Partie V - 1 : Les Mots d'Amour

482 69 74
                                    

DANIEL S'ÉVEILLE, ÉBRANLÉ par l'écho des cris. Il tourne la tête et voit Madeleine, paisiblement endormie. Les yeux humides et le cœur battant, il tend la main pour la toucher, mais s'arrête. Il refuse qu'elle le voie ainsi.

Il sort de la chambre ; il a besoin de se vider l'esprit et de respirer.

Daniel observe les étoiles, mais les hurlements résonnent dans ses tympans. Son estomac se contracte, puis il vomit dans les buissons bordant le motel. Il s'essuie la bouche et prend une grande inspiration lorsque Madeleine, pieds nus et portant une de ses chemises, apparaît dans l'embrasure. Elle s'arrête derrière lui, le serrant contre elle. L'air est frais, imprégné d'une odeur de fumée venue de la campagne.

— Tu n'arrives pas à dormir ? demande-t-elle.

— J'ai fait un cauchemar.

Son visage s'apaise lorsqu'il la voit dans la flanelle rouge.

— Excuse-moi, reprend-il. Je ne voulais pas te réveiller.

La jeune femme essaie de l'embrasser, mais il la repousse délicatement.

— Je viens de vomir, Maddie. J'ai besoin de me rafraichir.

— Ce cauchemar était si terrible ? dit-elle en lui caressant les cheveux.

Daniel acquiesce, puis ils regagnent la chambre. De la salle de bains, il observe Madeleine dans le miroir alors qu'il se brosse les dents. Elle est assise à l'angle du lit.

— Tu peux venir si tu veux, murmure-t-il.

— Pourquoi ? Ta technique de brossage est-elle si intéressante ? le taquine-t-elle.

Le jeune homme rit doucement.

— J'ai besoin que tu me prennes dans tes bras.

Madeleine approche, puis l'étreint. Sa peau claire, ses cheveux bruns et leur visage s'assemblent comme un puzzle, lui révélant les couleurs de son âme.

— Je n'ai jamais aimé, dit-il en fermant l'eau, comme je t'aime.

Il l'embrasse, admirant son visage. Madeleine est une drogue, un rêve, une étreinte affectueuse. Elle est les draps douillets où l'on se blottit, le baiser dont on ne se lasse pas, la main qui t'offre des frissons, les mots qui te font vibrer, les battements de ton cœur. Elle est cette vérité éclatante que tu découvres, le sourire trouvé dans un regard, la chanson qui remplit ton âme. La jeune femme rit alors que ses pieds ne touchent plus le sol. Daniel la fait valser, puis la repose sur le carrelage.

— Veux-tu danser avec moi ? murmure-t-il. Pour de vrai.

La brune sourit et acquiesce.

— Mais il n'y a pas de musique, répond-elle.

— Je vais y remédier.

Le jeune homme l'entraîne dans la chambre. Il allume la télévision, mais ne trouve rien de convenable.

— Daniel, souffle-t-elle dans la pénombre. Tu seras ma chanson... ma danse.

Elle le guide vers le lit.

* * *

DES HEURES PASSÉES DANS CE LIT où seuls Daniel et Madeleine existaient : la chambre numéro 4. Le son de leur respiration et la télé en noir et blanc. Le temps n'avait plus d'emprise, et les draps étaient devenus l'univers.

KuklosWhere stories live. Discover now