IV - Chapitre XVI

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Arrivées dans la petite salle à manger, Hélène lâcha le bras de son amie, dit poliment bonjour, et s'assit en bout de table. Margot fit de même, et se plaça face à Arthur.
Hélène évita de croiser les regards des deux hommes, mais lorsqu'Arthur s'adressa à elle, elle n'eut plus le choix:

-Vous avez bien dormi chère belle-sœur?

Elle ne l'avait pas revu depuis la veille dans les jardins, suite à ses menaces et à sa fuite. Elle se fit violence pour ne pas lui lancer un regard trop empli de haine.

-Oui, très bien merci.
-Je suis si pressé de découvrir les petits minois de mes neveux et nièces...

Hélène se figea, les yeux rivés sur son assiette, ses phalanges blanchies, entourées férocement autour de sa fourchette. Elle ne savait pas quoi répondre, mais le duc devina la gêne de la jeune femme et vint à son secours d'un ton neutre:

-Arthur arrête.
-Je ne fais que communiquer ma joie de...

Cette fois il le coupa, sur un ton toujours aussi calme:

-Arrête. Ou bien nous terminerons ce déjeuné sans ta présence.

Le frère cadet ne s'attendait pas à une telle réflexion. S'ils se sont souvent disputés ou affrontés, ça n'a jamais été le cas au sujet d'une femme. Et si cela avait dut arriver, Arthur n'aurait jamais pensé qu'une jeune campagnarde inoffensive en soit la cause.
Il claqua la langue sur son palais, mais finit par se contenter de boire une gorgée de vin en silence.
Philippe reposa son attention sur sa femme:

-Qu'avez-vous prévu de votre journée?
-...je ne sais pas... rien...
-Il fait un temps merveilleux. Vous devriez aller faire une balade à cheval, nos écuries sont grandes. Vous savez monter n'est-ce pas?

Elle hocha la tête, timidement. Elle ne se sentait vraiment pas l'énergie de monter à cheval, sans compter les douleurs dans son entre jambe. Et puis sa mère lui interdisait ces derniers années de monter trop souvent et trop longtemps, pour ne pas abîmer son bassin pour enfanter disait-elle, ni qu'elle ne devienne trop musclée, alors son niveau n'était plus aussi bon que lorsqu'elle était enfant.

-Je dois m'absenter pendant trois jours, j'ai des affaires à régler au près du roi à Versailles. C'est pour cela que je voulais vous voir ce matin. Ne vous inquiétez pas, je vous laisse entre de bonnes mains. Celles de mon frère et de Madame Simone. Ne restez pas enfermée dans votre chambre, c'est tout ce que je vous demande. Une jeune femme tel que vous a besoin de s'aérer.

Hélène avait cessé d'écouter après « celles de mon frère ».
Si elle était soulagée de ne pas devoir subir une nuit telle que la dernière puisque son mari allait s'absenter, l'idée de rester « seule » avec Arthur la fit frémir. Elle se jura intérieurement de ne jamais quitter Margot, et de ne pas faire l'erreur de se retrouver seule avec lui comme se fut le cas dans les jardins.

-Je prendrai soin d'elle cher frère, ne t'en fais pas, articula Arthur avec une sincérité grave dans la voix.

Philippe leva un regard clair à son cadet:

-Ne la tourmente pas.
-Tu me fais si peu confiance?
-Je te fais confiance plus qu'à n'importe qui. Mais je te connais. Alors sois digne de cette maison et de notre nom.
-...J'en fais le serment.

Le déjeuné s'acheva en silence, puis Philippe de leva pour partir. Il salua son frère et Margot puis s'approcha d'Hélène pour prendre sa main et y déposer un baiser très doux.

-Soyez-sage en mon absence Hélène...

Elle se força à sourire, et lui souhaita un bon voyage.
Le duc partit.

Épées et BaisersWhere stories live. Discover now