2. Tombée du ciel 1/3

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– Monsieur le Comte... quelle est cette chose dans le ciel ?

Philbus d'Agues avait passé sa tête par la fenêtre et gardait ses yeux ouverts, plus ronds que des assiettes. Le cocher aussi avait remarqué. Il avait arrêté la diligence. Le Comte n'eut d'autre choix que de se réveiller, son compagnon de voyage tirait sa manche.

– Philbus, que me voulez-vous encore ? grogna-t-il. Pourquoi les chevaux n'avancent plus ?

– Regardez monsieur, mais regardez !

Le jeune duc avait le teint d'une aubergine défraîchie. Sa manière de s'adresser avec si peu de cérémonie au Comte réveilla ce dernier tout à fait. Le visage du cocher s'inséra dans la fenêtre. Il semblait chercher ses mots et son regard arborait la même lueur de panique que Philbus.

– Il y a une... bourse qui vole dans les nuages... finit-il par dire.

Le Comte regarda le cocher, puis tourna la tête en direction de son confrère, ou plus exactement du fessier ducal puisque Philbus d'Agues s'était levé de son siège pour se hisser plus haut à travers l'ouverture. 

– Vous m'en chantez des fables ! Une bourse ?

Il sortit prestement de la voiture et le duc suivit son exemple. Philbus alla se percher sur le siège du cocher.

– Mais...

– Vous voyez ! Vous voyez ! Vous voyez ? criait-il de plus en plus fort.

– Mais bien sûr que je vois ! C'est ... c'est...

– De la sorcellerie ?

– Allons, Duc, de la sorcellerie... Vous vous croyez à l'âge des Anciens ? Vite, amenez ma longue-vue !

Philbus d'Agues fut si rapide que la lunette atterrit dans les mains du Comte avant que le grand homme n'eut pris place sur le siège du cocher.

– Extraordinaire... Un ballon volant... oh... il y a une femme...

Il n'eut bientôt plus besoin de regarder à travers la lunette puisque l'objet en question commençait à descendre.

– Une sorcière, je vous dis, une sorcière !

– Oh ! Les flammes de l'enfer conduisent cette bourse ! Elle se rapproche de nous !

Les trois hommes étaient terrorisés. Le Duc d'Agues courut à la voiture et sortit un mousquet de sous la banquette.

– On ne sait pas ce que ça peut faire ! lui dit le Comte. Mais allez-y, vite !

Le duc pointait en tremblant des pieds à la tête.

– Oh, donnez-moi  ça !

Il ne se fit pas prier et passa derrière le Comte prêt à faire feu. Le deuxième tir atteignit sa cible. C'était comme si cent siffleurs jouait de leur bouche. La toile perdait son souffle, se déformait. Le ballon descendit alors de plus en plus vite mais la jeune femme eut le temps de se réceptionner pour amortir la chute. Lorsque la nacelle toucha le sol, elle se renversa. Le tissu rouge et noir recouvrit l'herbe comme une couverture géante.

– Ne bougez pas ! cria le cocher.

Luiset Madison (Trilogie)Where stories live. Discover now