Chapitre 15: Léonora

8 4 27
                                    

Négociations

Troisième partie 

La jeune femme essaya d'attirer de nouveau le regard de Daniel, mais celui-ci était trop troublé par le malaise de sa mère pour s'occuper d'elle. Il dégagea les mèches folles qui s'étaient échappées de son chignon et lui caressa la joue. Son père lui adressa un sourire rassurant et lui fit signe de se reconcentrer sur la réunion.

—Papa, je ne veux pas... je ne sais pas. Je suis incapable de leur faire face de nouveau. J'ai l'impression d'être envoyé dans l'arène sans savoir qui sont les lions. Je ne sais pas... je ne peux pas... je suis perdu. Je ne peux pas continuer. Comment juger sans savoir qui est coupable ? geignit le jeune homme.

—Et s'il n'y en a pas ? S'il n'y a pas de coupable ? S'il y en a plusieurs ? N'est-ce pas la culpabilité de tous les argentins, à laquelle nous faisons face ? Ne cherche pas un coupable, mon fils. Cherche une solution.

—Je n'en ai pas...

—Alors cherche un pacificateur, quelqu'un qui peut t'aider à la trouver.

Le souverain faillit lui répondre qu'il ne voyait personne qui pourrait lui tendre la main mais il réalisa que ce n'était pas vrai.

Avec un sourire radieux, persuadé d'avoir trouvé un moyen d'obtenir enfin la paix, il se tourna vers son peuple. Mais ce qu'il vu noya tous ses espoirs.

Au geste guerrier des ducs, les sorciers avaient répondu par des sortilèges. Maintenant, les deux camps s'affrontaient dans un beau chaos où les éclairs rebondissaient sur l'acier.

Daniel cria. Il appela les nobles au retrait. Mais rien n'y fit. Ses ordres se perdirent dans le vacarme ambulant.

Les combats devinrent flous alors qu'une larme dévalait sa joue et se perdait dans sa barbe blonde. Il regarda hommes et femmes, humains et enchanteurs, se déchirer et ses espoirs de paix s'envoler. Il regarda et il pleura. Il pria Léonilde de mettre fin à cet enfer, comme vingt ans plus tôt sa mère avait supplié les dieux. Et il reçut la même réponse : le silence de l'abandon.

En s'enfonçant dans la guerre civile, les Vallées d'Argent avaient perdu le soutient des divinités, que ce soit Soleil, le panthéon de Nirvana ou même le fantôme de leur créatrice.

Enfin, le vacarme cessa. La plaine, devenue champ de bataille se tut soudain. Daniel sécha ses larmes et suivit les regards des seigneurs et des sorciers qui convergeaient vers le duc de Lowbear.

Son cœur rata un battement. Le soleil de ce début de printemps, de ce jour si beau, se reflétait sur la lame du noble. Brillante comme une étoile égarée, celle-ci était posée contre le cou de Léonora.

La comtesse de Lasso n'esquissa pas un mouvement. Un seul tremblement de sa glotte aurait permis au métal de s'enfoncer dans sa chair. Malgré l'angoisse qui nouait sa gorge et tambourinait à ses tempes, elle tenta de ne pas déglutir. Son cœur battait si fort qu'elle eut peur qu'il ne perce son corset. Malgré les larmes qui menaçaient de s'échapper de ses yeux, elle s'efforça de garder le regard droit et fier.

Elle se sentait tellement lamentable, pitoyable. Pourquoi avait-elle été prise pour cible, pour une fois qu'elle n'avait rien fait ? Était-ce pour lui faire payer tous ses crimes passés ? Elle eut envie de supplier le ciel de lui pardonner, mais elle ne s'abaisserait jamais à ce niveau.

La jeune femme ne put que garder le menton haut et espérer que personne ne remarquerait son trouble. Si elle devait mourir, ce serait avec dignité.

Cependant, elle ne put empêcher ses lèvres de trembler, quand le duc de Lowbear cria tout près de son oreille :

—Sorciers, sorcières, je détiens votre alliée. Si vous tenez à sa vie, je vous prie de vous rendre immédiatement !

MagissaWhere stories live. Discover now