Tome 3 : Protège-moi

41 Froger

— Tu vas enfin me dire ce qu'il s'est passé Arthur ! me demande ma mère en se garant devant notre garage.

Je baisse la tête en regardant mon sac à dos qui est posé sur mes genoux. 

— J'aime pas le collège... Tout le monde se moque de moi.

— C'est un mauvais moment à passer mon chéri, fait doucement ma mère en passant sa main dans mes cheveux tendrement. Pourquoi tu sèches les cours ?  

Je déteste ça, dès que j'arrive dans la cour on se moque de moi parce que je suis petit, que j'ai des crises d'angoisse. Je n'ai pas d'amis, même les professeurs font comme si je n'existais pas. Le groupe des populaires m'a encore une fois humilié devant des centaines d'élèves. Je déjeune tout seul dans un coin pour dessiner mais ce midi ils sont venus pour me pousser et s'amuser avec moi, je suis tombé par terre et mon bras a râpé tout le bitume. J'étais tétanisé en voyant du sang couler, j'ai pleuré comme un bébé et ils ont rigolé encore plus fort en me prenant en photo. J'ai des frissons rien qu'en repensant à tout ce sang, j'ai peur du sang. 

— Maman, j'ai plus envie d'y retourner. 

Je me suis enfuie en courant, le visage rempli de larmes et j'ai passé le reste de la journée en ville, devant un salon de tatouage. Je me suis assis par terre devant la vitrine et j'ai sorti mon cahier pour reproduire les œuvres qui étaient exposées. J'aimerai faire ce métier plus tard. Je ne sais pas pourquoi mais je trouve ça incroyable. Mais mon père a dit que je ferais comme lui, que j'ai pas le choix, j'irai travailler dans sa boucherie. Il emmène toujours avec lui quand il veut me punir, il me force à regarder toutes les bêtes pendant qu'il les découpe. Je ne dois pas fermer les yeux quand je vois tout le sang sur la table. À chaque fois je m'accroche à la chaise en le suppliant de me laisser partir mais il n'écoute pas alors je finis par vomir et il me punit avec sa ceinture quand on rentre. 

— Tu n'as pas le choix Arthur, dit ma mère en ouvrant sa portière. Je ne peux pas te conduire à l'autre bout de la ville sinon je ne serais jamais à l'heure. 

J'ouvre la porte sans répondre en regardant la voiture de mon père. J'avance dans l'allée avec l'estomac noué en suivant ma mère qui ouvre la porte de notre maison. Elle se regarde dans le miroir de l'entrée en détachant ses cheveux blonds, je la regarde sourire alors que ses yeux sont tristes. Je n'ai jamais vu ma mère heureuse, pas comme toutes les mamans qui viennent chercher leurs enfants à la sortie de l'école. Je serre mon sac contre mon torse quand j'entends la voix de mon père. Il est affalé dans le canapé, en slip et tee-shirt à regarder la télévision. Je me dépêche de monter dans ma chambre en espérant qu'il ne m'appelle pas. J'espère que ma mère ne va rien lui dire, j'ai encore mal dans le dos, il y a deux jours il m'a punie parce que j'avais pas bien lavé sa voiture. Je passe devant la porte de mon grand-frère, lui aussi il m'ignore alors que j'ai besoin de lui quand mon père me fait des choses horribles. Avant on était proches mais il devient un homme, il a 18 ans maintenant et il a besoin d'être tranquille. Pas comme moi, j'ai 14 ans et je suis un faible. Je m'enferme dans ma chambre en me dépêchant de faire mes devoirs.

***

Je suis enfermé dans mon armoire en serrant ma peluche contre moi, tous les soirs je lui demande de me donner du courage quand j'entends ma mère crier. J'ai mal au ventre et j'ai dû mal à respirer parce que je sais qu'elle aussi a peur. Elle dit toujours qu'il ne fait pas exprès mais je sais qu'elle ment. Une fois je suis descendu pour l'aider mais ça a été pire. Mon père lui a cassé le bras avant de me frapper encore plus furieusement parce que je ne devais pas être là. Ma mère s'est mise entre nous en pleurant alors je suis vite repartie me cacher et le lendemain je lui ai promis que je ne viendrais plus les déranger. Je me balance sur moi-même en bouchant mes oreilles mais j'entends très bien les sanglots de ma mère et les coups de mon père.