25. L'attente 1/3 (réécrit)

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– Mais si tu entends les loups-mât, reste chez toi ! dit un garçonnet tout crotté.

Luiset évita les deux enfants qui jouaient à s'attraper dans les ruelles pavées. Ils bousculèrent même un commerçant qui rouspéta en levant le poing. Le beau temps et l'animation des rues instillaient de meilleures pensées dans l'esprit tourmenté de la jeune femme. Luiset avait tenu à remercier la dame qui lui avait donné une robe. Sans crinoline, ni corset, elle permettait de voir qu'elle avait déjà les formes d'une femme. Ses longs cheveux tressés descendaient jusqu'au jupon bleu et le simple maquillage la rendait plus belle qu'elle ne l'avait jamais été. Après avoir été accueillie comme une reine dans la maisonnée de sa bienfaitrice, elle décida de remonter pour proposer une promenade à Garrett et Viola. Elle les retrouva tout deux assis dans la grande salle de l'abbaye, près de l'âtre noyée de cendres.

– Comment allez-vous, mademoiselle Luiset ?

– Très bien, merci. M'accompagneriez-vous pour une balade ?

– Bien sûr, dit l'apprenti en se levant.

– À vrai dire, je dois voir frère Maynard à propos du jardin, dit Viola non sans avoir lancé un regard entendu à Garrett.

– Ah, mais oui, dit-il, madame Spralt me disait qu'elle était attendue.

Garrett et Luiset se trouvaient dans l'atelier du souffleur de verre. Sorti du creuset, le verre en fusion se métamorphosait sous leurs yeux. Ils s'extasiaient devant le vase coloré qui prenait forme au bout de la canne du maître verrier.  

– Superbe, mais alors quelle chaleur ! dit Luiset en sortant de l'atelier avec un vase-bulle sous le bras.

Elle accepta le mouchoir que Garrett lui tendait pour s'essuyer le front.

– Si nous allions dans la baie ?

Malheureusement, ils furent arrêtés par les gardes à l'entrée du Mont :

– Nous sommes désolés, mais nous avons des ordres, mademoiselle Madison. Interdiction de sortir de l'enceinte. Pas vous, monsieur Jame, vous pouvez.

– Je suis prisonnière, tête de pioche ? demanda-t-elle, agacée.

– C'est pour votre sécurité, mademoiselle.

– Ma sécurité ?

– Il y a...

– Ne dis rien ! dit le garde à son acolyte.

– La baie est dangereuse ? demanda Garrett.

– Oui... c'est ça... les courants, les marées... c'est une période très... c'est dangereux...

– Mais donc, moi, je peux y aller, après tout, l'apprenti peut bien mourir ! éructa Garrett.

Il s'arrêta devant l'air grave de Luiset. Elle réfléchissait, déconnectée, perdue dans le vide. Puis soudain, elle lui prit le bras et courut dans les ruelles.

Luiset Madison (Trilogie)Where stories live. Discover now