XVIII - Chapitre LXXX

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-Bonsoir Guillaume.
-Bonsoir Hélène.

Il l'avait reconnue sans même la voir. Il se tourna alors face à elle, et ils se regardèrent en silence tandis que la foule grouillait dans le Grand Salon.
Finalement, c'est lui qui finit par briser le silence:

-La grossesse vous va bien. Je suis sincère. Vous avez l'air très heureuse.

Elle sourit poliment en touchant son ventre:

-Oui... Il nous a visiblement fallut du temps avec Philippe. Mais nous semblons nous comprendre désormais.
-Les mariages heureux sont rares, vous avez beaucoup de chance, l'un comme l'autre... Cette fête est très belle.
-Il a fait ça pour moi, je ne m'y attendais pas, cela m'a beaucoup touché.
-Vous avez su le faire changer, il est méconnaissable. J'ai l'impression qu'en réalité tout a changé depuis ces derniers mois, et qu'une éternité s'est écoulée...
-Oui, moi aussi.

Alors, Hélène sortit de sa manche le mouchoir brodé d'un G et lui tendit. Il le prit et ne cacha pas sa surprise.

-Vous l'avez gardé?
-Il est vôtre, je me devais de vous le rendre.
-Je vous l'ai donné, il est à vous.
-Vous me l'avez donné pour m'aider, et il a accomplit sa mission. Ce mouchoir m'a porté chance, et m'a donné du courage, beaucoup. Je vous en remercie sincèrement. Et je vous remercie pour tout ce que vous avez fait pour moi. Dans cette forêt. À Versailles... Mais aujourd'hui je me dois de vous rendre ce présent. Il ne peut pas m'être destiné, cela n'est pas bien.

Hélène ne savait pas si elle aimait Philippe, et elle ne le lui avait jamais dit. Et ce qu'elle avait par le passé ressentit pour Guillaume était, elle en avait peur, un sentiment de passion absolu, et si l'amour ressemblait à quelque chose, alors c'était forcément à ça. La duchesse avait conscience qu'elle ne pouvait contrôler ses sentiments, néanmoins elle voulait décider de ses actes. Elle était mariée à Philippe, et elle avait appris à être heureuse ainsi. Il ne s'était rien passé avec Guillaume, et cela devait rester ainsi. A jamais.

Guillaume sourit tristement, rangea le tissu dans sa poche.

-Vous avez raison. Merci d'en avoir pris soin Hélène.

Elle commença alors à s'éloigner, mais il la retint par le bras. Elle leva les yeux vers ses iris émeraudes.

-Je n'ai jamais voulu vous faire de tord Hélène. Je vous demande pardon...

Il la lâcha presque aussitôt qu'il l'avait touchée. Et elle sourit sincèrement en posant sa main sur la sienne:

-Merci encore Guillaume. Pour tout.

Et sur ces mots, ils se séparèrent.
La jeune duchesse commençait à être fatiguée et avait besoin de se reposer. Elle voulut s'éclipser discrètement et monta les premières marches du grand escalier pour rejoindre ses appartements lorsqu'une voix la rattrapa:

-Duchesse.

Elle se retourna, et découvrit avec horreur l'ancienne maîtresse de Philippe: Louison d'Armancier.
Hélène tenta de ne rien laisser paraître et de rester solide comme un roc. Après tout, elle était chez elle.

-Mademoiselle d'Armancier.
-Vous allez au lit? Vous avez raison, il est déjà tard pour les petites filles.
-Vos piques grossières me font rire, car c'est vous même que vous insulter. Dois-je vous rappeler que l'homme que vous aimez est tombé amoureux de cette fameuse petite fille que je suis?

La femme perdit son sourire suffisant et plissa les yeux:

-Nous savons l'une comme l'autre il ne vous aime pas. Il vous a épousée parce qu'il avait besoin d'un ventre pour y faire grandir un hériter.
-Vous auriez pu être ce ventre et pourtant nous voilà, répondit-elle en caressant son ventre avec satisfaction et fierté.
-Tant que cette chose n'est pas née, vous n'avez pas rempli votre devoir, et il est encore temps pour le duc de se remarier, avec celle qui saura le satisfaire en toutes choses. Faites attention duchesse, tant de grossesses se passent mal...

Et sur ces mots elle tourna les talons et repartit dans les salons bondés de monde.

Hélène n'avait pas aimé ces menaces faussement déguisées. Elle serra un peu plus ses doigts contre son ventre, en la regardant s'éloigner, puis repris sa montée, trop pressée de rentrer dans ses appartements.
Soudain, à peine arrivée en haut des marches, une ombre passa devant elle à toute vitesse, et sans la moindre pitié la poussa en arrière. Elle put voir son visage, juste une seconde. Un homme. Qu'elle n'avait jamais vu.
Mais Hélène n'eut le temps ni de hurler ni de se rattraper à quoi que ce soit.
Elle tombait. Inexorablement.

Épées et BaisersWhere stories live. Discover now