CHAPITRE 1: Seul.

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Pologne.

Varsovie.

1 mois après le décès d'Ania.





CÔME.





Les heures qui défilent m'enfoncent toujours un peu plus dans le cuir du vieux canapé.

La Varsovie est un mélange entre le nouveau et l'ancien. Le passé et le présent. Une ville de gratte-ciel et de ruines.

Et les King sont une des plus anciennes familles.

Planté en pleine capital, le manoir de mes grands-parents est perdu au milieu d'une étendue de verdure s'étalant sur des hectares. Il fait preuve de notre ancienneté, de notre histoire. Les sculptures venaient de France, d'aussi loin que je me souvienne, l'odeur de la bibliothèque a toujours embaumé toute la maison, les livres avaient plus d'une centaine d'années. Et ce parquet craquant sous nos pieds aurait bien eu besoin d'une rénovation.

Un dédale de souvenirs que je m'efforce d'oublier.

J'ai vu Ania grandir ici.

Une boule se forme dans ma gorge. Je sens mon corps frissonner, nous sommes début janvier, il fait froid. Mes bras sont croisés sous ma poitrine, je n'entends plus aucun son, un sifflement aigu dans mes oreilles qui me cloue sur place depuis une bonne heure.

Mon regard reste planté dans ses yeux à elle.

Assise sur le canapé en face du mien. Droite comme un piquet.

Le visage fondu par les flammes, noir de cendre.

Pour la première fois, elle ne me demande pas de l'aider. Elle ne fait qu'éterniser la couleur de ses iris verte dans les miennes. Et je suis incapable de détourner le regard.

Son silence m'effraie encore plus que ses hurlements. Entourés par tous les membres masculins de ma famille. Je ne vois plus qu'elle. Je subis ses yeux accablants, je subis les chuchotements des King, ceux qui m'évitent, ceux qui ne me regardent plus dans les yeux. Alors je m'enfonce encore plus sur ce canapé. Je n'ai plus la conscience de penser que peut-être tout cela n'est qu'un cauchemar immonde duquel bientôt je saurais me réveiller.

Ania est morte ?

Est-ce vraiment la réalité ?

Ania est morte.

— Côme.

Chaque inspiration est un supplice de douleur. Le genre de maux qui vous retourne l'estomac, et à chaque soulèvement vous pensez vomir vos tripes à même le sol, mais ça n'arrive jamais.

Vous devenez vos cicatrices.

— Bois, un peu d'eau.

La voix de Robin sonne plus claire dans ma tête. Je me sens cligner des yeux en inspirant d'un coup sec. J'avais cessé de le faire depuis un moment. Ma tête est extrêmement lourde, une migraine me lance jusque dans mes tempes.

Et l'image de maman ne part pas.

Il n'y a que moi qui la vois. Elle et ses flammes.

— Avale ça.

La main de Robin apparaît dans mon champ de vision. Cela met définitivement fin à ma transe, les voix de ma famille se décuplent dans mes oreilles j'entends tout ce qui m'entoure.

"Il l'a laissé. Mourir."

"C'était la cadette de la famille."

"Il n'a pas su la protéger."

MARIPOSA | T.1 / T.2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant