Chapitre 20

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Le chef de service m'a mis en congé forcé pour la semaine. Je tourne en rond chez Charlie. Les parents de Roy m'ont appelé et laissé des messages menaçant, si je ne retirais pas ma plainte. J'ai bloqué leur numéro, je ne veux plus avoir affaire à eux, ni à leur fils. Je n'ai pas eu de nouvelles de Sean. Dans un premier temps, je ne le contacte pas, mais l'envie était trop prenante.
J'envoie plusieurs  messages mais aucune réponse, je ne comprends pas son ignorance.

Quelques jours plus tard, je reprends le travail, ma vie privée a fait le tour des collègues. En entrant en salle de réunion, tout les regards se tournent vers moi, je crois y percevoir de la compassion. Mais je ne me laisse pas envahir par leurs émotion, je décide d'ignorer, je reste dans ma posture détachée. C'est ce que je sais faire de mieu, laisser couler. Je récupère le compte-rendu des psychanalyses de mes patients que mes collègues ont pris en charge. Je les parcours rapidement et je m'arrête sur celui de Sean. Comme je le prévoyais il refuse d'effectuer sa psychanalyse avec mes collègues. Je finis de ratrapper ma lecture.

Je me rends ensuite dans sa chambre, en ouvrant la porte je constate qu'il n'y est pas. Je me dirige vers la salle de garde et demande à l' infirmier, il m'informe qu'il est au jardin. Je le rejoins, je l'observe au loin, il est dans ses pensées. Je parcours les quelques mètres, ses yeux se posent sur moi.

— Une revenante.
— Bonjour Sean.
— Bonjour docteur.

Il crée une distance en me rappelant ma fonction.

— Comment te sens-tu?
— Comme un cinglé privé de liberté.
— Tu sors dans deux mois.
— Oui. Tu finis ton stage dans 5 mois.
— Oui.
— Et ensuite?
— Je vais travailler dans le cabinet de mon père.
— Ça aussi il te l'impose?

Il lit en moi comme dans un livre ouvert. Avec lui, je ne peux pas tricher, c'est impossible. Je n'arrive pas à déterminer comment il s'y prend. Mais cette pensée est balayée par ma stature de psychiatre.

— On peut dire ça.
— Un jour, tu finiras par couper le cordon.

Cette fois, je suis perturbée. Je ne réponds rien dans les premières secondes. Puis, je me reprends, il tente encore d'inverser les rôles.

— Parle-moi de ta première journée de retour à la vie civile.
— Je vais baiser comme jamais.
Je souris.

— Intéressant. Mais encore.
— J'attacherai sûrement ma « victime ».
— Ah, tu m'en veux?
— Non. Je ne ressens rien. Je réalise un fantasme.
— Tu veux attacher ta prochaine partenaire? Pour combler une frustration.
— C'est une question rhétorique? Je ne savais pas qu'en tant que « psy » tu pouvais poser et répondre à une question.

Je souffle fortement.Il met à mal toutes mes tentatives de lâcher prise, il reste dans son rôle de bon sociopathe. Je me tourne pour partir et je le laisse. Quand il est dans cet état, dialoguer ne sert à rien, il va encore retourner la situation.

Je rejoins Carl le tueur en série, il semble ravi de me revoir dans ses nouveaux appartements. Il m'observe tel un prédateur.
L'infirmier vérifie ses sangles, je peux commencer la séance. Il me parle de son enfance, il est issu d'une famille conservatrice, fils unique avec un père colérique et une mère hystérique. Il a grandi dans un climat anxiogène.

— À partir de quel âge vos pulsions meurtrières sont apparues?
— Six ans.
— Avez-vous torturé des animaux domestiques?
— Oui des chats.
— Avez-vous développé une tendance pyromane?
— J'adorais allumer les feux dans les bois.
— Quel a été votre passage à l'acte?
— Ma petite amie de l'époque s'est refusée à moi.
— Qu' avez vous ressenti?

Il se tait, il cherche ses mots.

— Je me suis senti répugnant, sans valeur.
— Quelle a été votre réaction?
— Je l'ai étouffé et violé son cadavre. Je lui ai enlevé son innocence.
Il ricane.

— Votre premier meurtre?
— Oui Jenny Anderson dans le Massachusetts.
— Bien. Nous parlerons de votre majorité à notre prochaine séance.

Une fois la séance terminée, je me dirige vers la salle de garde. J'y retrouve l'infirmier qui sera avec moi pour la nuit. On commande à manger, les gardes peuvent virer au cauchemar. Je serais seule avec l'infirmier, la nuit sera difficile, nous sommes en sous-effectif. Le début de soirée se déroule paisiblement, l'infirmier fait ses rondes pour donner les médicaments. Je m'occupe d'observer l'écran des chambre quand je reçois un message de Roy d'un nouveau numéro.

— Salope, je vais m'occuper de ton cas. Tu ne te débarrasseras pas facilement de moi.

Je ne réponds pas à sa provocation, je bloque son numéro. Une fois l'infirmier de retour, je fais une ronde, certains sont déjà endormi par les effets des médicaments. J'atterris devant la chambre de Sean, il ne dort pas, il est sur son ordinateur.

PSYCHOWhere stories live. Discover now