Chapitre 56

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L'humeur de Charles ne s'améliora pas. Nous nous installions à table dans une atmosphère très pesante. Paul nous apporta nos plats en prenant grand soin de préciser que j'en étais pour beaucoup dans sa réalisation. Charles me lança un regard de biais et remercia Paul qui s'éclipsa. Nous ne dîmes pas un mot pendant une bonne dizaine de minutes puis je pris la parole. Après tout, il n'y avait aucune raison pour que Monsieur fasse la tronche toute la soirée. J'avais été au top avec lui, il avait pu faire ce qu'il voulait sans aucune ingérence de ma part et j'avais même pris le temps de cuisiner pour lui.

- Ta journée s'est bien passée ? lui demandai-je sincèrement intéressée.

Il posa soudainement sa fourchette et s'essuyant les lèvres avec sa serviette. Mais qu'est-ce qu'il avait à la fin ? Il posa ses grands yeux sur moi et attendit. Quoi, je ne saurais le dire, mais il attendit. Je haussais les sourcils tout en mastiquant ma viande.

- Qu'est-ce qu'il y a ? Le dîner ne te plaît pas ?

- Arrête ça, tu veux ?

Le voilà qui sortait enfin de sa coquille.

- Que j'arrête quoi ? C'est toi qui ne fais que faire la tête depuis que tu es rentré. Qu'est-ce que tu as ?

- Pourquoi tu ne me demandes pas d'où je viens comme ça ? Ça éviterait que tu poses sur moi ce regard accusateur.

Serait-ce de la honte que je vois sur son visage ?

- Charles, lui répondis-je calmement. Je sais très bien où tu étais, mais il me semble ne t'avoir fait aucun reproche à ce sujet alors pourquoi tu t'énerves après moi ? Faut-il tout le temps qu'on se dispute ?

- On dirait que ça ne te fait ni chaud ni froid !

Ah ! Voilà, il était vexé.

- C'était notre accord non ?

À l'extérieur, je fis effectivement comme si toute cette histoire m'était totalement égale. Je venais de comprendre que mon indifférence ébranlait bien plus monsieur que toutes les jérémiades que j'aurais pu sortir. En lui montrant qu'il m'était bien égal qu'il couche avec une autre fille, il se sentait sans importance à mes yeux et ça l'énervait. Non, pire, ça le mettait hors de lui. Parfait. Rien de mieux pour attirer l'amour d'un homme que de s'y montrer indifférente.

Voyant que je ne voulais pas rentrer dans son jeu et que je n'y étais pas réceptive, il laissa tomber, non sans continuer à montrer que la situation ne le satisfaisait pas. Monsieur Charles Potens allait devoir s'y faire, je n'étais pas son pantin.

- Aller, ne fait pas la tête. Tu as ce que tu voulais et je n'y vois aucun inconvénient ! ajoutai-je.

Comme il ne se déridait toujours pas, je me levais de ma chaise et vins jusqu'à lui. Je m'assis sur ses genoux et il décala légèrement sa chaise pour que nous ayons suffisamment de place pour nous deux. Je passai mes bras autour de son cou et vins poser mon front contre le sien, les yeux fermés pour simplement entendre son souffle et sentir son odeur. Si j'avais fait ça avant qu'il ne prenne sa douche, j'aurais sans doute senti des effluves de parfum ne lui appartenant pas et il aurait été plus compliqué pour moi de lui faire croire que tout ça m'était égal.

Il mit ses mains autour de ma taille et l'une d'elles glissa sous mon pull. Le contact de sa paume contre ma peau m'arracha un frisson abominable, mélange de désir et de peur panique. Tandis qu'elle se frayait un chemin sûr jusqu'à ma poitrine, je ne pus m'empêcher de le stopper net et de l'obliger à sortir de sous mes vêtements, ce qu'il fit. J'en avais envie, aussi sûrement que je l'aimais, mais il était hors de question de passer après je ne savais quelle traînée.

Cœur ArtificielWhere stories live. Discover now