Chap XII : Bordos I (1/4)

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South Pell, Prisma, Lodart...

« Faunus... dis-moi, que vois-tu ? »

Je tournai ma tête et regardai en direction des passants se pressant de rejoindre leur lieu de travail. Le vacarme du vaisseau Lucius passant au-dessus de nos têtes m'obligeait à patienter.

— Je vois le peuple...
— Donne-moi tout ce qui te vient à l'esprit et n'omet rien.

Je restai droit les yeux visant tout ce qui me faisait face.

— Je vois des cadres d'entreprise foncer, costume et mallette assorti, vers le seuil des battants de leur bureau... des femmes qui activent leur moniteur digital...

Je plaçai un moment de silence tendu avant de poursuivre :

— Je vois des lâches et des esclaves du système... Je vois la peur... et... l'ignorance.

Le vieil homme pivota dans ma direction de ses iris bleus givrés. Sa barbe me fit l'effet d'une vapeur thermale sur ma peau. Je craignais de le décevoir.

— Excellent !

Je virai vers sa personne avec un calme pincé de naïveté, je dois dire.

— Sache mon petit, que le monde est divisé en trois catégories... Il y a ceux qui dominent et ceux qui se laissent dominer. Et il y a enfin la troisième et méconnu des trois par ignorance... ou plutôt par manque de précision... Ce sont les déviants. Ceux qui ne respectent pas les règles, qui n'en parlent pas, mais qui l'utilisent à leur avantage. Les dirigeants et les dirigés craignent cette race belliqueuse, car dans cette pathologie... se trouve des monstres comme moi...

Il s'interrompit un instant. Son regard se voulait mitrailleur.

— Et toi, dis-moi ? De quel côté es-tu ? reprit-il.

*

*         *

Un souvenir gravé pour longtemps dans mon esprit. Je ne me figure pas qu'un jour, je reverrai cet homme. Berivius Celebor, dirigeant de la société du renouveau mondial. Un trafiquant de stupéfiants dans le fond. Il aimait se placer dans la rue, sur une banquette, à observer les passants avec monotonie. Dès le jour où je le vis adossé au banc, les yeux dans le vide. Je ne pris pas de gants pour lui demander le pourquoi de son acharnement à poser ses pupilles sur cette sorte d'écran factice.

Ce qu'il me répondit : « viens ici chaque jour et tu sauras ».

« Je suis Faunus Silicius Lome, fils de Silicius Rimbel Eldos et de Carina Tervuren. Je suis prêt à recevoir l'enseignement nécessaire pour aimer mon pays et le mener vers l'excellence... »

Ce fut les paroles que je prononçasse lors de mon entrée à la célèbre académie des révélateurs à Prisma. Je me souviens avoir soufflé sur mon doigt couvert de bleus à cause de ma petite escarmouche avec un collègue. J'avais perdu la bagarre. Mais j'avais un sourire radieux en rentrant chez moi. Non parce que je voulais sauver les apparences, mais parce que j'avais chargé un collègue de filmer toute la scène et l'avait aussi commandé de rapporter cela au proviseur. Si cela se retournait contre moi, je possédais une copie que j'aurai balancée sur la toile informatique.

« Je veux en savoir plus et expérimenter de nouvelles choses »

Oui — C'était mon souhait. Je rêvais de propulser les insignes et les valeurs de mon royaume partout.

Je finis par fonder mon propre groupe après avoir essayé les trois plus influents de l'établissement, guère digne d'intérêt. Je fus vite reconnu comme le meilleur dirigeant d'équipe des trois académies de Prisma — Les loups blancs — Ce fut le nom inscrit sur le mur des vainqueurs.

Ce Que Tes Émotions Leur FontOù les histoires vivent. Découvrez maintenant