Chap I : Ce Qui Nous Dévore Depuis Le Commencement (1/3)

48 16 47
                                    

Un voyage demande du temps, un esprit d'aventure, assez ouvert à l'impossible.

J'ai quitté ma terre d'accueil, Éris, le royaume des archanges afin de retrouver ce que j'ai jadis perdu. Je m'introduis dans la vaste forêt d'Haemmer : la Toile.

C'était sans compter que je tomberais sur d'autres personnes prêtes à entreprendre un tel périple, à travers l'inconnu et la mort. Nous avons perdu quelqu'un en route. On ne se l'avoue pas, mais cela nous a marqué d'une certaine manière. Par un concours de circonstance, je me suis séparée du groupe sans les prévenir. J'ai commis un tel acte pour venir en aide à un e-motio dévoreur, condamnant de ce fait mon équipe. Ne sont-ils réellement plus de ce monde ? Je ne le sais point.

J'ai réussi à sauver l'animal, mais c'était sans compter sur l'apparition de quatre dévoreurs évolués, prêts à en découdre avec moi. Tout ceci me fait perdre du temps.

J'ai mes deux jambes dans l'eau du lac. La lune baigne la terre de sa lumière. J'ai les pupilles rivées sur deux e-motios qui ont tenté de m'achever. Ces chiens enragés ont manqué toutefois de m'étudier assez longtemps, avant de me faire face.

La forêt, ayant sa coloration d'antan, me souligne une ombre impressionnante, d'où se cache deux autres de ses monstres aux yeux étincelants. Je pivote lentement ma tête pour considérer l'imposante bête venant de produire à mon étonnement, une puissante pression spirituelle, submergeant la mienne, tout en jetant un froid saisissant sur la suite du combat.

Je me redresse, les sens aux aguets. Je recule d'une bonne distance de mes deux assaillants, la face toujours collée vers le supérieur des trois. J'aperçois à présent un sourire s'afficher sur cette mine ombragée.

- Impressionnant ! Je ne savais pas qu'il pouvait exister un aventurier ayant une telle force à un âge aussi jeune.

Il lance un regard à ses subalternes encore crispés, avant de revenir à moi.

- Le moins qu'on puisse dire, c'est que tu n'y es pas allé de main morte, jeune soldat...

Je me presse de répondre tout en essayant de ne point briser la trêve qui vient de s'installer entre nos deux camps :

- Je ne suis pas un homme, je suis une femme, lancé-je sèchement.

L'e-motio continue sans attendre, visiblement satisfait de converser.

- Oh, je m'excuse... aventurière ! Je ne voulais pas vous froisser. Mais cela me pousse à penser que c'est notre orgueil qui se plaint de l'orgueil des autres, n'est-ce pas ?

Soudain, la bête se déplace. Il flotte dans l'air, tout en se rapprochant de moi sans abandonner son analyse.

- Deux puissants e-motios renversés... mis en déroute par une jeune fleur en plein épanouissement.

Je cligne de l'œil, en notant chaque mots mielleux sortant de la bouche de l'e-motio qui se donne une voix attendrissante et plus humaine. Un second battement de cil rapide et l'animal s'est volatilisé. Je bouge une jambe, l'air de reculer.

- Il est clair que tu n'es pas une aventurière comme les autres, me dit-il, en se retrouvant subitement derrière moi.

Je me retourne brusquement, tout en évitant de lui présenter une face étonnée. Avant même de répondre, une vision me traverse : je vois des corps jonchés le sol. Des hommes en uniforme vert, baignant dans leur propre sang. La face explosée pour certains alors qu'un homme vêtu de noir avec un fusil lançant des rafales pour célébrer ce moment devant un tel spectacle, le sourire aux lèvres. Le flash disparaît. Je ne bats cependant des cils.

Ce Que Tes Émotions Leur FontWhere stories live. Discover now