13. Le relais de chasse 4/4 (réécrit)

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Luiset s'enfouit sous les couvertures et souffla la flamme de la bougie, détruisant son ombre sur le mur.

Elle rêva de son père.

Il lui demandait de le rejoindre au Mont, le plus rapidement possible. Sa voix caverneuse augmentait l'impression d'inaccessibilité. Elle courait sur la plage et la silhouette d'Arsène s'éloignait. Elle se mit à courir plus vite, ressentant la douleur des muscles tétanisés de ses cuisses immobiles. Enfin, elle put le voir de plus près. Mais chaque fois qu'elle tendait sa main, il partait plus loin. Elle le regardait s'éloigner lentement vers une montagne. Elle voulait le rattraper mais ses jambes étaient lourdes comme la pierre et douloureuses. Luiset appela son père mais le vent et la mer couvraient tout. Il s'effaçait un peu plus, indifférent. Elle s'acharnait à bouger ses jambes mais dans l'effort, elle serra la mâchoire et toutes ses dents tombèrent.

– Papa !

Anna vint au chevet de sa nièce, trempée de sueur. Un pâle rayon de lune éclairait ses traits horrifiés.

–  Chut, mon petit, ce n'est qu'un cauchemar.

Elle essuya ses larmes et berça la jeune femme dans ses bras.

– Oh, Na...

– Tout va bien, mademoiselle Madison.

Elle consola plusieurs minutes la jeune fille. Sa respiration redevint calme et la sensation de peur avait presque disparu.

– Oh, Na, c'était horrible ! Si tu savais !

– Dormez, mademoiselle Luiset, il est tard.

Elle resta encore quelques minutes, attendant que le sommeil l'emporte. Dehors, les branches dansaient sous le souffle du vent. Puis deux chouettes se répondirent. Anna se leva pour ouvrir la fenêtre :

– Ouste, ouste !

Ses grands gestes inutiles n'eurent pour effet que de faire tomber son bonnet. En voulant le rattraper elle manqua de passer par-dessus la traverse.

– Ouuuuh ! Luiset !!!

Sa nièce se précipita vers elle pour la relever par les jambes. Sa tante avait un air ahuri et ses cheveux étaient tout ébouriffés.

– Tu veux passer par-dessus bord, Na ?

– Ne riez pas ! J'aurais pu me tordre le cou !

– De cette hauteur et dans les feuilles, je ne pense pas !

– Un verre d'eau ! dit-elle en toussant.

– Tu es drôle, tu sais ?

Anna but une gorgée, puis une autre et recoiffa sa tignasse avec ses mains du mieux qu'elle put. Elle déclara d'un ton sec en reposant la cruche avec fracas :

– On dort !

Elle voulut se recoucher, soulevant la couette comme montée sur ressort. Mais dans la précipitation, elle glissa sur le lit et se retrouva les fesses sur le plancher, provoquant à nouveau l'hilarité de sa nièce.

– Si les Grimsey nous voyaient...

Luiset Madison (Trilogie)Donde viven las historias. Descúbrelo ahora