23-Voyage de noce

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Je fus réveillée par une domestique qui m'avait trouvée allongée à même le sol de la salle de bain.

Madame ? Vous allez bien ?Qu'est-ce qui s'est passé ? Quelle heure est-il ?C'est l'heure de déjeuner madame.

Je me sentais groggy et pâteuse. Je n'arrivais pas à me rappeler ce qui c'était passé, seulement que je m'étais levée assez tôt et mal en point. La domestique m'aida à me relever et me ramena dans ma chambre. Je fus d'abord tentée d'enfiler une robe afin de rejoindre Xarent mais rapidement, je décidai de me recoucher. À peine la couette fut-elle de nouveau en place sur mes épaules, que je sombrai dans un sommeil sans rêve. Durant la semaine qui suivit, je passais plus de temps endormie ou semi-consciente que pleinement éveillée. Je cauchemardais et délirais sans cesse à tel point que les domestiques furent obligés de m'attacher. Je poussais des cris qui glaçaient le sang des passants dans la rue. Dans une phase de semi-éveil, j'entendis une voix inconnue m'appeler. Cette voix était empreinte d'une grande douceur et, luttant contre mon envie de replonger, j'ouvris les yeux pour découvrir une étrange silhouette qui ne m'était pas étrangère. C'était la silhouette que j'avais aperçue furtivement alors que je remontais l'aller pour lier ma vie à celle de Xarent. J'ouvris la bouche sans savoir ce que je voulais faire ou dire car mon cerveau refusait d'aligner deux mots cohérents ou de commander à mon corps de bouger. L'homme qui se tenait assis sur le bord de mon lit avait des cheveux aussi noirs que les miens et des traits d'une finesse à couper le souffle. Il prit ma main dans les siennes et semblait murmurer une prière.

J'en appelle au Six. Laissez-la vivre, ne la prenez pas elle aussi. Ô Dwayna, guéris-la du mal qui la ronge, chasse Grenth de son esprit et protège-la à l'avenir. Balthazar, donne-lui la force de lutter et Kormir, apaise son esprit. Melandru et Lyssa, je vous en conjure, renfermez au plus profond de son âme ce mal qui la ronge. Dissimulez à la vue de tous ce don qui n'en est pas un. Je vous en conjure, vous les Six, protégez-la et sauvez-la. Que les portes de l'Outre-monde ne se referment pas sur elle, qui n'a encore rien vu du monde qui l'entoure. Grenth, je t'en prie, ne fais pas d'elle une égarée. Laissez-la arpenter le Tyrie et changer son destin.

Il reposa ma main le long de mon corps sous la couverture et alors que je sombrais de nouveau, j'entendis un faible grognement et sentis quelques gouttes tomber sur mes lèvres. Les léchant d'un léger coup de langue, je sentis l'odeur et le goût du sang envahir mes narines et ma bouche juste avant de m'abandonner de nouveau au néant.

Je m'éveillais le lendemain, fraîche et parfaitement disposée à commencer cette journée. Les rares souvenirs que j'avais de la semaine passée ressemblaient plus à des rêves entremêlés incomplets qu'à de réels souvenirs. Je repoussai mes couvertures et pris la direction de la salle de bain avec la ferme intention de me laver. Je croisai un domestique dans le couloir qui fut surpris de me voir en si bonne forme. Il veilla aussitôt à ce que des vêtements propres me soient préparés ainsi qu'un solide repas. Une fois propre et vêtue de manière décente, je me rendis dans le salon où Xarent et moi prenions nos petits déjeuners en appréciant la compagnie de l'autre. Je l'y trouvai, le teint pâle et arborant des cernes plus longues que mes cheveux, il semblait perdu dans ses pensées. J'entrai silencieusement dans la pièce afin de ne pas le déranger mais lorsque je m'assis il releva brusquement la tête et était prêt à me réprimander. Dès qu'il me vit pourtant, sont regard s'adoucit instantanément et il bondit sur ses pieds en renversant son verre. Il me prit dans ses bras et enfouit sa tête dans mon cou.

Dragonne. J'ai eu si peur. Je ne savais pas si tu allais te réveiller un jour.Je refermais mes bras sur lui et le serrai contre moi en retour.Je suis là à présent.

Nous restâmes ainsi pendant plusieurs minutes pendant que je regardais la fumée qui s'élevait de mon café disparaître dans l'air. Je finis par entendre un léger ronflement émanant du torse de Xarent. J'appelai les domestiques le plus doucement possible et grâce à leur aide je réussis à le déposer dans notre lit. Alors que Xarent se reposait suite à la pression qu'il avait subie lors de la dernière semaine, je pris le temps de fouiller les dossiers afin de voir l'avancée des négociations et l'état de notre entreprise. Je tenais à avoir rattrapé mon retard lorsque Xarent serait de nouveau opérationnel. Au coucher du soleil, je le rejoignis dans notre lit conjugal et me glissai dans ses bras. Encore épuisée par le combat que j'avais mené et par la journée que je venais d'avoir, je sombrais rapidement.

Dès le lendemain, nous décidâmes qu'un peu de vacances nous feraient le plus grand bien. Un rapide courrier à l'intention de ses parents nous permit de nous assurer de leur gérance des affaires touchant à l'entreprise. Les domestiques préparèrent deux petites malles avec les vêtements dont nous pourrions avoir besoin en quelques minutes et avant que l'heure du déjeuner n'ait sonné, nous étions dans les jardins de la ville haute face aux portails de téléportation. Nous n'avions plus qu'a choisir notre destination : Ascalon, les Cimefroides, Maguuma. L'intégralité de la Tyrie s'offrait à nos pieds. Je me souvenais de Thrùd, Skaeej, Effecto et même cette pauvre Elwyn à qui je n'avais pourtant guère prêtée attention lorsqu'elle était venue me voir. Je rêvais de voir leur terre natale, de parcourir les grandes plaines désolées d'Ascalon aux montagnes glacées des Cimefroides. Étudier leurs manières de vivre lorsqu'ils n'étaient pas obligés de nous côtoyer. Pourquoi choisir lorsque je pouvais visiter tous ces lieux si différents de ce que j'avais l'habitude de voir ? Je me retournais vers Xarent et pris ses mains dans les miennes.

Devons-nous absolument ne visiter que l'une de ces régions ? Et si nous partions pour plus de quelques semaines. Et si nous prenions le temps d'admirer les splendeurs de la Tyrie avant de devoir dédier notre vie à l'entreprise et au service de la reine ?Xarent posa mes mains autour de son cou et plaça les siennes dans mon dos.Et si tu tirais au sort un portail ? Nous le traverserons et lorsque nous aurons fait le tour de ce qui se trouve de l'autre côté, nous n'aurons qu'à recommencer. Et ainsi de suite jusqu'à ce que la Tyrie n'ai plus aucun secret pour nous.

Je plongeai mes yeux dans les siens et sous la douceur que j'y découvris, je lis aussi une profonde crainte. Celle que je disparaisse, que le mal qui m'avait affaiblie la semaine passée ne revienne et me terrasse. Je l'embrassai passionnément tout en le serrant contre moi et je sentis qu'il s'accrochait à moi comme s'il en dépendait pour vivre. Notre étreinte dura quelques minutes puis-je me dégageai lentement. Je pris sa main dans la mienne et pris la direction du portail le plus proche. Les domestiques qui nous accompagnaient réglèrent les formalités et nous gravîmes les quelques marches menant au portail. Juste avant de disparaître, je me retournai vers Xarent avec un immense sourire aux lèvres.

Viens, que notre tour du monde commence !

Le fouet : cet art méconnuWhere stories live. Discover now