VIII - Chapitre XXX

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On avait habillée Hélène d'une magnifique robe de cavalière bleue roi, et sa coiffure était tout particulièrement haute pour ne pas traîner. En se voyant, elle s'était trouvée belle, plus rayonnante que le matin, mais également étrange, comme si ce n'était pas elle dans ce reflet. Sa mère avait brûlé toutes ses robes pour le cheval, et elle avait oublié sa silhouette dedans. Cette vision lui paraissait étrange, mais peut être libératrice.

Tout le monde s'était rejoint aux écuries. Margot portait également une robe de cavalière, beige, et les trois hommes des tenues classiques, principalement noires. Hélène fut la dernière à arriver. Son corset avait été particulièrement serré, et avait mis du temps à être lacé. La gouvernante qui était présente ne put s'empêcher de relever qu'elle avait trop manger au petit déjeuner et qu'il faudrait donc serrer simplement davantage. La jeune femme manquait de souffle, mais cela lui importait peu. Si elle refusait de s'approcher des écuries depuis son arrivée- comme si sa mère pouvait surgir à tout instant- , elle était désormais plus excitée que jamais.
Elle avait encore mal à son entre jambe depuis la visite de son mari la veille au soir, et sa vessie la brûlait toujours. Mais avoir correctement mangé lui avait redonné des forces et elle se sentait moins faible que ces derniers jours.

-Hélène... vous êtes ravissante. Comme toujours. fit remarquer Arthur, non sans une pointe d'agacement dissimulée.

Philippe s'approcha de sa femme et lui pris la main en l'observant. Il dit doucement, pour que seule elle puisse entendre:

-Il a raison. Vous êtes très belle.

Son ton était assez froid, mais Hélène commençait à comprendre que c'était de toute façon ainsi qu'il fonctionnait. Elle le remercie d'un sourire timide, essayant de chasser de sa mémoire les images de la nuit dernière.
Sans lâcher sa main, il la guida ensuite vers les différents boxes.

-À vous l'honneur de choisir votre monture pour notre balade. Cinq chevaux ont été préparés. Achille est très doux, Prune aussi, patiente. Odin est atrocement têtu, je me demande parfois si ce n'est pas un âne déguisé en cheval. Lune est surtout énergique, mais adorable, et enfin Calypso, la jument que je vais monter.

Hélène regarda l'animal. Sa robe grise était tachetée de blanc et sa crinière confondait les deux couleurs. La jeune femme posa sa main sur le dos de la jument, et eut l'impression de caresser de nouveau sa jument grise qu'elle avait tant montée enfant avant que sa mère ne la fasse abattre.

-Pourquoi elle?
-C'est une jument sauvage. Je l'ai moi-même dressée durant des mois pour la rendre docile. Elle était si farouche, on ne pouvait même pas la toucher... Mais j'ai fini par gagner sa confiance et elle la mienne. Elle est toujours aussi joueuse et fougueuse aujourd'hui, je n'aurais voulu lui retirer cela pour rien au monde. Mais elle n'essaye plus de me tuer ou me fuir lorsque j'ose la toucher.

Sur ces mots il posa sa main à son tour sur le dos de l'animal, et ses doigts frôlèrent ceux d'Hélène. Si elle avait écouté son instinct elle aurait sursauté et retiré sa main en fuyant du regard. Mais au lieu de ça elle ne bougea pas, et garda ses yeux plongés dans ceux de son mari. Le temps s'écoula lentement, sans que personne ne parle, et finalement elle articula:

-Je choisis Calypso.

Margot, qui avait entendu toute la scène, savait que son amie n'avait pas monté depuis des années et n'était pas certaine qu'une jument sauvage fougueuse était une bonne idée. Elle approcha d'un pas vers le couple qui séparèrent aussitôt leurs doigts:

-Madame. Monsieur Le Duc a dit qu'il montrait cette jument. Peut être devriez vous choisir un cheval plus doux... Achille par exemple est...

Philippe la coupa:

-Madame La Duchesse a choisi. Honte sur moi et sur mon nom si je ne tiens pas ma parole...

Hélène sourit.

Épées et BaisersWhere stories live. Discover now