Chapitre 29

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Deux semaines se sont écoulées depuis cette scène surréaliste dans ce bloc. Il ne répond pas à mes appels.

Je revois Hope, ma  patiente de sept ans ayant subi un viol par son beau-père. Elle s'ouvre de plus en plus à moi. Elle interagit avec les autres, c'est très encourageant. Ces dessins représentent la même scène. Elle l'améliore en ajoutant un visage au personnage. Elle arrive à visualiser les émotions par couleur, en situation d'hypnose. Je la plonge dans un univers féerique, je lui fais imaginer un  village où elle est la chef. Je lui fais visualiser différentes mises en situation, elle reprend peu à peu confiance.

Après ma journée de travail, je me rends chez Sean. J'ai besoin de comprendre certaines choses. Il m'ouvre et me laisse entrer.

— Qu'est-ce que tu veux, Hailey?
— Tu sais bien ce que je veux.
— Fatigué, je n'ai  pas envie de te prendre.
— Envie?
Il se reprend.

— Tu m'as compris. Tu parles à une personne antisociale.
— Je veux avoir des explications.
— Tu veux quoi comme explication?
— Pourquoi as-tu opéré cette femme en cachette?
— En cachette? Hailey tu es sûr que tu es psy? Je doute de tes compétences.
— Moi aussi, il y a des choses que je remets en question.

Il revêt son air supérieur.

— Tu devrais t'en aller.
— Pourquoi l'as-tu opéré ?

Il souffle.

— Elle me suce comme jamais. Voilà, tu as eu une explication. Dehors!
— Non c'est faux.
— Si tu attends de voir une part d'humanité en moi, tu t'égares.
— Alors dis-moi, pourquoi tu as réparé ce massacre?

Il se tait, il n'en dira pas plus. Je repars, je le laisse à son mutisme, ce n'est pas la première fois qu'il le fait.

Une semaine est passée depuis cette confrontation stérile, il est tard, je regarde un film. Mon téléphone sonne, c'est Sean.

— Oui Sean.
— Rejoins-moi à la clinique. Ne pose pas de questions.

Il raccroche, je suis paniquée. Je me lève et enfile la première chose qui me vient. Je prends ma voiture et fonce vers la clinique. Je l'appelle, il me récupère et me dirige au bloc. J'ai des sueurs froides. Il est  froid, dédaigneux, il est dans une pulsion psychotique. Je le suis et entre dans la salle. Une patiente est déjà endormie, sous perfusion et intubée.

— Tu vas te préparer, on opère.
— Dis-moi ce qui se passe?
— Je t'ai dit pas de questions.
— Bien.

J'enfile une tenue stérile, je frotte avec la brosse stérile mes mains. Il me demande d'insister sur les ongles, je le fais. Je fais attention à ne rien toucher.

— Constante.
— 98 pulsations, tension 14,5, sat 92.
— Les constantes sont au-dessus de la norme.
— Surveille bien l'écran.
— Bien.

Il découvre le ventre de la jeune femme. Elle a subi une abdominoplastie. Les cicatrices sont grossières, son ventre est tout flasque.

— Donne-moi le scalpel et tu changes tes gants.

Je fais ce qu'il me dit, il découpe les tissus de peau endommagés.
Heureusement que j'ai mangé léger, il faut avoir l'estomac bien accroché. Il me demande de  verser de la bétadine en grande quantité. Je le fais et surveille ses constantes. Il continue de découper toutes les peaux infectées.
Ses constantes ne sont pas bonnes au bout d'une heure d'opération.

— 159 pulsations, tension 16,5, sat 88. Son cœur va lâcher.
— Je suture.

Il est en train de couper le fil. L'ordinateur s'affole. Sa tension chute et son cœur lâche.

— Elle est en train de faire un arrêt. Oh mon dieu.
— La ferme. Tu sors si tu n'as pas les épaules pour Hailey!

Elle fait un arrêt.

Il commence le massage cardiaque. Il est concentré. J'amène le défibrillateur et l'allume, il est automatique. J'applique les consignes de sécurité. Il enlève ses mains. Premier choc, le cœur ne repart pas. Le défibrillateur se prépare, il continue son massage.
Deuxième choc, toujours rien, le défibrillateur va redémarrer. Il se saisit et injecte une seringue d'adrénaline en intraveineuse. Le défibrillateur choque , son cœur repart. On attend que les effets anesthésiants se dissipent et je vais l'extuber.
Il lui passe un masque, la nettoie et lui pose des pansements.

Je m'effondre en larmes, je n'arrive pas à gérer ce genre de pression, lui est imperturbable. On amène la patiente dans une chambre. Il l'ajoute dans le fichier d'hospitalisation, les infirmiers vont surveiller son réveil.  On entre dans son bureau, je m'écroule au sol. Il me suit, on ne parle pas. Je pose ma tête sur son épaule, sa tête est baissée.

— Qu'est-ce que tu ressens?
— Rien comme à chaque fois. Et toi?
Première fois qu'il me demande mon ressenti.

— Comme une psy qui assiste un sociopathe chirurgien pour une opération clandestine.
Il ricane.

On rentre chacun de son côté.

PSYCHOTempat cerita menjadi hidup. Temukan sekarang