Chapitre 60 : Lune, Plume & Scratch

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Une plume me fouetta violemment le visage, alors que je me jetai tête la première derrière la plus grande roche de la grotte. Bientôt, le prince des fae m'imita pour se protéger lui aussi des attaques foudroyantes de l'aigle du Caucase. Muni de ses serres, il accompagna chacun de ses coups d'un cri strident qui menaçait de me faire perdre l'ouïs.

Quelle puissance ! haleta Aragorn qui peinait à rester accroupi.

Le bruit assourdissant des pierres qui volaient en tout sens, ainsi que celui des ailes géantes qui cognaient contre les parois m'oppressait. Pourtant, ce n'était pas le cas du descendant de Zeus qui se tenait campé sur ses deux jambes tel un héros. Un héros qui avait visiblement plus toute sa tête.

Il esquiva la serre de l'oiseau, acérée et recouverte de sang, en exécutant une roulade avant quasiment parfaite. Puis avant même de crier garde, il se jeta vers le bec de l'oiseau, jaune et luisant, pour le propulser hors de la grotte.

Leith ! Il y a du vide en bas, ne fais pas ça ! l'avertit aussitôt Aragorn.

J'étais aussi de cet avis, mais essayer de raisonner Leith ne servait à rien. Lorsqu'il avait une idée en tête, il était bien déterminé à aller jusqu'au bout. Et puis, j'étais certaine que Leith savait ce qu'il faisait. Il avait bien plus d'expérience que quiconque ici, et avait déjà participé à plusieurs élections au sein de l'école, sans oublier les créatures qu'il chassait pour le compte de l'Olympe. Le descendant de Zeus s'accrocha au plumage du volatile qui hurla alors de douleur avant de partir en piquet dans le vide.

Je courus avec Aragorn au bord de la grotte, juste au dessus de la falaise et vit l'oiseau volait dangereusement vers le sol avec Leith sur sa huppe multicolore. Grâce à ma vue aiguisée, je remarquai la force à laquelle Leith s'accrochait à son plumage pour ne pas risquer de tomber dans le vide. Je grimaçai d'effroi lorsque je crus que l'animal allait s'écraser, mais il remonta in extremis et fila dans les nuages à une vitesse folle.

Comment attirer l'oiseau jusqu'ici ? Qu'est-ce que l'aigle du Caucase adorait par dessus tout au point d'ignorer un pauvre fou sur son dos ? Je me creusai les méninges en me mordillant les lèvres. Les loupings de la créature ne tarderaient pas à fatiguer Leith, et il le dévorerait alors tout cru. Mais oui, c'est ça !

Aragorn ! Est-ce que tu as ramené de la viande avec toi ?

Seulement du poisson, mais ce n'est pas vraiment de la viande.

Zut ! L'aigle du Caucase raffolait surtout de la viande fraîche et saignante, dans le genre ... nous !

L'aigle a sûrement du être attiré par l'odeur, lui expliquai-je en me remémorant notre festin.

Sans aucun doute, mais il n'y a plus rien maintenant, constata-t-il en désignant les braises du feu que j'avais éteins plus tôt.

Dans ce cas, ça sera toi la viande, lui annonçai-je avec un très grand sérieux.

Q-quoi ?

Les yeux violets d'Aragorn se dilatèrent de surprise. Bon d'accord, l'idée n'était pas rassurante.

J'ai lu dans un bouquin que l'aigle du Caucase avait un odorat extrêmement développé. Brûler un bout de ta peau devrait suffit à l'attirer par ici.

Tu veux que je brûle ma peau ? Cette idée est ...

Je l'aurais fait à ta place, mais mes flammes ne peuvent pas me blesser, le coupai-je aussitôt pour le convaincre de cette seule option.

— ... absolument géniale, finit-il contre toute attente. Tiens, fais-toi plaisir. Je suis prêt à tout pour qu'on remporte des points.

Le Prince fae me tendit alors son bras. J'avais imaginé des négociations houleuses venant de sa part, et même pensé à second plan si le prince refusait. J'aurais pu allumer un feu normal, mais cela m'aurait pris beaucoup plus de temps et cette idée n'était même pas sûre de fonctionner. Après tout, je n'avais jamais allumé un feu de ma vie sans chalumeau (ou mes mains magiques). Le Prince fae était loin d'être un jeune surnaturel peureux apparemment. Si il était réellement de sang royale, je pensais davantage à une personne désagréable qui ne voudrait jamais se salir les mains et profiter de ses sujets pour satisfaire le moindre de ses désirs. Dans le monde surnaturel, ce n'était pas le cas. Même si vous étiez un « fils de », vous deviez faire vos preuves !

J'invoquai une flamme de la taille d'une balle de tennis et la passai en dessus de son bras. Elle devait être suffisamment éloignée pour qu'elle ne lui laisse aucune marque, mais assez proche pour qu'une odeur de brûlée emplisse nos narines. Si je pouvais sentir l'odeur, l'oiseau aussi ! Aragorn ne grimaça pas une seule fois, et regarda avec une attention toute particulière les flammes qui dansaient dans ma paume.

Ça va ? lui demandai-je en éteignant ma flamme.

Je m'attendais à ... Attention !

Aragorn me poussa sur le côté alors que l'aigle du Caucase venait de se jeter à nouveau dans la grotte. Au moins, mon plan avait fonctionné !Cette fois, le fae et moi eurent le même réflexe. Nous nous agrippâmes tous les deux à l'oiseau qui décolla à nouveau dans les cieux. Bien que nous étions beaucoup plus légers que lui, avoir trois personnes sur ses ailes en plein vol ne l'aidait pas à garder son équilibre. L'aigle du Caucase pencha à droite, puis à gauche, au point où je faillis tomber dans la vide à plusieurs reprises. Mes efforts portèrent finalement ses fruits lorsqu'il se posa — un peu trop violemment — dans la jungle. À peine mon pied atterrit sur la terre fraîche que je préparais une boule de feu gigantesque pour la lui asséner en pleine figure.

À nous les dix points ! hurlai-je en prenant mon élan pour asséner mon attaque, déjà victorieuse.

Pourtant, je fus interrompue par Leith qui se mit en plein milieu de la trajectoire.

Qu'est-ce que tu fous ?

— Les flammes vont le tuer ! Il faut neutraliser la créature pour avoir les points.

J'éteignis mes flammes en me remémorant les propos exactes des organisateurs. Le descendant de Zeus avait raison. À aucun moment les organisateurs avaient parlé de tuer une créature ou de la blesser. Dans ce cas, comment allions-nous « neutraliser » cette créature alors qu'elle faisait trois fois notre taille ?

J'ai une idée, nous coupa Aragorn.

Il posa sa main sur l'un des arbres attelés à la créature qui tentait de reprendre son vol, en vain. Des racines gigantesques sortirent alors de la terre comme si elles s'étiraient après des années de sommeil. Elles filèrent alors, rapide comme des flèches, se nouer autour de l'oiseau qui ne pouvait plus faire le moindre mouvement.

Bravo, Aragorn ! le félicitai-je en sautant de joie dans ses bras.

Ça va, il n'a rien fait d'extraordinaire, bougonna Leith qui enlevait les plumes de ses cheveux.

J'allais le contredire en lui répétant qu'à part faire l'idiot à dos d'oiseau, il n'avait pas servi à grand chose, mais un flash passa dans ma vision. Ce fut rapide, mais je n'eus aucun mal à la distinguer malgré la nuit noire.

À terre, ce n'est pas fini ! criai-je à l'attention de mon équipe.

Merci d'avoir fait tout le travail pour nous, nous applaudit une voix féminine depuis la branche d'un arbre.

Kate, grogna Leith en reconnaissant la descendante d'Artémis sous le mince rayon de la lune, muni de son carquois et de ses flèches.

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Désolée pour le retard, j'ai finalement eu une méga inspiration à 22h30 et j'ai pu terminer 🤣 Des fois faut juste attendre le bon moment !

J'espère que le chapitre vous aura plu. Pour ceux qui ont oublié la descendante d'Arémis (Kate) elle est apparue dans le tome 1 et est une amie d'Alec. Elle ne s'entend pas vraiment avec Ambre, même si le courant passe quand même mieux qu'avec Livia ou Céleste 😅

À dimanche !

GOD'S RETURN 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant