Chapitre 12: Zackaria

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En terre inconnue


Sixième partie


Thomas arrangea les mèches rebelles qui lui tombaient devant les yeux. Ces cheveux étaient vraiment trop longs.

Enfin, son épouse le regardait en se mordillant la lèvre. Elle ne lui pardonnerait pas. Il était vraiment un idiot. Comment avait-il pu croire que ses excuses suffiraient à le faire pardonner ? Il avait vraiment été minable. Pathétique. Et maintenant qu'il venait de détruire sa relation avec sa femme et mère de son enfant, au bout de seulement quatre mois de mariage, il pensait à ses cheveux ? Pire qu'un idiot, un abruti. Enfin, ce n'était pas vraiment une surprise. Il avait toujours été bête. Combien de fois, sa mère l'avait poursuivi dans le château en le traitant d'andouille ? Sa famille lui avait même donné un surnom en rapport avec sa bêtise. Alors que tous les petits Thomas étaient surnommés « tomate », lui il avait droit à « patate ».

Et puis, quand ses parents étaient morts et que ses frères et sœurs étaient partis, il se l'était dit à lui-même. Quand les généraux s'étaient tournés vers lui et lui avaient demandé ce qu'il fallait faire pour l'île de Sobek et que tout ce qu'il avait pu répondre c'était : « faisons la paix avec l'Empire du Cobra », alors même que son père et des centaines de courageux guerriers étaient morts pour récupérer cet écrin de verdure, au milieu de l'océan. Et lui, il avait renoncé. Il avait senti le jugement des soldats, mais surtout, il avait été incapable de faire taire les pensées néfastes qui l'assaillaient et ne cessaient de lui répéter qu'il n'était qu'un imbécile.

Et, depuis le début de son règne, il n'avait plus un jour où il n'avait pas pensé qu'il était bête. Le jour où il avait couché avec cette femme de Vilnars avait sûrement été le pire. Il ne cessait de se dire qu'il n'était qu'un idiot, de trahir sa femme, juste pour une nuit dans les bras d'une inconnue.

Mais il l'avait fait quand même. C'était toujours comme ça. Il avait beau se dire qu'il était bête, qu'il ne fallait pas faire ça, il prenait toujours la mauvaise décision. Ça devait être pathologique, il fallait qu'il demande à sa femme si, à Iréal, ils avaient identifié une maladie de la bêtise.

Irène se mordillait la lèvre. Sa mère lui avait dit cent fois d'arrêter. Après elle avait la bouche tout abîmée. Mais, la jeune femme ne pouvait pas s'en empêcher. Dès qu'elle était nerveuse, elle se défoulait sur ses lèvres. Et là, elle était face à un choix cornélien. Elle devait décider si elle pardonnait ou non à son mari.

Elle en avait bien envie, il avait l'air sincère, mais d'un autre côté, il avait vraiment été odieux. Ses parents lui disaient toujours qu'elle devait être moins gentille, plus ferme, plus dure. Mais elle était convaincue que Thomas n'était pas méchant et n'avait pas voulu lui faire du mal. En revanche, il faudrait qu'elle lui demande pourquoi il avait réagi si brusquement, elle ne lui avait rien dit qui puisse l'énerver, non ? Elle n'avait rien dit tout court. Il fallait qu'elle lui demande des explications. Mais un autre jour, parce que là, elle était vraiment fatiguée.

-Ce serait bien, oui. Que vous soyez moins minable. Cela va finir par vous attirer des ennuis, on ne pardonne pas à un roi. Enfin, moi je vous pardonne, je suis peut-être la seule à le faire mais je vous pardonne.

Et voilà, elle avait cédé, quelle cruche elle faisait ! La jeune femme lissa les plus de sa robe et essaya de se donner un air plus ferme, plus noble. Un air de souveraine.

Ses yeux devinrent des émeraudes glacées, et sa voix se fit plus froide que la neige des Glaces Éternelles.

-Si vous pouviez vous pousser de l'encadrement de la porte, maintenant, j'aimerais passer.

MagissaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant