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Ça fait presque deux semaines depuis la dernière fois que je suis allé en isolement, et cette cellule ne me manquait pas du tout.

Durant tout le chemin, la peur étouffante d'avoir fait une erreur en faisant confiance à Thomas me submerge. Qu'est-ce que nous faire envoyer là-bas pourrait nous apporter ? Peut-être qu'il est vraiment devenu fou, parce que rien de tout n'a de sens.

Etre isolé me fait me torturer le cerveau en réfléchissant à ce qui vient de se passer, et à tout le reste. Je n'ai pas parlé à mes parents depuis l'hôpital, c'est la plus longue période que j'ai passée sans eux, et c'est en train de me rendre encore plus fou que je ne le suis déjà. Plus que tout, c'est la peur de ne pas savoir ce qui est en train de se passer et mon incapacité à les aider. J'en viens à regretter de m'être enfui de la pièce le jour où ils m'ont annoncé la nouvelle. Si j'étais resté, peut-être que j'aurais pu avoir des réponses aux questions qui m'obsèdent. Le seule chose dont je suis sûr, c'est que c'est de ma faute.

Je fixe le plafond, essayant de m'endormir. On m'a déjà apporté mon dîner et mes médicaments —mais pas le nouveau—, alors je n'ai rien à faire. Cette cellule est une prison, tout ce que je peux faire, c'est regarder l'horloge et serrer la fine couverture un peu plus près de mon corps. Les transferts entre mon fauteuil et le lit sont un peu plus faciles maintenant vu que je ne suis plus paralysé à cause de mes dix, mais ce n'est toujours pas génial. L'infirmier qui m'est assigné cette fois n'est pas le plus gentil non plus. Aucune sympathie, aucun sourire, il m'adresse à peine quelques mots. Je suis juste un délinquant pour lui.

Aussi étrange que ce soit, je me rends compte que Thomas me manque. Je devrais être en colère contre lui, je devrais le détester. Mais ça me semble inutile. Je veux le voir pour qu'il s'explique. Tout est logique pour lui étrangement, et ça pourrait m'aider là maintenant. Enfin, s'il est encore sain d'esprit, bien sûr.

Je finis par m'endormir, chassant de mon esprit les conséquences des événements d'aujourd'hui.





L'ouverture de la porte me fait sursauter et sortir de mon cauchemar, et quand je lève les yeux, je ne suis pas entièrement convaincu de m'être réveillé.

"Tu as demandé à aller aux toilettes ?"

Vince s'avance jusqu'à mon fauteuil roulant avec un étrange sourire sur le visage, et mon cerveau est assailli de trop de questions à la fois pour comprendre ce qui est en train de se passer ; surtout en considérant que je suis toujours à moitié endormi.

"Comment ça se fait que vous soyez là ?" je demande d'une voix enrouée, clignant lourdement des yeux pour les réveiller.

"L'équipe de surveillance change à une heure et demie. Allez, lève-toi," me dit-il, avançant mon fauteuil sur le côté du lit.

"Je n'ai jamais–" Je me stoppe. Je n'ai jamais demandé à aller aux toilettes, j'étais profondément endormi. Mais je pense qu'il le sait.

Je me servirais de n'importe quelle excuse pour sortir de cette cellule, alors je m'installe dans le fauteuil et Vince me laisse mettre mes chaussures. Je porte encore mes vêtements de la veille, alors me changer me semble inutile, surtout si c'est seulement pour aller aux toilettes comme il me l'a dit. Peut-être qu'il va m'expliquer, peut-être qu'il va me dire combien de temps je vais devoir rester en isolement. Peu importe ce que c'est, je pourrais avoir besoin de l'entendre.

Mais quand nous arrivons dans la salle de bain et qu'il ne dit toujours rien, je commence à être perturbé. Il pourrait avoir eu l'impression que je l'ai appelé, évidemment, mais il y a quelque chose qui semble inhabituel.

Je m'avance —en boitant— jusqu'au lavabo, finissant mon cycle avant de me laver les mains. L'eau froide m'aide à me réveiller, et j'hésite à rester là pendant dix minutes, mais je ne devrais pas faire attendre Vince. C'est un choix qui m'appartient, heureusement. Si je n'ai nulle part où aller ou que je suis contrarié ou stressé, je me lave les mains pendant dix minutes. Mais comme Vince est là aussi, mon cerveau m'informe que c'est préférable d'opter pour dix secondes cette fois-ci.

Ten | Newtmas FROù les histoires vivent. Découvrez maintenant