Chap VIII : Ce Que Cinq Faces Ont En Commun (2/5)

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— Dominique, je voulais connaître ton jugement sur les femmes...

Il baisse ses prunelles vers son verre qu'il balance de gauche à droite, feignant d'être serein. S'il tient à me tutoyer, autant l'imiter.

— Comment cela ? Que veux-tu savoir ? finit-il par demander, en levant la tête.
— Leur qualité, de ton point de vue... si elles n'sont bonnes qu'à passer la serpillière ou si elles ont la main sur le cœur ou encore si tu les trouves captivantes, intelligentes et fortes... un peu de tout.
— Eh bien, débute-t-il, en se rinçant le gosier, puis en m'affichant un sourire narquois. Captivantes, oui... quand vous savez ce que nous voulons, vous êtes parfaites... et puis... tu sais, vous avez énormément de talent. Il y a de grandes chanteuses, des modélistes, des danseuses, et tout le reste. Personnellement, je te l'ai dit... une femme, c'est un trésor quand elle sait ce qu'on cherche.

Évidemment — Comment ne l'ai-je pas vu arriver, celle-là ? Je ne suis pas si étonnée, finalement.

— Il faut dire que tu as une vision vraiment... comment dirais-je... personnel, en effet, de ce que vaut la femme.
— Je ne vois pas ce que j'ai dit de travers ? Je vous félicite d'être toujours impressionnante... bien portante et ouverte au monde.
— Et que penses-tu des épouses qui sortent de ce lot ?

Il marque un temps de réflexion qui me paraît mal venu.

— Eh bien, je n'irai pas jusqu'à me prendre pour un dieu, mais cela, c'est le problème de leur mari.

Ne voyant pas de réaction de ma part, il enchaîne rapidement :

— Soyons francs ! Est-il normal qu'une femme mariée puisse... enfin... pourquoi devons-nous débattre sur le sujet, vu que nous ne sommes même pas mariés, sérieusement. Tu ne crois pas cela ?
— Et que penses-tu des hommes jaloux qui vont jusqu'à battre leurs femmes, de telles manières... qu'il leur faille passer la soirée à soigner les blessures occasionnées sur le corps... voire jusqu'à lutter contre l'insomnie... en sachant que demain, le calvaire reprendra.

À la seconde, j'aperçois une lueur d'agacement briller dans ses yeux noisette, pendant que son teint devient blafard et qu'il m'apparaît enfin sous son vrai jour, un prédateur prêt à se défendre.

— Qui es-tu ? me pose-t-il, tout en déposant son verre sur le bar.
— Je suis ici pour régler le compte de tes péchés, Harry.

Curieusement, il insiste à nouveau pour que je décline mon identité, tout en me demandant pourquoi suis-je sourde. Le son de ma voix me semble bas, comme barré par un vent mystérieux. Tout devient flou autour de moi. Je ne suis pourtant pas entrain de perdre connaissance. Je me tâte les joues pour vérifier si je suis bien réveillée. C'est le cas.

Alors que je suis encore en plein dilemme, une image s'affiche devant moi : une ville. L'image s'estompe vite, comme de la poudre. Elle est remplacée par le seuil d'une maison. Je finis par me lever, encore bluffée de constater que mon siège n'était déjà plus sous mes fesses.

Je me tourne vers la porte et d'un geste de la main gauche, essaie de la traverser sans l'ouvrir. Tout est rentré dans l'ordre, apparemment. Je passe sans aucun filtre perturbateur. C'est une demeure avec étage. Je tombe sur les escaliers au palier. Une peinture beige très esthétique, accompagnée d'une barre blanche au ras du sol. J'entends des voix provenant de ma gauche, dans la grande pièce, certainement la salle de séjour. Un parfum de chocolat me parvient aux narines.

Je suis de nouveau comme appelée vers une des pièces du haut. Je monte les marches avant de virer vers ma gauche. Trois portes se présentent à moi. Elles sont toutes d'un auburn verni. Nul besoin de me poser de question, sentant déjà une boule me serrer le cœur, preuve que c'est la troisième porte, celle du fond, où se trouve mon prochain personnage.

Ce Que Tes Émotions Leur FontOù les histoires vivent. Découvrez maintenant