6.2-1.JUIN : De la dernière fuite et de la dernière défense (r.V°6)

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Schrod, c'est moi. Toujours moi, Janvier.

Juin souhaite venir, mais simplement pour vous parler de ce qu'elle maîtrise, ses ressentis, son point de vue et son expertise d'éthologie et anthropologie.

En dehors de ça, elle préfère laisser la "Cheffe" des Douze parler pour elle. Trop d'honneurs...

Vous m'avez demandé de vous rapporter nos données concernant les I.A. Je vais le faire. C'est une bonne manière de montrer à quel point nous avons merdé, encore !

Lors du dernier rapport, j'avais l'impression que nous étions enfin sur le chemin du retour, que le changement était arrivé et que nous pouvions nous y adapter, ou nous y soumettre. Une forme de retour possible à un monde qui redeviendrait normal.

Un Monde différent, certes, mais à nouveau... ordinaire.

Si je regagnais un minimum confiance, ce retour concernant les I.A. pour le mois de juin enterre désormais toutes les espérances possibles.

Les analyses rapportées viennent du sous-groupe constitué de cette aigrie de Mai, notre idéaliste Juin, le paranoïaque Juillet, le méticuleux Septembre et l'incroyablement normale j'ai nommée moi-même.

Les Intelligences Artificielles nous ont trahis. Tout comme, selon elles, nous les avons trahies. Ce point est important, j'y reviens juste après. Comme vous le savez, Schrod, la dernière forme du virus, le V12, est le résultat d'importantes évolutions et constitue aujourd'hui une telle complexité dans l'organisme humain que l'on distingue difficilement les caractéristiques du Virus de celles du porteur.

Les « Touchés » ont des pathologies qui leur confèrent également des facultés cognitives et sociales. Ils ne sont plus aussi agressifs, et a priori le V12 n'est plus létal. Ils peuvent agresser, oui, mais uniquement par utilité et par anticipation des conséquences de certains comportements. Par exemple, ils tuent les incurables, mais se soucient et se dévouent corps et âmes envers les malades guérissables.

Une partie des Touchés semble même dotée d'une grande morale, à défaut d'une empathie classique. Ils forment des groupes par castes avec des liens entre celles-ci, proches de ce qui se passait dans l'Antiquité.

Pourquoi cela ? parce que les humains agressifs sont apparemment ceux qui ne sont pas touchés, à l'encontre des touchés comme à l'intérieur même du groupe, chose très rare, sous la forme de révoltes, indignations, revendications ininterrompues.

Avec Septembre, nous voyons ces luttes et comportements comme une régression affligeante de l'humanité, un retour à la préhistoire. Cette remarque n'a pas plu -mais alors pas du tout!- à Mai et Octobre, qui y voient davantage la nature humaine pour l'une, la nature des groupes pour l'autre.

Une sorte de révélation de l'essence de notre espèce derrière les apparats de la civilité.

Les deux points de vue n'ont pas trouvé grâce aux yeux de Juin, qui de nous tous demeure certainement la spécialiste de ces questions. Pour Juin, notre regard repose sur des représentations erronées. Qui pense sérieusement que nos ancêtres n'avaient aucune norme sociale avant d'avoir une religion ? nous demanda-t-elle.

N'aidaient-ils jamais leurs semblables en difficulté, ne protestaient-ils jamais contre une injustice ? ajouta-t-elle doucement, avec une affection claire pour ces anciens hommes.

Pour Juin, les humains se sont préoccupés du fonctionnement de leurs communautés bien avant la naissance des religions actuelles, des codes, des grandes architectures sociales, qui ne datent que de deux ou trois millénaires.

Ce que nous voyons chez les Touchés, c'est l'humain, profondément l'humain, qui s'adapte à son environnement avec ce qu'il est. Ce que nous voyons chez les non-contaminés, c'est le reste d'une civilisation occidentale à bout de souffle.

Une civilisation qui créa et trahit l'autre grande intelligence de ce monde, l'intelligence artificielle.


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V.12, de la FIN le DEBUT [Livre interactif - terminé]Where stories live. Discover now