quarante-neuf

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Le sommeil qui me gagne après l'annonce de cette nouvelle pas si choquante que ça est un des plus horribles. Je commence par m'allonger là avec toutes mes affaires sur le sol. Je tremble sans pouvoir m'en empêcher, et peut importe le nombre de couvertures dont je me recouvre, l'air semble devenir de plus en plus glacial. Les Normaux avaient tort à propos de mon lit qui me manquerait. La vérité, c'est que l'endroit où je me trouve est la dernière de mes pensées.

Après un moment, ayant ignoré les deux coups frappés à ma porte, je me penche pour ouvrir ma valise. J'aperçois mon journal en premier, et je décide de le regarder plus tard. Je finis par sortir ce que je cherchais —la peluche requin.  Je retourne sur mon lit en la serrant contre ma poitrine, remontant la couverture sur moi. Je ne pense pas qu'il me reste encore des larmes à verser à ce stade. Je crois même que je suis déshydraté, en considérant mon affreux mal de tête.

Enfin, je finis par m'endormir. Mais seulement pour un petit moment. Une heure, peut-être. Je finis par me réveiller, me retournant plusieurs fois dans mon lit. Je me rendors à nouveau seulement pour faire un cauchemar qui me réveille en sursaut. Je ne me souviens pas du cauchemar, mais c'était assez pour me terrifier.

J'essaie de dormir un peu plus, et le schéma recommence. A chaque fois que je suis réveillé, je dois faire face à mes horribles pensées —autrement dit à Thomas qui n'est plus avec moi, à mes amis que j'ai quittés, à la famille que je n'ai quasiment plus, à mes parents qui savent que je suis gay, et à peu près à un millier d'autres choses—, ce qui me rend juste assez fatigué pour ne pas pouvoir me lever, mais apparemment pas assez pour que je reste endormi. Je déteste ça. Je déteste tout.

N'importe qui me dirais sûrement que je n'ai aucune raison d'être dans cet état, et peut-être que c'est vrai. Mais de mon point de vue, tout ce vois c'est à quelle point la vie est injuste. C'est injuste que mes amis soit prisonniers. C'est injuste que ça ne dépende que de moi de les faire sortir. C'est injuste que mes parents divorcent à cause de moi. C'est injuste que j'aie des TOC. C'est injuste que je sois tombé amoureux et que je ne l'ai même pas réalisé avant qu'il me soit arraché.

Je pense que d'une certaine manière, je savais que j'étais amoureux de Thomas. Mais n'est-ce pas effrayant d'admettre ça, peu importe les conditions ? Dans mon cas, j'aurais pu me l'admettre des milliers de fois. Thomas est unique. Je ne le connais que depuis presque deux mois, et pourtant j'ai l'impression que ça fait une vie entière.

Je crois que c'est de l'amour. Que ce soit trop tôt pour le dire ou non, que ce soit ridicule ou non, c'est bien plus fort que tout ce que j'ai pu ressentir pour Alby. Pas juste parce que Thomas a été la première personne avec qui j'ai expérimenté ce genre de sentiments, ou, en reprenant ces mots, parce que c'était la seule option. J'aime penser que tout ceci serait arrivé, peu importe les circonstances de notre rencontre ; et j'aurais aimé qu'elles soient différentes.

Et tout en pensant à Thomas, je m'endors pour la première fois d'un sommeil paisible.



Il est dix-neuf heures trente quand je me réveille à nouveau. Ma première pensée est que je devrais essayer d'appeler Thomas. Je me relève en position assise, et la première chose que je vois est ma valise. Je fixe mon journal à l'intérieur.

Je ne peux pas appeler TIMI avant d'avoir fait face à mes parents, parce que je viens de me rendre compte que le seul téléphone que j'ai à présent est celui prépayé que m'a acheté Thomas. Mon téléphone est toujours enterré quelque part dehors.

Alors je décide de prendre le journal. Je l'ouvre et passe toutes les pages sur lesquelles j'ai écrit, jusqu'à trouver la page que je cherchais. Si je n'étais pas si fatigué de pleurer, je verserais sûrement quelques larmes. Je sais que ce n'est pas mon écriture ; elle est bien plus irrégulière, mais c'est comme s'il avait essayé de la rendre la plus lisible possible. Au début, je me concentre seulement sur les numéros de téléphone. Ceux de son fixe et de son portable sont inscrits, puis vient son adresse, puis les coordonnées de Chuck et ainsi de suite. Il y a tous les Normaux —moins Fry qui m'a donné ses coordonnées en mains propres—, plus les numéros de Madame Flores et TIMI.

Ten | Newtmas FRWhere stories live. Discover now