trente-huit

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Je ne sais pas si je suis plus blessé ou effrayé. Les deux sentiments sont définitivement là, mais tandis que je le regarde, je ne sais pas lequel est le plus fort.

Puis quelque chose me frappe. D'habitude dans un moment comme celui-là, je devrais être paralysé. Je serais bloqué, incapable de parler ou de bouger. Mais à cet instant, je ne ressens absolument pas cette sensation. Après la première vague d'émotions qui m'a submergé quand Thomas m'a dit de partir, quelque chose de différent me transperce. De la colère.

"J'ai besoin de te poser quelques questions, et je ne partirai pas tant que tu n'y auras pas répondu," dis-je d'une voix dure. Récemment, j'ai été habitué à ce ton de voix.

Thomas se relève en position assise sur son lit, s'appuyant sur son coude. "Pourquoi est-ce que tu me croirais ? Tu es le petit protégé de TIMI maintenant, n'est-ce pas ? Je suis sûr qu'ils t'ont dit toutes sortes de choses sur moi. Tu m'as dit que tu ne me croyais pas, alors qu'est-ce que tu fais là ?"

Son discours est toujours mal articulé, et si ses mots me piquent comme des aiguilles, la façon dont il le dit est encore plus blessante. Je me sens un peu responsable de la façon dont il est traité, même si je n'ai rien à voir avec ça.

Je relève les yeux vers Vince. "Vous pouvez nous laisser."

"Tu es sûr ?" demande Vince.

Si j'étais normal, je hocherais la tête. "Oui," je mens.

Vince jette un œil à Thomas, puis baisse de nouveau les yeux vers moi. "Très bien." J'ai l'impression qu'il s'apprête à dire autre chose, mais au lieu de ça il sort de la pièce, nous laissant seuls tous les deux.

Je me retourne vers Thomas, et j'essaie de parler avec un volume assez fort pour qu'il m'entende, mais assez discret pour qu'il soit le seul à entendre. "J'ai besoin de savoir où tu as eu l'argent."

"Quel argent ?" demande Thomas. Après un moment, la confusion sur son visage disparaît. "Oh, je te l'ai déjà dit– la pension alimentaire."

"Est-ce que tu es sûr de ça ?" je demande.

Thomas change de position pour venir s'asseoir au bord du lit, ses jambes pendant dans le vide. J'aurais aimé pouvoir marcher jusqu'à lui, ou moins avancer mon fauteuil, mais Vince n'est plus là pour me pousser et je n'ai pas vraiment envie de me découvrir une nouvelle routine maintenant.

Son visage est mieux illuminé maintenant qu'il est assis comme ça, et il me fixe étroitement. "Qu'est-ce qu'ils t'ont dit ?"

"A propos de quoi ?" je demande.

"De moi," répond Thomas.

Peut-être que si nous restons ici en silence assez longtemps, il oubliera qu'il m'a posé la question. Je fixe le sol, cherchant une réponse. A ce stade, qu'est-ce que ça changerait que je mente ?

"Ils m'ont dit comment tu t'étais enfui," je réponds d'une petite voix. Je relève les yeux vers lui. "Et comment tu es arrivé ici."

"C'est vrai ?" demande Thomas d'un ton neutre.

J'ai peur de répondre. "Oui."

"Et tu as cru tout ce qu'ils t'ont raconté," dit Thomas, sa voix se brisant à la fin. Il ne le formule pas comme une question —plus comme une accusation qu'autre chose.

"Qu'est-ce que je suis censé faire d'autre, Thomas ?" je demande, la frustration brûlant à nouveau en moi.

Thomas ne dit rien l'espace d'un instant. "Ils ne savent rien à propos de moi."

"Parce qu'ils ne savent pas faire leur travail, ou parce que tu refuses de leur dire quoi que ce soit ?" je demande.

Le regard de Thomas me transperce. Si je l'ai mis en colère, je ne sais pas si j'en suis désolé ou si je suis satisfait d'avoir soulevé ce point. Nous restons dans un silence inconfortable encore un peu plus longtemps, et ça devient si long que j'envisage d'appeler Vince pour me sortir d'ici.

Ten | Newtmas FRWhere stories live. Discover now