39-Meurtre...

20 3 0
                                    

À deux ans et demi, Danika Vasburg Aura était une enfant magnifique. Elle combla amplement le vide que Xarent et moi commencions à ressentir avant sa naissance et grandit dans l'amour et l'opulence. Elle était notre fierté et nous emplissait d'une joie immense. Mais un jour, que nous nous promenions dans la campagne avoisinant le Promontoire, Danika chuta et ne se releva pas. Je la fis transporter chez nous de toute urgence et fis immédiatement venir un moine. Il l'ausculta durant de longues minutes mais ne sut dire de quel mal elle souffrait. La reine apprit sa chute et nous envoya le moine officiel de la cour mais il resta lui aussi sans voix. Les jours passèrent et nous fîmes venir des moines de toute la Tyrie. Nous allâmes les chercher sans cesse plus loin. Ils vinrent de toutes les contrées et furent de toutes les races mais aucun d'entre eux ne put nommer le mal qui la rongeait. Certains vinrent du fin fond des contrées de la jungle de Magumma et d'autres des Îles de Ventesables. Ils défilèrent devant le corps de Danika qui s'affaiblissait de jour en jour. Malgré nos prières et nos offrandes, nul ne réussit à l'aider ou même à savoir de quoi elle souffrait. Tous les moines ne nous proposait qu'une seule et unique solution, apaiser les souffrances de Danika et la laisser mourir. Depuis plus de 6 mois, Danika souffrait jours et nuits. Sa fièvre n'augmentait ni ne s'affaiblissait. Son pauvre corps devenu squelettique était couvert de sueur. Désespérés, Xarent et moi commencions à perdre espoir. La venue des Six, la nuit où je m'étais enfuie me revint en mémoire. J'avais pensé que Kormir m'offrait un choix alors qu'en réalité, elle me montrait le futur. J'en voulais au Six de ne pas savoir s'arrêter de s'acharner sur mon destin. Je passais mes journées à maudire les Dieux et à éponger le corps de Danika. La présence que j'avais sentie tout au long de ma vie revint. Un jour que j'avais laissé Danika quelques minutes, j'entendis une voix masculine dans sa chambre. Je ne compris pas ses paroles et lorsque je pénétrai dans la chambre, je découvris un homme encapuchonné à son chevet. Dès que je fis un pas dans la chambre il disparut par la fenêtre. S'il revint les jours qui suivirent, je ne le revis plus. La respiration de Danika commençait à être faible et saccadée. Sa poitrine se soulevait à peine et avec une grande difficulté. Nos espoirs de la voir un jour se rétablir avait disparu quelques jours plus tôt et nous ne cherchions qu'à réduire ses souffrances. Un jour, un Asura que j'avais rencontré des années auparavant, se présenta à nous alors que le soleil venait à peine de se lever.

- Bonjour Dragonne. Je suis Ckim. Nous nous sommes rencontré quand tu étais toute petite. Je n'ai pas pu venir plus tôt car après notre rencontre, je suis parti visiter la Tyrie. Ignis a eu beaucoup de mal à me retrouver. Mais je suis là à présent.

D'abord étonnée de le revoir, je me remémorai rapidement pourquoi je l'avais rencontré.

- Ckim. Ckim le revenant.Je suis heureux que tu te souviennes de moi. Ignis m'as contacté peu après que ta fille soit tombée malade. Je suis désolé de ne pas être arrivé plus tôt. J'aurais pu t'empêcher bien des inquiétudes.Tu sais de quoi elle souffre ?Pas de quoi. Mais pourquoi, elle souffre. Du moins, je pense le savoir. Je peux la voir ?

Xarent hocha la tête avant que je ne réponde. Il guida Ckim jusqu'à notre fille, étendue dans son lit, rachitique et respirant avec difficulté. L'asura se plaça au chevet de Danika. Il l'examina scrupuleusement pendant de longues minutes en hochant la tête et marmonnant quelques paroles incompréhensibles, pendant que Xarent me serrait contre son torse. Puis Ckim se tourna vers nous.

- Combien de moines a-t-elle vu ?

J'interrogeai Xarent du regard. Combien de moines avions-nous appelé et combien en avions-nous vu défiler dans cette chambre ?

- Je ne sais pas. Beaucoup trop.

Xarent resserra son étreinte autour de mes épaules et prit la parole d'une voix plus triste que d'habitude.

- Quatre-vingt-six. Elle en a vu quatre-vingt-six.

Le regard de Xarent se voila alors qu'il informait Ckim. Quatre-vingt-six moines et tous avaient eus la même réponse. Ckim représentait notre dernière nuance d'espoir. Mais que pourrait-il nous répondre d'autre ?

- Et aucun d'eux n'a su vous aider ?Aucun.

Ckim plongea son regard dans le mien. Il approcha de moi et prit mes mains dans les siennes.

- Dragonne. J'ai une solution. Mais avant que tu t'énerves laisse-moi t'exposer mon plan en entier.

Intriguée par sa proposition, je hochai la tête, redoutant qu'il partage l'avis de ces inutiles.

- Quoiqu'il arrive, ta fille va mourir. Mais il existe un moyen de la sauver. Et je peux l'y aider. Malheureusement, pour que je puisse l'aider. Danika doit mourir rapidement et pas de mort naturelle. Je vais devoir la tuer. Mais je ferai tout ce que je peux pour te la ramener. Tu dois comprendre qu'il existe une chance qu'elle ne revienne pas.

-Je lâchai les mains de Ckim et le giflai de toutes mes forces.

- Tu oses te présenter comme une alternative juste pour pouvoir me proposer de tuer toi-même ma fille ? Tu n'es qu'un être abjecte.Je te le jure. C'est la seule solution.Sors de chez moi !

Xarent n'avait pas dit un mot depuis que Ckim avait posé son diagnostic. Je me retournai pour lui faire face, ahurie devant son manque de réaction.

- Tu ne dis rien. Tu voudrais laisser notre fille mourir ?Tu as entendu Ckim ?! On n'a pas vraiment le choix. Elle souffre et nous n'y pouvons rien.Je ne le laisserai pas la tuer.

Alors que je m'apprêtais à pousser Ckim hors de la chambre de Danika, Xarent me plaqua contre un mur.

- Ckim. Sauve ma fille.

Il me maintient fermement et avant que je ne me rende compte de ce qu'il se passait, Ckim dégaina une petite dague et poignarda Danika. Je hurlais de douleur alors que le couteau volait les derniers instants de vie de ma petite fille. Je n'avais pas été une mère exemplaire au début mais j'avais fini par l'aimer. Ckim n'en resta pas là, il recommença et recommença. Il perfora le cadavre encore chaud de ma fille six fois de suite. Xarent continuait de me tenir fermement contre le mur, m'empêchant ainsi de déranger Ckim. Alors que je luttais dans les bras de Xarent, il s'agenouilla à côté du corps sans vie de Danika. Il commença à réciter une formule incompréhensible. Je crus entendre le nom des Dieux mais à quoi bon prier ces entités, alors qu'elles s'acharnaient sur mon destin. La tête de Ckim bascula vers l'arrière et ses yeux se révulsèrent. Je sentais mon cœur se déchirer et des barrières dans mon esprit cédèrent. Je fus submergée par une soif de sang. Une intarissable soif du sang de ce Ckim. De ce meurtrier. Il resta dans cette position pendant des minutes qui me semblèrent durer une éternité. Je frappai Xarent de toutes mes forces, le maudissant d'avoir aussi facilement accepté de tuer notre fille. Ckim se tut, et surprise par le silence que cela créa, je me tus à mon tour. Un silence de mort s'abattit sur la chambre. Xarent ne me lâchait toujours pas, comme si la pression de nos corps était la seule chose qui le maintenait encore debout. Il ne se déconcentra pas et Ckim revint à lui. Il se releva, les mains encore couvertes du sang de Danika et nous lança un sourire satisfait.

- Espèce d'enflure !

Le fouet : cet art méconnuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant