Chapitre 2

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Je me lève , m'habille, j'attache mes cheveux bruns en un chignon. Je maquille légèrement mes yeux marron clair et je prends la route.
Je longe ce couloir, mes talons résonnent tout le long.  Je lance la bouilloire, me prépare un thé.
Je commence par la première patiente, Andreane Zeeman.Un infirmier l'emmène, il lui entrave les mains sur la chaise. Son regard est cerné, elle murmure des phrases incohérentes, elle regarde partout.
Je l'observe dans un premier temps. Je vérifie son traitement , elle suit un traitement à base d'un antipsychotique.  Je vais ajuster le traitement, je vais lui changer et la mettre sous Loxapine, traitement de deuxième génération et du Risperdal.

— Andreane, comment vous sentez-vous?
— Elle est là, je l'ai vu. Elle vient me chercher.
— Qui vient vous chercher?
— La marchande d'étoiles. Elle me veut.
— Pourquoi elle vous veut?
— Parce que je sais garder les secrets.
— Quel secret gardez-vous?
— Chut je ne peux pas vous le dire. Elle me dit que vous êtes un démon. Et que je dois vous tuer.
— Bien Andreane. Je vais vous changer votre traitement d'accord. On se revoit dans quelques jours pour évaluer l'efficacité.

Elle ne me répond pas, l'infirmier la détache et la ramène à sa chambre. Je finis mon thé qui a bien refroidi . J'attends mon prochain patient Sean  Millers. Il toque, il n'est pas accompagné, il entre et s'assoit avachi sur sa chaise. Il me fixe, ses cheveux bouclés retombent sur le haut de son front, ses yeux verts sont comme un poignard qui n'attend qu'une chose,  faire de vous sa prochaine cible.

— Bonjour Sean.
— Bonjour docteur.

Il émet un sourire malicieux, presque charmant.

— Comment vous sentez-vous?
— Comme quelqu'un d'enfermé avec des fous.
— Vous ne vous sentez pas à votre place?
— Je ne ressens rien. Je suis là où on me dit d'être.
— Où voudriez-vous être?

Il rit et se mord la lèvre.

— Dans ton lit.

Je me redresse sur ma chaise, je suis décontenancée. J'ai déjà soigné des sociopathes, mais généralement mes patients présentent un comportement dysfonctionnel, qui est une réelle souffrance pour la personne.

— Que feriez-vous dans mon lit?
— Te faire jouir.

Je le fixe pour ne pas lui montrer  que je suis perturbée.  Il ne flanche pas. Il présente une tendance égotique, une estime excessive de soi.

— Vous le faites souvent avec vos partenaires?
— Juste avec les femmes en blouse blanche.

Il me reluque. Je passe à une autre question.

— Parlez-moi des sévices que vous avez pratiqués sur vos partenaires. Qu'est-ce que ça vous procure?

Il ferme les yeux et respire fort. Il les ouvre et fixe mes lèvres.

— Je ne ressens rien contrairement à mes partenaires.
— Pourquoi le faites-vous?

Il se mord la lèvre.

— Je peux peut-être vous montrer pourquoi?
— Que voulez-vous dire par me montrer?
— T'entendre crier mon nom avec ta belle bouche. Tu pourrais t'en servir pour me faire de belles choses.

Il essaye de me déstabiliser, il joue avec mes nerfs. Je change de sujet pour la deuxième fois de la séance.

— Prenez-vous votre traitement?
— Vous parlez des antipsychotiques? Il insiste sur le « ique ».
— On va essayer un autre traitement.
— Donnez-moi de la ziprasidone en première intention. Et un anti-vomitif.

Il sourit, il se redresse, il m'observe avec un air autosuffisant. Je regarde son dossier, il est chirurgien.

— Bon la séance a été très fructueuse. D'un ton ironique.
Il se lève et se dirige vers la porte. Je l'arrête.

— Je ne vous ai pas autorisé à quitter la séance.
Il rit et se rassoit docilement.

— Je voulais vous aider à écourter cette petite mascarade.
— Mascarade?
Il sourit.

— Je ne vais pas pleurer dans les chaumières, dire que je regrette, ou que je souhaite changer. Je ne ferai rien de tel. Epargnez-moi vos séances de questions sans intérêt. Vous voulez me soigner? Moi je veux te baiser.

Je le regarde de manière totalement détachée. Je garde contenance, il met à mal mon image. Je perçois en lui une forme de provocation.
Il sait ce qu'il dit, il le dit dans un but précis.

— Nous avons terminé. Vous pouvez partir.

Il se lève et sort avec indifférence. Je reçois mes autres patients, Zak Nevers est en très bonne voie. Il n'a pas eu de rechute depuis onze mois, son traitement est stabilisé. Je fais le lien avec son psychiatre de ville, qui prendra le relais de son suivi en dehors de ces murs. Brian Andrews, tolère très bien son nouveau traitement. Ses troubles délirants ne sont pas réapparus depuis deux mois, il est cohérent.

Je rentre après cette journée assez déroutante. Ce Sean a une personnalité complexe. Il dégage une forme d'intelligence nettement supérieure à la moyenne. Son parcours scolaire est un élément nuisible à son accompagnement médical et psychologique.

Roy est au téléphone avec son ami, il ne m'entend pas ouvrir la porte.

— Ben, arrête de rabâcher toujours la même chose.
Il écoute la réponse.

— Je l'aime. Tu devrais essayer de la connaître. Elle partage ma vie.

Ben lui répond,mais je n'entends pas sa réponse.

— Je me passerai de ta présence.

Je claque la porte pour lui signifier ma présence.
Il se retourne et me gratifie d'un sourire.  Tout le monde dans son entourage désapprouve notre relation.

PSYCHOWhere stories live. Discover now