8. Derrière la montagne 3/4 (réécrit)

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L'auberge était tenue par un couple jovial. Une table en bois parcourait la salle à manger. Quinze personnes pouvaient s'y asseoir, seize si cette dernière ne craignait pas la chaleur du feu dans l'âtre. Tiam, Meadow, Viola, Anna, Garrett, Malty, Lieu et Luiset étaient en forme après ce voyage plus reposant que la veille. Puis ils s'habituaient déjà au rythme. Ils prenaient tous un verre, pendant que la marmite mijotait sur le feu, lorsque quelqu'un frappa.

– Voici nos deux derniers compagnons de route ! Veuillez bien taire l'incident pour ne pas les faire fuir, requit Garrett.

Anna Grimsey tordit son cou pour ne pas rater l'entrée des nouveaux passagers.

– Nous allons être à l'étroit, chuchota-t-elle à sa nièce en se remémorant la banquette où elle avait pu allonger ses jambes l'après-midi même.

– D'après monsieur Totter, la diligence pourrait en accueillir encore trois. Ne t'inquiète pas, Na.

Les appréhensions d'Anna se calmèrent lorsque leur identité fut révélée. Chiévée de Fueller était duchesse et voyageait avec son jeune fils, Antoine. Il n'avait pas encore dix ans et semblait calme et poli. Après de rapides salutations, Tiam Nuegill se décala d'une place pour qu'ils puissent s'asseoir ensemble à table. Dans un bruit d'étoffes, Chiévée dégrafa son manteau qui libéra une robe sublime mais encombrante et des bijoux étincelants.

– Prenez garde à vos colliers et boucles, lui intima Viola Spralt. Si nous sommes surveillés par des bandits, ils auront vite fait de le remarquer.

Le parfum d'essences florales fit grimacer le jeune Antoine.

– Je n'ai jamais été détroussée depuis que nous voyageons en diligence, répliqua-t-elle.

– Nous pourrions être surveillés par des bandits ? demanda Anna à Garrett, d'une petite voix paniquée.

– Bien sûr que non, mentit-il, madame Spralt a sûrement connu une mésaventure, mais quoi qu'il arrive, nous sommes là pour vous protéger.

L'apprenti se permit de montrer le mousquet dissimulé à l'intérieur de sa veste.

– Bon... Mademoiselle Luiset, laissez-donc un peu monsieur Jame tranquille.

– Elle ne me dérange pas, madame Grimsey.

Luiset s'imaginait lui tirer la langue. Cette pensée la fit pouffer au nez de sa tante qui, décontenancée, répliqua :

– Des fois, vous me faites peur, mademoiselle Luiset.

De l'autre côté de la table, Malty, ragaillardi par quelques rasades de whisky, s'adressa à Viola Spralt :

– Et donc, que va faire une belle femme comme vous au Mont ?

– J'amène des fleurs pour les jardiniers de l'abbaye, répondit-elle moins chaleureuse et bruyante qu'à l'accoutumée.

– En tout cas, vous êtes bien jolie...

– Merci Malty, répliqua-t-elle avec froideur.

Comprenant qu'il ne lui faisait aucun effet, il se tourna vers Lieu qui dormait, la joue en fragile équilibre sur son poing.

– Lieu, oh ! Je te prends au bras de fer. Bois cul-sec quand t'auras perdu ! 

Luiset Madison (Trilogie)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant