Chap X : Nsenga (1/4)

61 18 49
                                    

Je suis né entouré de mes deux parents.

Mon père était tout joyeux d'avoir un fils.

Il disait : « je sais que cet enfant va me rendre fier. C'est bien un grand homme qui est né ».

Ma mère avait ce rictus de femmes réprobatrices douées pour sermonner leur mari.

« C'est pas n'importe qui, ton fils. Ce sera un grand soldat protégeant la kerha et les valeurs de la flamme d'Atlanta ».

Ces intentions prononcées à mon encontre me furent contées par ma famille, tout le long de mon enfance et durant mon apprentissage de la kerha. Nsenga fut un nom unique qui devait me donner toutes les qualités requises, pour atteindre le haut de la hiérarchie de Benedictus.

Alors que j'étudiais encore, une phrase me suivit jusqu'à la fin de ma formation : « quoiqu'il advienne, tu te dois de suivre la voie de la kerha ». C'est ce que je suivis jusqu'à ce fameux jour où je me trouvai face à l'Assemblée.

Un autre finaliste fut choisi pour devenir prêtre de premier ordre du temple Nord de la kerha. Je fus relégué à la fonction de prêtre de troisième ordre au temple Sud. Triste fût le visage de mes parents et désemparé fut le mien.

J'avais travaillé avec mes tripes, supportant la pression et l'angoisse fortement ancrée en moi de décevoir tous les espoirs placés sur mes épaules blasées. Je quittai le temple tout en laissant mon corps accomplir machinalement la tâche qui lui était dédiée.

Voilà des mois que je m'étonnais de ma situation et des conséquences que cela entraînait. Une douleur muette, mais rongeuse. J'ai mal, très mal. Ma mère me ballottait de mots réconfortants. Mon père me détruisait gravement par son silence et surtout de ses iris noirs posés sur moi, disant plus longs qu'ils ne faillent.

Toutes ces pensées venaient triturer mes journées alors que j'enseignais à mes étudiants, la maîtrise des bases de la kerha. Lors d'une pause, je fus approché par un destin que je n'aurais jamais soupçonné si proche.

- Non, je suis désolé... jugeais-je, en hochant la tête tout en serrant les dents. Non, non, je suis désolé...
- Allons, mon père, reprit Oyphul, le front suppliant.

« Notez... vous serrez bien payé à la fin du voyage. D'ailleurs, voilà... faisons comme ça... On vous donne une petite mise en bouche avant l'entrée... qu'est-ce que vous... »

- Je n'accepterai pas un seul centime, déclarais-je, les iris visant son interlocuteur.
- Écoutez ! Il y a plein d'e-motios dévoreurs dans cette forêt, il est vrai, mais il y en a aussi de très inoffensifs. Nous ne serons qu'à quelques kilomètres d'un point de ralliement. Et la terre est ouverte de nouvelles évolutions. Si vous voulez trouver quelque chose en particulier... C'est votre chance.
- Je regrette, messieurs, rétorquais-je, en lançant un regard successif à mes quémandeurs.

Je ne me donnais plus la peine de faire face à cette sombre équipe. Marchant déjà en direction de mes étudiants, j'entendis la dernière phrase de l'individu au chapeau :

« Et s'il s'agissait d'un appel de la kerha ? »

Je m'arrêtais la tête inclinée, sans me retourner.

- Au fond de vous, vous le savez, n'est-ce pas ? Un chemin unique qui vous amènera toutes les réponses qui vous déchirent...

Un court laps de temps sépare sa prochaine intonation.

- Mon père... vous savez que j'ai raison... Il y a quelque chose qui vous dit que votre destin...
- Que savez-vous du destin ? Vous, pauvre pêcheur du monde... comment pouvez-vous vous imaginer que je puisse prendre ce chemin ?

Ce Que Tes Émotions Leur FontOnde histórias criam vida. Descubra agora