5. On est tous des mauvaises personnes.

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Harry.

Pax était couchée sur son matelas et elle fixait le mur derrière moi. Le crayon noir que Nikki lui avait mis sous les yeux s'était estompé d'une drôle de façon, parce qu'elle avait rigolé jusqu'à en pleurer, tout à l'heure. Ses cheveux étaient en bataille, mais elle était drôlement jolie, surtout quand il restait un peu de poudre, près de sa narine droite, comme en ce moment.

On avait abusé et pas juste un peu.

J'avait fait un bon nombre de poutre, je ne me souvenais plus trop, Pax s'était contentée de quatre, quatre et demi si on comptait la fois où elle s'était amusée à sniffer une petite ligne sur le dos de ma main, parce qu'on ne trouvait plus le couvercle métallique.

Et ça avait été une jolie nuit, on s'était drôlement bien amusé avec le reste des gens, Pax avait rigolé comme jamais depuis que je l'avais rencontré. Elle avait même dansé avec Nikki et Allumette, sur de vieilles chansons des années 80.

Et là, bah c'était la petite descente, le moment moins amusant, plus stressant, angoissant. Et la fête était terminé, y'avait plus un son dans l'Odyssée, tout le monde dormait, assommé par la quantité élevée d'alcool et de drogues qu'ils avaient consommés.

Pax avait apporté son matelas dans mon coin, elle l'avait collé contre le mien. J'avais tenu à ce qu'elle reste près de moi, parce que c'était sa première fois, sa première descente de cocaïne. Et j'étais couché dans mon lit, face à elle, un calmant qui se propageait dans mon corps, que j'avais chopé dans la trousse de survie de Tak, parce que j'avais pas envie de mal aller, maintenant. Pax en avait voulu un aussi, mais j'avais préféré attendre de voir comment elle allait réagir, peut-être qu'elle n'en aurait pas besoin et que tout irait bien. Et ça semblait être le cas, pour l'instant, elle semblait bien réagir, elle était calme. 

-Je me demande comment ma mère et mes anciens professeurs et mes anciennes copines réagiraient en sachant que je viens d'avoir la plus belle journée de ma vie, dans un squat et avec de la cocaïne, chuchota Pax en me fixant.

-Probablement qu'ils réagiraient mal, répondis-je en haussant les épaules. C'est comme ça que la plupart des gens réagissent, quand on parle de drogue.

Elle fit une petite moue, pensive.

-Mais c'est tellement fantastique, pourquoi ils le réalisent pas, Harry? Ça règle tout les problèmes, la cocaïne et les médocs et les champignons magiques!

Et je souriais, parce que j'étais un peu comme Pax, parfois, même si je connaissais très bien les conséquences de la drogue. J'étais un toxicomane, littéralement. J'étais une personne, un humain, à tendance dépendante. Un addict. Et Pax l'était aussi, j'en étais persuadé. Et même si je savais dans quel situation l'abus pouvait me rendre, je restais qui j'étais vraiment et je continuais quand même à consommer, hebdomadairement. 

J'avais un problème de drogue. 

Nous étions des personnes qui utilisaient des substances illégales pour survivre, au même titre qu'un alcoolique qui utilise l'alcool pour passer au travers de ses journées.

-Tu sais pourquoi ils ne peuvent pas comprendre, Pax?

Elle secoua la tête, avant de déglutir.

-Parce qu'ils ne sont pas comme nous. Nous sommes des addicts, Pax. Et si on se sent si bien, avec des cachets et des poutres de cocaïne, c'est parce qu'il y a un vide, un truc à combler, à l'intérieur de nous. Parce qu'on veut ressentir quelque chose pour oublier ce vide, ce gros trou noir de tristesse, murmurais-je en la fixant. On veut juste aller mieux. 

Son visage changeait. Il devenait triste et ses yeux brillaient.

-Je ne suis pas une addicte, Harry, marmonna Pax difficilement, parce qu'elle avait trop de sanglots, coincés, dans sa gorge.

ParcellesWhere stories live. Discover now