comme ça, j'ai l'impression que Mika me porte à bout de bras depuis le jour où j'ai accepté d'être sa copine, et à part quelques jours où j'ai eu la force de faire des efforts, je fais presque rien en retour. C'est juste pas possible, déjà pour lui qui mérite tellement plus, et pour toutes les choses qu'on s'est dites, que ce soit de finir nos vies ensemble ou de devenir parents tous les deux.

La seconde suivante, je pousse la porte sans vraiment me voir le faire, c'était trop rapide. Et mon coeur se brise juste un petit peu plus quand je tombe nez à nez avec Mika, assis à son bureau au fond de la pièce, le contour des yeux rouges. En essayant de faire comme si tout allait bien, il me lance un petit sourire, avant de jeter un oeil à la pile de carnets que je tiens dans mes mains.

- Tu veux que je te laisse le bureau ? Il éloigne son siège pour se lever, mais je suis plus rapide que lui, je dépose mes carnets sur ses genoux.

- T'es trop gentil Mika, je fais quelques pas en arrière, les bras serrés autour de mon pull. Et moi, pas assez courageuse.

Silencieusement, et avec les sourcils froncés, il observe mes carnets, avant de relever les yeux vers moi.

- T'as besoin d'aide pour un que-tru ? Il soulève le premier. Pour l'école ?

Peut-être que mon idée était idiote, mais ça représente tellement dans ma tête, que j'ai pas trop hésité.

Eidos · Deen BurbigoWhere stories live. Discover now