vingt-trois

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J'ai une obsession en ce qui concerne le lavage de mes mains.

Ce n'est pas que j'ai une phobie des microbes ou quoi que ce soit. Est-ce que j'aime ranger et dépoussiérer ma chambre et désinfecter mes affaires de temps en temps ? Oui, mais je n'en fait pas une manie. Ce n'est pas comme si mon monde allait s'écrouler si tout n'était pas propre. Enfin, à part mes couverts, verres et assiettes, eux doivent être propres. Mais je m'écarte du sujet.

Le problème de mes mains a commencé récemment, mais ç'a été un grand sujet d'inquiétude dans la famille. Surtout depuis que je passe beaucoup de temps dans la salle de bain.

Ça a commencé avec dix secondes. Mais un jour, avant que les cours ne se terminent, j'avais eu une très mauvaise journée, et je m'étais rendu au lavabo des toilettes de l'aile scientifique pour me passer les mains sous l'eau chaude pendant dix minutes. Elles étaient sèches, rouges et douloureuses après ça, mais c'est devenu une habitude quand j'étais contrarié.

Cette contrariété a commencé à apparaître plus souvent qu'elle n'aurait dû. Elle était plus présente qu'absente. Et comme tout le reste, c'est devenu une habitude.

C'est pour ça que je me tient devant le miroir maintenant, à la huitième minute de mon lavage de mains avec les infirmiers qui me regardent. Je suis presque sûr qu'ils sont habitués à ça maintenant, mais c'est tout de même énervant.

Aussi fatiguant que ce soit de rester debout à frotter mes mains pendant dix minutes, je n'ai pas envie que ça se termine. Parce que quand ce sera terminé, il faudra que je me rende à la séance de thérapie familiale, et je suis terrifié.

Après avoir enfin fini de me laver les mains, essayant d'ignorer la fatigue dans mes jambes d'avoir été debout et celle dans mes bras d'avoir autant fait autant d'efforts, je me sèche les mains et je sors de la salle de bain.

Ma journée s'est plutôt bien passée jusque-là, mais elle m'a rendu nerveux. Tout le monde m'a donné des conseils et des encouragements pour ma thérapie familiale. La thérapie de groupe s'est bien passé, également. J'ai eu mon autorisation pour aller à la cérémonie de Winston, et j'ai même un peu parlé quand c'était mon tour, disant que j'avais peur pour aujourd'hui.

Il est quinze heures maintenant, à en juger par l'horloge grillagée sur le mur, alors mes parents ne devraient pas tarder à arriver. J'ai quinze minutes à tuer, alors avant de me rendre au bureau du docteur Janson —notre point de rendez-vous comme convenu—, je m'arrête à la salle de récréation.

J'en suis à mon troisième pas quand je passe la tête par la porte, remarquant que tout ceux qui ne sont pas dans le groupe B sont assis en train de parler. Alors que je fais mon quatrième pas, Jeff lève les yeux.

"Ce n'est pas l'heure de ta thérapie familiale ?" il demande.

Peut-être que j'en ai parlé un peu beaucoup trop. "Ouais, d'ici cinq minutes environ," je réponds.

"Évite les disputes et tout ira bien," intervient Thomas, ajoutant un petit sourire à la fin. Pour une raison que j'ignore, ça m'aide vraiment, même si j'ai déjà entendu cette même phrase durant toute la journée.

"Je n'ai jamais vraiment réfléchi à la relation que j'avais avec mon père," dis-je. "On n'a jamais assez parlé ensemble pour avoir des disputes. Enfin, jusqu'à aujourd'hui."

"On sera là pour toi quand ce sera fini," me dit Chuck avec encouragement.

"Non, on ne sera pas là," réplique Zart.

"Il ne ment même pas," dit tristement Thomas. "On sera en classe. D'ailleurs, tu devrais y assister, Newt."

Je n'ai jamais pensé aux classes, en fait. Je ne pensais pas être là assez longtemps pour qu'elles aient de l'importance. Mais à ce stade, je vais peut-être devoir y aller.

Ten | Newtmas FROù les histoires vivent. Découvrez maintenant