9. Peinte.

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9 décembre.

Être peinte n'était pas ce qu'elle avait imaginé.

Love is Rare - Tom Day

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Elle se tenait là, assise.

Elle était en train de se faire peindre.

Ce n'était pas ce qu'elle avait imaginé, lorsqu'elle avait posé son regard sur la feuille blanche, scotchée après un lampadaire.

''Je recherche une personne. N'importe quel type de personne, je recherche juste une personne.

Je ne suis pas un maniaque, je te le promet.

J'ai juste envie de voir ces gens qui marchent à-côté de moi, dans la rue. J'ai envie de les voir et de les peindre.

C'est tout. ''

Elle avait pris le numéro de téléphone en note, elle avait traversé la rue et sa journée avait continué.

Elle avait été charmée par cette approche, il fallait l'avouer.

Elle aimait ces sollicitations uniques, un peu sarcastiques.

C'était différent de ce qu'on entendait, habituellement. Ça faisait changement et elle avait besoin de changement. Ça tombait bien.

Et puis, fallait avouer qu'il y avait une part de risque, dans ce genre d'annonce. Elle aurait pu tomber sur un vrai maniaque, elle aurait pu rencontrer un tueur en série.

Elle aurait aussi bien pu rencontrer une personne formidable, une personne unique.

Les gens qui écrivaient ce genre d'annonce étaient nécessairement des gens uniques, c'était ce qui l'avait fait flancher, alors qu'elle n'arrêtait pas de zieuter le numéro de téléphone, hésitante.

Un fou furieux n'aurait pas pris la peine de préciser qu'il n'était pas un maniaque. Il aurait tout simplement écrit qu'il avait besoin de quelqu'un, d'une muse. Et il aurait accompagné son annonce d'un petit salaire, ce qui aurait attiré beaucoup plus de volontaires.

Non, décidément, ce n'était pas un fou furieux.

Et si c'en était un, alors il était rusé.

Elle avait finalement composé les chiffres, sur son téléphone, avant d'avoir le souffle coupé lorsqu'on répondit à son appel.

C'était une voix masculine.

Finalement, c'était peut-être vraiment un fou furieux.

-J'ai vu votre annonce, dans la rue. Et... disons qu'elle m'a troublée.

-Oh, cette annonce.

Il lui expliqua ensuite qu'il cherchait des muses, en effet. C'était un projet personnel. Il avait eut cette soudaine inspiration, cette envie de peindre et de colorer des toiles.

Le seul problème, c'est qu'il n'avait pas envie de peindre des fruits, ni de peindre des clairières. Lui, ce qu'il avait envie de peindre, c'était des humains.

Des vrais humains. Des humains méchants, gentils, tristes. Des humains fous, malades, normaux. Des médecins, des filles, des secrétaires, des concierges, des garçons. Des hétéros, des homos, des trans.

Il avait envie de peindre sa ville, son pays, sa nation, son monde.

Et elle avait sourit, en l'entendant parler ainsi. Il avait vraiment un projet, ce n'était pas un fou furieux.

Et si s'en était un, alors il était convaincant.

Ensemble, ils avaient choisi une date et une heure. Il lui avait dit d'être à l'heure, car il n'aimait pas vraiment les retards.

ParcellesWhere stories live. Discover now